Cameroun, paradigme de l’incompétence politique en Sardinavie


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Fotsing Nzodjou
Fotsing Nzodjou

Alors que le Covid-19 terrasse et met en danger la vie du peuple camerounais, l’État manque jusqu’ici de cette élégance politique dont il se targe au regard de la confiance que les prétendus 71% de votants lui auraient accordée lors des élections présidentielles de 2018. Ce défaut politique est la conséquence de plusieurs facteurs attestant de l’épuisement du système de pillage de la Sardinavie.

Une aubaine ratée

On se serait attendu que le hold-up électoral accouchât d’un peu de sagesse politique, que la perte de vitesse et de popularité observée en raison d’une situation avérée de vol politique eut semé dans l’esprit des braqueurs d’Etoudi le sens de la réflexion politique. Hélas il n’en est rien. Une aubaine ratée. Mais en quoi ?

Petite réflexion rapide en la faveur des sardinards : le Covid-19 aurait pu donner l’occasion à ces gens de reconquérir le peuple camerounais et de faire ensuite passer aisément le second hold-up en préparation. Surtout laissez-moi exprimer librement mes hypothèses. Il aurait suffi de prendre des mesures fortes et de l’attribuer, comme ils le font depuis, au PR. Entre autres :
– fermeture des frontières
– confinement total
– Emprunt, même à la France, de la somme de 3000 milliards, dans le secret total, comme cela s’est souvent fait, et prétendre que le PR l’a mis à la disposition des Camerounais pour lutter contre le Covid-19,
– déclarer la dispense du paiement des impôts et des loyers ainsi que de l’eau et de l’électricité, sans oublier la diminution du prix l’essence à la pompe, durant cette période pandémique.
– procéder à un dépistage massif et mettre tous les infectés dans de meilleures conditions pour les aider à vite guérir,
– prendre d’autres dispositions d’accompagnement alimentaire et sanitaires.

De telles actions auraient eu l’avantage d’adoucir le cœur des Camerounais, de les conserver chez eux, de montrer un nouveau visage du gouvernement qui enfin comprend les souffrances de son peuple et sait enfin de qui il tient ce pouvoir. Ainsi, même l’opposition de tout bord n’aurait pas manqué d’accompagner ce mouvement qui aura pris au sérieux la vie des Camerounais.

Le second hold-up en préparation, que ce soit Frank Biya ou autre, serait passé dans les esprits apaisés nageant dans l’espoir que les choses changent. On aurait alors annoncé l’indisponibilité du PR, déclaré la vacance du pouvoir, organisé les élections anticipées. Bref, tout serait plus facile à avaler.

Mais l’incompétence politique est à son paroxysme et tout démontre l’épuisement de l’appareil politique. Ce qui me pousse à faire une seconde analyse : l’échec global d’un éventuel second hold-up en situation de crise du Covid-19 et après le Covid-19.

Cet échec en situation de Covid-19

Si la rumeur est une source d’information peu sûre, elle donne néanmoins à l’esprit de quoi nourrir ses hypothèses. Notre hypothèse est que si la rumeur qui veut que Frank Biya soit porté à la tête du Cameroun par les méthodes constitutionnelles ou anti-constitutionnelles est avérée, alors le politique de cette circonstance aura oublié la colère de l’homme camerounais qui, depuis 38 ans, a malmené une jeunesse en mal de changement, et d’avenir meilleur. Cette jeunesse qui n’a pas massivement voté pour M. Biya et qui, somme toute, en ces temps de crise, ne sait pas compter sur la disponibilité de son PR.

Une jeunesse abandonnée à elle-même. Là on parle d’une jeunesse oubliée et non préparée à un changement de gré à gré à la tête de l’État. Cette jeunesse risquera d’être de faciles candidats volontaires à toute orientation guerrière dans l’optique d’une interminable guerre civile. Et si une telle situation arrive, c’est pour dénombrer des morts. Le Covid-19 sera, en même temps que les balles de l’armée, responsable des morts en nombre. Et cela sera imputé au nouveau PR, fut-il ou pas Franck Biya, qui ne serait pas l’incarnation de la volonté du peuple en mal de changement.

L’échec après le Covid-19

Si durant le Covid-19, le hold-up se tient, ouvrant avec une grande probabilité sur l’assassinat du peuple camerounais, alors la suite sera un contexte faussement démocratique, une dictature plus rude encore s’observera car le gouvernement, se sachant responsable de tous les délits punissables par les lois internationales, n’aura que la terreur pour se maintenir. L’économie en prendra un sérieux coup, le chômage recrutera les candidats en millions et la guerre civile finira pas se déclencher en Sardinavie.

Une autre hypothèse est permise au regard de la situation actuelle : le régime de Yaoundé est financièrement épuisé.

L’épuisement financier et ses conséquences

Cette hypothèse est aussi le corolaire du même paradigme de l’incompétence politique en Sardinavie. Le pouvoir de Yaoundé a dû tendre la main à ses différents pontes pour un effort ultime visant à barrer la route à l’opposition et remporter les élections présidentielles et municipales. Car, il devait avoir 7 ans à nouveau pour renflouer les caisses du pillage. Cela a été fait dans le climat de vol que le monde entier a vu. Seulement, le Covid-19 n’était pas prévu dans l’équation.

Aussi, à peine à un an et 6 mois de gouvernance, les caisses sont encore vides et peu fournies. Impossible pour ces pontes du régime de renflouer les caisses. Les gigantesques sommes détournées sont dans les comptes étrangers et menacées d’être gelées par les gouvernements étrangers qui en savent la provenance. Les seules sommes qui sont à leurs dispositions sont dans les coffres forts de leurs domiciles. Mais presque rien dans leurs comptes bancaires. Mais ces sommes sont aussi en pénuries.

La guerre civile du NOSO a déjà épuisé financièrement, celle contre Boko Haram aussi et les deux épisodes politiques que sont la Présidentielle de 2018 et les Municipales de 2020. Bref, le compte est fait, le pouvoir de Yaoundé n’aura pas les moyens de tenir une autre guerre civile si jamais elle éclate en zone francophone. Il n’a plus les moyens pour cela. Nous en voulons pour preuve le fait que la France leur aurait fait ce prêt d’argent pour lutter contre le Covid-19. Car je reste convaincu que l’incompétence dont nous égrainons les facettes vient de cette impossibilité financière là. Car ils ont sans doute pensé à cette hypothèse, mais la France étant sur le pied de guerre ne peut malheureusement pas venir en aide au Cameroun.

Ensuite, si jamais il y avait subitement de l’argent pour la répression du peuple qui réclame ses droits, alors le peuple camerounais verra une fois de plus qu’on s’est moqué de lui avec 1 milliard seulement alloué à la lutte contre le Covid-19. Et n’osera plus suivre le gouvernement de Yaoundé. Ce sera une autre raison pour les jeunes de rejoindre la résistance et d’alimenter la guerre civile dans la zone francophone. Et l’État s’épuisera et ce, avec la vie des millions de Camerounais sacrifiés.

Ce qu’il ne faut pas oublier aussi est que les pontes du régime sont, pour l’essentiel, interdits de séjour dans les pays européens et américains. Donc le seul lieu où ils peuvent dépenser ce qu’ils ont détourné, c’est au pays. Mais ils sont aussi sous le coup de la loi et sont leurs propres prisonniers.

En résumé, l’incompétence du paradigme politique en Sardinavie est justifiée par le fait qu’ils n’ont plus les moyens de leur politique, comptent sur le rouleau limité de l’armée, créent un nouveau front de guerre civile pour fuir et non pour garder le pouvoir, et cela au prix du sang des Camerounais.

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