Burkina et Côte d’Ivoire se réconcilient


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La frontière entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso, fermée depuis l’insurrection du 19 septembre 2002, a officiellement été rouverte mercredi. Une réouverture synonyme de normalisation entre les deux pays économiquement interdépendants, mais qui ne semble pas marquer une avancée dans le processus de paix inter-ivoirien.

Taxis, transporteurs routiers, bus… ils étaient une trentaine, mercredi, à attendre la réouverture de la frontière ivoiro-burkinabè, annoncée la veille pour 12h00 GMT. Ouagadougou avait décidé sa fermeture dès le début de l’insurrection armée en Côte d’Ivoire, le 19 septembre 2002, « par crainte d’infiltration d’éléments armés ». Le Burkina Faso et son Président, Blaise Compaoré, ont pourtant immédiatement été désignés par Abidjan comme les principaux soutiens des insurgés, qui contrôlent à ce jour le Nord de la Côte d’Ivoire. A trois reprises, la réouverture de la frontière annoncée en fanfare n’a finalement pas eu lieu. Mercredi, il a fallu attendre 15h30 pour voir les premiers véhicules la franchir. Si la presse nationale montre peu d’intérêt pour l’événement, les opérateurs économiques et les « binationaux » l’accueillent avec une grande joie.

« Le festin du retour »

Selon la BBC, un tiers de la population burkinabè a économiquement subi les conséquences de la fermeture de la frontière entre les deux pays ouest-africains. Depuis le début de l’insurrection, le Burkina Faso, dont le fret maritime passait par les ports ivoiriens, a dû se rabattre sur des ports voisins moins faciles d’accès. La Côte d’Ivoire, dont la croissance économique a baissé de 1,8 % en un an, n’est pas mieux lotie. Et les 350 000 résidents d’origine burkinabè qui l’ont fui pour leur pays d’origine manquent toujours à son économie.

On les retrouvait parfois, mercredi, dans les taxis bondés attendant la réouverture de la frontière. Comme cet étudiant, pressé de retrouver ses parents à Bouaké, dans le centre de la Côte d’ivoire, et qui emporte avec lui trois coqs pour « le festin du retour ». Certains font le voyage inverse, comme cette mère de famille qui meurt d’impatience de retrouver ses cinq filles et son époux à Bobo Dioulasso, au Burkina Faso. Les transporteurs routiers ne sont pas moins heureux mais appréhendent la longue route et les nombreux points de contrôle, gouvernementaux et rebelles, où ils devront sans doute s’acquitter de « frais de route ».

Le politique à la traîne

Des points sur lesquels la presse nationale, embourbée dans les querelles politiques, ne s’est pas attardée. Pour le quotidien ivoirien Le Patriote, proche du Rassemblement des Républicains (RDR) d’Alassane Ouatara, cette réouverture serait due aux signes positifs montrés par Blaise Compaoré à son homologue ivoirien. Par l’intermédiaire de son ministre de l’Agriculture, Salif Diallo, reçu mardi à la Présidence de la République, il aurait convaincu Laurent Gbagbo que le Burkina Faso ne soutiendrait pas les comploteurs de l’affaire « IB ». Une histoire de coup d’Etat monté de l’étranger qui secoue actuellement la Côte d’Ivoire et qui a déjà mené à plusieurs arrestations, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays. De son côté, le quotidien Le Temps, proche du Front populaire ivoirien (FPI) de Laurent Gbagbo, déplore que l’on s’attarde sur l’ouverture d’une frontière qui n’a jamais été fermée. Le journal considère en effet le Nord du pays comme annexé par le Burkina !

Après les signes encourageants montrés en juillet par les militaires en conflit, c’est tout le secteur économique ivoirien qui s’apprête aujourd’hui à se relever. Reste aux hommes politiques la rude tâche de taire leurs ambitions personnelles pour l’intérêt national.

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