Bénin : parcours d’une mère de triplés


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Avoir un bébé, c’est toute une organisation. Alors quand on en a trois d’un coup… Autant dire que c’est un état major qu’il faut mettre en place ! Reine, une Béninoise qui a eu des triplés à 25 ans, nous explique comment elle a vécu cet évènement.

« Lorsque j’ai su que j’allais avoir des trois enfants d’un coup, ça a été une surprise très agréable. C’est plus intéressant car, après, on peut se reposer. Mais j’étais quand même étonnée et je demandais comment ça allait se passer », se souvient Reine, qui a accouché de triplés il y a sept ans. Cette Béninoise, dont le pays fait partie de ceux qui considèrent les grossesses multiples comme une bénédiction, avait alors 25 ans et il s’agissait de sa première maternité. La jeune mère a eu de la chance : elle a pu faire trois échographies, une par trimestre à 6 000 FCFA (environ neuf euros) chacune, pour suivre sa grossesse. Donc pas de surprise. « Certaines femmes n’apprennent que le jour de l’accouchement qu’elles ont fait une grossesse multiple. Mais la surprise est rare, parce que qu’on peut estimer, à la hauteur de l’utérus, le nombre d’enfants qu’il y a. Cliniquement, on peut s’en rendre compte, donc il n’y a pas forcément besoin d’échographie », confie le Dr Calixthe Houngbedji, exerçant à l’Hôpital de la Mère et de l’Enfant.

Fatigue et menaces d’accouchement prématuré

Reine était contente de la nouvelle, mais restait angoissée : « Ma mère m’a calmée. Elle m’a dit que les trois bébés n’allaient pas sortir d’un coup, mais chacun leur tour. Comme si j’accouchais trois fois successivement ». Epuisée par la grossesse, Reine a dû arrêter au sixième mois l’activité qu’elle avait dans le marketting. « Ça n’a pas été facile. A la fin, la fatigue s’accentuait vraiment, de même que les menaces d’accouchement prématuré. J’ai dû arrêter de travailler car je devais beaucoup me reposer. Je n’avais pas le choix. Le père a dû donner des cours de mathématiques, le soir après son travail au ministère des Finances, pour compenser mon arrêt. C’était une nécessité pour nous », poursuit la jeune mère. L’accouchement s’est bien passé et Reine a donné naissance le 7 janvier 1999, à la clinique universitaire de gynécologie obstétrique de Cotonou, à ses trois Amours : Alain, Alex et Aline.

Dès le départ, la famille de Reine s’est mobilisée. Surtout sa mère, qui a quitté son village pour aider sa fille. Et en matière de grossesse multiple, elle avait de l’expérience, vu qu’elle a mis au monde des jumelles. « Je dis toujours que ma mère a été formidable. Les trois bébés dormaient avec moi et quand deux d’entre eux se réveillaient la nuit, ma mère venait s’en occuper ». Les bébés étaient chouchoutés, mais pas seulement. « On s’est bien occupé de moi. Quand je me levais le matin, mon déjeuner était prêt et ma mère lavait les enfants. Parfois, on leur donnait du lait artificiel, même quand j’étais là, pour que je me repose le plus possible », indique la maman aux 32 printemps. Poursuivant : « J’ai repris le travail au bout de trois mois, le temps de récupérer. Ma mère s’occupait des bébés avec la domestique et quand je rentrais le soir, on s’en occupait tous ensemble. Mais c’est maman qui faisait le gros du boulot. Nous, on prenait surtout en charge la nourriture ».

Allaitement maternel et lait artificiel

Comment s’est-elle débrouillée pour nourrir trois bouches, alors qu’elle n’a que deux seins, surtout quand elle a repris le travail ? « Il est impossible d’allaiter trois bébés. Alors ils avaient un allaitement mixte : un peu de mon lait et le reste du temps du lait artificiel ». Elevés des triplés demande de l’organisation, mais aussi de l’argent : « Par mois, il nous fallait 60 000 FCFA (environ 90 euros, ndlr) par tête pour les couches, acheter le lait artificiel… Ce n’était vraiment pas facile. En plus de la famille qui nous aidait en nature, quelques amis nous donnaient aussi un peu d’argent ».

Aujourd’hui, Alain, Alex et Aline ont sept ans et sont en maternelle. Une charge financière qu’il faut également assumer. « 35 000 FCFA par enfant, en comptant le matériel et l’uniforme, et 12 000 FCFA par tête pour la cantine. Mais la directrice a été gentille. Comme nous avons trois enfants, elle nous a dit de payer seulement pour deux. Et comme c’est une somme par an, ça va. Surtout qu’on peut payer par tranche », commente Reine. Plus de couches ni de lait artificiel à payer, les frais sont tout de même moins importants que quand ils étaient petits.

Si les autorités prévoient la gratuité de l’éducation, Reine n’y croit pas tellement. Et elle se demande comment ils vont payer la scolarité. « S’il y avait eu un décalage entre les enfants, ça aurait été. Là, ils entreront au collège ou au lycée en même temps et cela va nous demander une mobilisation en bloc. Mais on fait avec ce que Dieu nous a donné et on s’en remet à la providence. » Les grands-parents aident toujours le couple. Mais moins qu’avant : ils ne rajeunissent pas. « Ils font de leur mieux. Ce serait vraiment ingrat de ne pas le reconnaître », souligne Reine.

Quatre, ça suffit

Parfois, les enfants partent en vacances chez leur « mémé » et, là, c’est le repos du guerrier. « La maison est vide et on se retrouve avec soi-même. On souffle, on se repose vraiment ! » explique simplement Reine. Et du souffle, ils en ont bien besoin. Mais Reine a la chance d’avoir un mari aidant. « Vraiment, j’ai de la chance. Il fait les travaux ménagers, il lave les enfants le matin… Il ne me laisse pas acculée. Chacun met la main à la pâte », assure-t-elle.

Reine s’est « reposée » trois ans avant d’avoir un autre enfant. Careine, c’est son nom, sera la dernière du couple : « J’ai eu deux garçons et deux filles. Je pense que ça va. Par les temps qui courent, quatre enfants ce n’est pas facile. Surtout par rapport à l’éducation. Je me dis qu’on a du boulot devant ».

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