Après les tomates, les avocats du Maroc inondent les marchés européens


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Des avocats
Des avocats

Après les tomates, c’est désormais l’avocat marocain qui s’impose comme un acteur important sur les étals européens. Cette dynamique provoque une véritable onde de choc en Espagne, particulièrement dans la Communauté valencienne, où les producteurs locaux dénoncent une concurrence qu’ils jugent déloyale et menaçante pour leur activité.

Progression globale de 8% des importations d’avocats

Selon les chiffres récents relayés par Barlamane, les importations espagnoles d’avocats en provenance du Maroc ont connu une envolée spectaculaire. En janvier 2024, pas moins de 14 187 tonnes ont été acheminées vers la péninsule ibérique, soit une hausse de 89% par rapport au même mois de l’année précédente. Sur l’ensemble de l’année, l’Espagne a importé 262 071 tonnes, enregistrant une progression globale de 8%.

Cette poussée marocaine inquiète particulièrement les cultivateurs de la région de Valence, dont les récoltes, notamment de la variété Lamb Hass, peinent à trouver preneur. Le prix moyen à la production a d’ailleurs chuté en mars à 1,73 euro le kilo, contre 2,44 euros un an plus tôt – une baisse de plus de 29%, jugée alarmante par les professionnels du secteur.

Montée des vols dans les exploitations agricoles

Avec une surface cultivée de quelque 4 000 hectares, représentant environ 20% de la production nationale espagnole, la Communauté valencienne se sent fortement déstabilisée. Les producteurs dénoncent l’arrivée massive d’avocats marocains à des prix bien plus compétitifs, ce qui rend la vente de leurs propres fruits beaucoup plus difficile. Nombre d’entre eux redoutent que cette pression économique ne conduise à l’abandon progressif de la culture de l’avocat dans la région.

Autre problème soulevé par les agriculteurs : la montée des vols dans les exploitations agricoles. Ils appellent à un renforcement des dispositifs de sécurité durant la période de récolte et interpellent les autorités espagnoles pour qu’elles mettent en place des mesures visant à encadrer plus strictement les importations marocaines. Pendant ce temps, le Maroc poursuit son offensive commerciale.

Les tomates marocaines envahissent les marchés européens

Entre octobre et décembre 2024, le Maroc a exporté plus de 42 000 tonnes d’avocats vers l’Union européenne. Et cette tendance ne semble pas près de s’inverser : les producteurs marocains espèrent atteindre près de 90 000 tonnes d’ici la fin de la saison 2024/2025.

Cette pression exercée par les exportations marocaines ne se limite pas au seul secteur de l’avocat. Depuis plusieurs années, les tomates marocaines s’imposent elles aussi massivement sur les marchés européens, provoquant des frictions similaires avec les producteurs espagnols, français et italiens. Ce phénomène, qui s’est accéléré depuis les accords commerciaux entre le Maroc et l’Union européenne, est perçu par de nombreux agriculteurs européens comme une forme de dumping agricole.

Situation qualifiée d’injuste et déséquilibrée.

En Espagne, les maraîchers d’Andalousie – l’une des principales zones de production de tomates en Europe – alertent depuis plusieurs campagnes sur l’effondrement des prix à la production, directement lié à l’importation croissante de tomates marocaines. Ces produits arrivent sur le marché à des tarifs bien plus bas, en raison de coûts de production moindres au Maroc, notamment en matière de main-d’œuvre et de normes environnementales. Une situation que les producteurs européens qualifient d’injuste et déséquilibrée.

Cette concurrence exacerbée a également eu des répercussions en France, où les syndicats agricoles ont multiplié les actions symboliques pour dénoncer la fragilité du modèle agricole européen face à une politique commerciale trop permissive. En 2023, plusieurs manifestations ont eu lieu dans le sud de la France, avec des pancartes affichant « stop aux tomates importées » et des appels à favoriser les circuits courts et la production locale.

Demande de la révision des quotas d’importation

Les tensions se sont également cristallisées au sein même des institutions européennes. Plusieurs eurodéputés, notamment espagnols et français, ont demandé la révision des quotas d’importation et une meilleure régulation des produits entrant dans l’UE. Ils soulignent que les normes imposées aux agriculteurs européens sont bien plus strictes que celles exigées aux producteurs des pays tiers, créant ainsi un désavantage structurel pour l’agriculture européenne.

Face à cette pression croissante, des voix s’élèvent pour réclamer un rééquilibrage des échanges et la mise en place de clauses de sauvegarde. Si le Maroc, de son côté, met en avant le développement de son agriculture comme un levier économique et social, notamment dans les régions rurales, le débat sur la souveraineté alimentaire, la justice commerciale et la survie des filières locales en Europe reste ouvert.

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Je suis passionné de l’actualité autour des pays d’Afrique du Nord ainsi que leurs relations avec des États de l’Union Européenne.
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