Alphadi milite pour la mode africaine


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Le Festival international de la mode africaine (Fima) 2002 se tiendra cette année au Gabon du 7 au 12 août 2002. Son créateur, le couturier nigérien Alphadi, revient sur les dessous d’un événement qui vise à montrer aux décideurs africains que la mode peut être une véritable source de développement économique. Interview.

Afrik : Pourquoi le Fima a-t-il quitté le Niger ? A cause de l’épisode intégriste ?

Alphadi : En partie, mais pas seulement. Les problèmes que nous avons rencontrés avec les intégristes m’ont choqué car je suis moi-même musulman. Mais au-delà de ce phénomène, je voulais que le festival puisse également tourner dans d’autres pays africains. Et puis, j’ai eu la chance de rencontrer le président du Gabon, monsieur Omar Bongo, qui s’est proposé d’accueillir le Fima 2002.

Afrik : A qui s’adresse le Fima ? Au grand public ou aux professionnels de la mode ?

Alphadi : Le Fima est avant tout dirigé vers les hommes politiques africains. Quinze chefs d’Etat vont d’ailleurs faire le déplacement. Le festival est là pour leur montrer que la mode peut être un outil au service du développement. Nous n’avons aucun centre de formation de créateurs de mode ou de joaillerie en Afrique. Nous avons un savoir-faire africain qui n’est plus à brader. L’industrie de la mode doit profiter à l’Afrique et aux Africains. Un homme l’avait compris et je ne lui rendrai jamais assez hommage : feu notre président Ibrahim Barre Maïnassara (assassiné en avril 1999, ndlr) qui a tout fait pour que la première édition du Fima puisse se tenir en 1998.

Afrik : Combien coûte un Fima ?

Alphadi : Le premier (1998, ndlr) a coûté 2,5 milliards de F cfa (3,7 millions d’euros), le second (2000, ndlr) 1,2 milliards de F cfa (2,2 millions d’euros) et celui-ci 3,5 milliards de F cfa (5,2 millions d’euros).

Afrik : Cela peut varier du simple au double, avez-vous un plafond limite ?

Alphadi : Il faut bien comprendre que le Fima est un festival livré clef en main. En tout état de cause, le budget du festival sera toujours compris dans une fourchette entre 2 et 3,5 milliards de F cfa. Un budget que nous veillerons à toujours respecter. Tout loisir ensuite au pays hôte de réaliser d’importantes infrastructures sur place pour mieux accueillir le festival, infrastructures qui pourraient être utilisées pour des manifestations ultérieures. Et si le Fima 2002 va coûter deux fois plus cher que le précédent, c’est simplement parce que le niveau de vie au Gabon est beaucoup plus élevé que celui du Niger.

Afrik : Vous livrez un festival clef en main, mais vous travaillez forcément avec les autorités locales. Quelle est leur place dans l’organisation de la manifestation ? N’y a-t-il pas risque d’ingérence dans la conduite des opérations ?

Alphadi : Nous sommes les maîtres d’oeuvre. C’est le pays hôte qui travaille avec nous. Après quelques discussions, les autorités gabonaises ont accepté les règles du jeu. Pour leur part, elles ont monté le Comité d’organisation du Fima (Cofima) pour gérer toutes les affaires locales et la logistique sur place. Ce qui nous enlève d’ailleurs une grosse épine du pied.

Afrik : Vous parlez toujours de nous pour les organisateurs du Fima. Qui est le « nous » ?

Alphadi : Je ne suis bien sûr pas tout seul à organiser le Fima. Je travaille avec toute une structure pour cela. L’association Afrique pacifique caraïbes prestige, dont je suis le président. Elle regroupe une quinzaine de personnes entre Paris, Abidjan, Niamey et Libreville.

Afrik : Une association et pas une entreprise ?

Alphadi : Une association française loi de 1901. Notre but n’est absolument pas lucratif. Nous travaillons à promouvoir la mode en Afrique. Il s’agit d’une mission humanitaire. Bien sûr, nous avons des salariés dans l’association. Car pour organiser un tel événement, en plus des frais de fonctionnement, il faut du temps et des compétences. Mais nous ne sommes pas une société commerciale. Nous ne recherchons que la reconnaissance culturelle du savoir-faire africain.

Afrik : Le Fima n’empiète-t-il pas sur vos propres activités professionnelles ?

Alphadi : Le Fima est mon bébé. Pour le lancer, j’ai dû beaucoup m’investir. Maintenant, il faudrait des personnes capables, compétentes pour prendre le relais de la direction afin que je puisse me concentrer sur mes activités de créateur. Mais une chose est sûre : jamais je ne lâcherai le Fima.

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