Algérie : les gardes communaux reviennent à la charge


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Les gardes communaux algériens toujours mobilisés. Lundi matin, ils poursuivaient leur sit-in sur la place des Martyrs, à Alger. Et selon leurs représentants, des centaines de leurs camarades vont rejoindre la capitale pour marcher jusqu’au siège de la Présidence, où ils espèrent être plus de 15 000.

Plusieurs centaines de gardes communaux s’étaient rassemblés dimanche matin à la place des Martyrs, à Alger, pour se diriger vers la présidence de la République où leur deuxième sit-in devait avoir lieu. Certains sont arrivés très tôt. Leur lieu de rencontre était déjà encerclé par une armada de policiers antiémeute embarqués à bord d’une trentaine de camions. Leur marche vers la présidence était rendue impossible par ce dispositif sécuritaire.

Le nombre des manifestants aurait pu être bien plus important s’ils n’avaient pas rencontré des entraves dans leurs déplacements. « Des bus venant de l’est du pays ont été stoppés en cours de route. D’autres collègues ont été sommés de ne pas quitter leurs lieux de travail depuis hier. Alors que certains ont été carrément menacés d’êtres licenciés s’ils venaient à ce rassemblement », nous racontent plusieurs gardes communaux ayant pu faire le déplacement à Alger. Ils sont venus de Constantine, de Boumerdès, de Blida, d’El Oued, de Sidi Bel Abbes, de la périphérie d’Alger, de Msila, de Ghelizane, d’Oran, de Sétif, de Khenchela et d’autres wilayas encore. La veille, des rumeurs malveillantes, distillées ça et là, annonçaient que les gardes communaux allaient venir « armés » et « en civil ». « Nous sommes venus, pour la plupart, avec nos tenues officielles, et sans armes. Nous voulons nos droits, sans plus. Nous ne voulons pas de problèmes », lance l’un d’eux. Vers 9h, des policiers sont venus leur demander de désigner des représentants pour aller rencontrer des fonctionnaires à la présidence de la République. Une délégation de quatre gardes communaux a été formée pour aller transmettre leur liste de quatorze revendications.

A 11h passée la délégation est de retour. Elle est accueillie avec des applaudissements et des slogans : « Bouteflika est la solution », « Donnez nous nos droits », et « Tahya El Djazair ». Un des délégués prend la parole pour expliquer à ses collègues ce qui s’est passé durant les deux dernières heures.

« Nous avons été reçus par le chargé des contentieux à la présidence. Nous avons présenté nos revendications qui seront étudiées par la commission des recours au ministère de l’Intérieur, qui fera des propositions de solutions au président de la République, sur la base de notre requête. Ils nous ont promis d’avoir une réponse d’ici 14h », explique Abdelmalek sous les applaudissements de ses collègues.

En attendant, «c’est l’heure d’un bon casse-croûte de garantita ». C’est tout le luxe que peuvent se permettre ces fonctionnaires dont les salaires nets atteignent à peine 26.000 DA pour les meilleurs d’entre eux. Plus prévoyants, certains avaient ramené de chez eux des galettes qu’ils dégustent avec du petit-lait. D’autres se contentent d’un morceau de pain et de limonade.

Parmi leurs 14 revendications, les gardes communaux réclament principalement « une retraite complète » avec une « prime assurant une vie descente » d’un minimum de 28.000 DA par mois. Ils attendent plus de « respect et de reconnaissance », des facilités pour « l’accès aux logements sociaux », des « indemnités pour les heures supplémentaires travaillées», et des « primes et des indemnités pour les blessés ». Les gardes communaux réclament aussi une « prime de danger et de port d’arme », la «revalorisation de la prime de panier qui est de 3.000 DA/mois depuis 1994 », une » carte de lutte contre le terrorisme « et la» reconnaissance de leurs actes de bravoure au sein de la société ».

Au-delà des questions pécuniaires, certes très importantes pour les gardes communaux, la plupart avec qui nous avons discuté hier relatent des moments déplaisants et des traitements méprisants de la part des services de sécurité avec lesquels ils travaillent, en particulier durant les années de terrorisme.

«Nous avons vécu 15 ans de hogra», résume l’un d’eux. A côté de lui, un autre nous montre les traces de plusieurs impacts de balles sur son ventre. « J’ai été touché de 13 balles. Ils m’ont rejeté comme un malpropre. Et quand j’ai demandé mes indemnités, on m’a expliqué que faute de déclaration, sous 48 heures, de l’accident de travail, je n’avais droit à rien», explique ce garde communal issu de la wilaya de Chlef. Un autre profite pour nous raconter des heures interminables passées en embuscades avec les militaires «sans rien manger ». Jusqu’à 16h, aucune nouvelle n’est parvenue des hauteurs d’Alger. Des gardes communaux se préparent à passer la nuit à la place des Martyrs.

M. M., pour Le Quotidien d’Oran

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