Algérie : Bouteflika tente-t-il de museler la presse en ligne ?


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Le chef de l'Etat d'Algérie, Abdelaziz Bouteflika
Le chef de l'Etat d'Algérie, Abdelaziz Bouteflika

En Algérie, le arrestations en série de journalistes en ligne font croire que le Président Abdelaziz Bouteflika tente de faire taire ces plumes qui ne sont pas du tout tendres contre son régime.

Très actif sur les réseaux sociaux, lauréat en 2016 de l’Algeria Web Award du meilleur site d’information, directeur du site d’information Aljazair24, Ilyes Hadibi, a été arrêté à Alger, mercredi 31 octobre, et placé en détention provisoire. Il est accusé de « diffusion d’informations personnelles sur des pages Facebook », révèle Le Monde, qui ajoute que le même jour à Constantine, dans l’est du pays, Abdelkrim Zeghileche, directeur de la webradio Sarbacane, était également incarcéré.

Contre un cinquième mandat de Bouteflika

Abdelkrim Zeghileche n’est autre que le coordinateur régional du mouvement Mouwatana (« citoyenneté »), né en juin pour s’opposer à un cinquième mandat du Président Abdelaziz Bouteflika. Selon le site, il a été emprisonné pour « injures, diffamation et menaces » à l’encontre du président d’une association locale. Le Monde ajoute que M. Zeghileche avait déjà été arrêté à deux reprises, le 9 septembre et le 6 octobre, pour avoir tenté d’organiser une manifestation des opposants au cinquième mandat.

Selon une analyse faite par nos confrères du Monde, ces arrestations de journalistes sont les dernières d’une longue liste qui a commencé le 22 octobre. Ironie de l’histoire, cette date avait été décrétée « journée nationale de la presse » par les autorités il y a quelques années. Depuis ce jour, Adlène Mellah, directeur des sites d’information Algérie Direct et Dzair Presse, est incarcéré sous les accusations d’« outrage aux institutions, enregistrement ou prise de vue sans autorisation ou consentement, et atteinte à la vie privée ».

Détenu avec le frère d’un cybermilitant installé à l’étranger

Le site ajoute que le journaliste est détenu avec un ancien footballeur, un comédien et le frère d’un cybermilitant installé à l’étranger, Amir Boukhors, dont la page Facebook, Amir DZ (plus de 2 millions de fans), diffuse régulièrement des accusations de « corruption » et de « dépravation » à l’encontre de dirigeants algériens. M. Boukhors est accusé d’avoir constitué un réseau pour se livrer via sa page à « du chantage et de l’extorsion » contre des chefs d’entreprises et des responsables.

Le 23 octobre, c’était au tour d’Abdou Semmar, rédacteur en chef du site Algérie Part, et de son collaborateur Merouane Boudiab d’être arrêtés et placés en détention provisoire. Ils doivent être jugés le 8 novembre pour « diffamation et atteinte à la vie privée ». Leur arrestation fait suite à une plainte du PDG du groupe de médias Ennahar, Anis Rahmani, et du wali (préfet) d’Alger, Abdelkader Zoukh. M. Semmar est accusé d’avoir repris des informations publiées par M. Boukhors, écrit Le Monde.

Volonté délibérée d’« humilier » et de faire des « exemples »

Les commentaires des autorités, notamment d’un communiqué de la gendarmerie algérienne, le 25 octobre, faisant état de sept affaires se rapportant à « l’utilisation à des fins criminelles des réseaux sociaux et de l’Internet », laissent penser que le Président algérien cherche à museler la presse en ligne, avec notamment les images des prévenus menottés dans l’enceinte du tribunal, diffusées en boucle, et qui ont choqué juristes et journalistes. Ces derniers n’ont pas manqué de dénoncer une atteinte grave à la présomption d’innocence, doublée d’une volonté délibérée d’« humilier » et de faire des « exemples ». Surtout que ces faits ont lieu à l’approche de la Présidentielle de 2019.

 

 

 

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Je suis passionné de l’actualité autour des pays d’Afrique du Nord ainsi que leurs relations avec des États de l’Union Européenne.
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