Alassane Ouattara de retour en Côte d’Ivoire


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Après trois ans d’exil en France, Alassane Ouattara, le leader du Rassemblement des républicains et farouche opposant au Président Gbagbo, est revenu mercredi en Côte d’Ivoire. Ses objectifs : mobiliser ses troupes et défendre sa candidature à la présidentielle d’octobre 2006.

Après un exil de trois ans en France, Alassane Ouattara est de retour au pays depuis mercredi soir. Un retour que les cadres de son parti, le Rassemblement des républicains (RDR), ont souhaité discret et sous haute surveillance. Dans le salon d’honneur de l’aéroport, l’establishment du RDR et une forte délégation du Rassemblement des Houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP) s’étaient donné rendez-vous alors que les militants de base n’avaient pas été autorisés à entrer dans l’aéroport. Ouattara était entouré d’une garde rapprochée, des éléments du Fanci, et une dizaine de casques bleus sénégalais et togolais ont veillé sur les retrouvailles.

Lors d’une courte allocution, l’ancien Premier ministre (1990-1993) du Président Félix Houphouët-Boigny a lancé un appel « à l’union, un appel à l’apaisement ». « Et je voudrais dire que c’est avec beaucoup d’amour que je reviens sur le sol de mon pays, pour participer au processus politique, pour participer à la réconciliation et pour dire aux uns et aux autres que le plus important doit être la préparation aux élections. Et que bien entendu, ceci passe par la réunification du pays, par le désarmement des forces en présence. (…) Je voudrais dire aux jeunes que le plus difficile est devant nous. Comme la situation économique est difficile, je dirais même catastrophique en tant qu’économiste, je voudrais leur dire que c’est ce chantier qui doit être notre priorité et que la paix nous aidera à nous en sortir rapidement. »

La présidentielle en ligne de mire

Après deux reports, le 15 et le 20 janvier, du fait de la situation dans le pays, le retour d’Alassane Ouattara se fait dans un climat très tendu, après une semaine de troubles dans la partie sud du pays, en particulier Abidjan, paralysée pendant 4 jours par les actions des partisans de Gbagbo, les Patriotes, contre l’Onu. Ouattara, musulman du Nord et farouche opposant au Président Gbagbo, est accusé par le clan présidentiel d’être l’instigateur du coup d’Etat raté de la rébellion des Forces Nouvelles en septembre 2002. C’est pourtant à la suite de ce coup d’Etat manqué qu’il avait fui le pays, sous protection française, après avoir trouvé refuge pendant plus de deux mois à la résidence de l’ambassadeur de France.

A 63 ans, Alassane Ouattara a annoncé, de France, le 14 janvier dernier, sa candidature à l’élection présidentielle ivoirienne qui doit avoir lieu avant le 31 octobre 2006. On rappelle qu’il n’avait pu se présenter à la présidentielle d’octobre 2000 remportée par Laurent Gbagbo pour cause de « nationalité douteuse ». En avril 2005, et à la demande du Président sud-africain Thabo Mbeki, médiateur dans la crise ivoirienne, Laurent Gbagbo avait utilisé les pouvoirs exceptionnels pour lui permettre de se présenter au scrutin présidentiel d’octobre 2005 qui n’a finalement pas pu avoir lieu.

Les répercussions politiques

Alassane Ouattara rentre donc pour défendre sa candidature. Son exil volontaire de trois ans l’ayant éloigné de ses militants, il compte remobiliser les bases du RDR à Abidjan, et un programme de tournée dans la zone gouvernementale et dans la zone des Forces Nouvelles est annoncé pour février, selon le journal Nord-Sud. Une véritable machine de campagne devrait être mise en place, « avec en toile de fond un Congrès, très attendu par les militants ». Pour L’Intelligent d’Abidjan, le retour du « mentor du RDR » ne manquera pas de faire éclater les dissensions qui existent au sein du parti, entre les « purs et durs Ouattara » et « ceux qui estiment qu’il faut préparer la relève au vu des embûches auxquelles le leader est confronté ». Toujours selon l’analyse du même journal, le camp présidentiel « fera tout pour que la sécurité autour du champion des Républicains soit sans faille. Une façon de montrer patte blanche à la communauté internationale. » Le clan Gbagbo pourrait même tirer des bénéfices de ce retour, comme le « réchauffement des relations fortement entamées dans la galaxie patriotique. (…) Avec l’arrivée de l’ennemi naturel, il va falloir resserrer les lignes pour l’ultime combat de 2006 ». « Cependant, il y a un revers de la médaille à ne pas oublier. C’est que pour Gbagbo et ses partisans, la rue sera très âprement disputée car le RDR voudra montrer à son leader que la flamme de la mobilisation a été intacte durant son absence. »

Alassane Ouattara était revenu une première fois à Abidjan en décembre 2005 pour assister aux obsèques de sa mère et avait annoncé son retour « définitif » « pour la mi-janvier », sans plus de précision. Il avait promis de revenir rapidement pour donner à son parti, « dont l’audience grandit de jour en jour, l’impulsion qui lui est nécessaire ». Au cours de son séjour en Côte d’Ivoire, la sépulture de sa mère défunte avait été violée, ce qui avait suscité une vague de condamnation et d’indignation dans le pays. Dans son message de nouvel an à ses militants, il n’avait pas caché son désir de rentrer au pays pour prendre sa part dans la transition. Le leader du RDR résidera dans une maison privée, aux environs de l’hôtel du Golf, à la Riviera, sous la protection d’hommes de l’Onuci (Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire).

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