Afrique du Sud : les fermiers blancs vont voir ailleurs si l’herbe est plus verte


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Agriculture
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Redoutant que la reforme agraire ne restreigne leur expansion, les fermiers blancs Sud-Africains ont entrepris d’acheter des terres exploitables dans douze pays africains. Après avoir critiqué leur démarche, Pretoria a décidé de les accompagner dans leurs négociations avec les gouvernements des pays d’accueils.

Le gouvernement sud-africain souhaite que les noirs, privés d’exploitations agricoles pendant un siècle, renoue avec la propriété terrienne. Une politique qui avance de manière chaotique depuis quinze ans.

C’est un changement d’attitude notable, pour le gouvernement sud-africain : après avoir mal pris le mouvement d’expatriation des fermiers blancs, lesquels ont entrepris de s’installer dans d’autres pays africains, Pretoria a choisi de faciliter leur départ pour l’étranger. Le gouvernement sud-africain a ainsi entamé des démarches avec la République démocratique du Congo (RDC), le Malawi, l’Ouganda et l’Angola. Objectif : régler avec ces Etats les questions relatives au respect du droit de propriété sur les futures terres sur lesquelles s’installeront ses fermiers blancs.

Réforme agraire chaotique

En optant pour cette stratégie, le gouvernement souhaite régler sans trop d’accrocs la politique de redistribution des terres entamée depuis la fin de l’apartheid, mais qui depuis piétine. Lorsque Nelson Mandela, le premier président postapartheid lance la reforme agraire en 1994, il s’agit pour lui de rendre justice aux noirs. Bien que majoritaires dans la population sud-africaine, ils ont été privés de la propriété terrienne, pendant un siècle. Une loi de 1913 baptisée « Native land act » leur interdit de posséder la terre en nom propre. Appliquant cette loi, le gouvernement raciste de l’époque les avait expulsés vers les mines ou les réserves, où ils constituaient une main-d’œuvre bon marché. Les terres avaient ensuite été revendues aux seuls blancs.

Initiateur de la réforme, le gouvernement Mandela se fixe un objectif : redistribuer 30% des terres, à l’horizon 2014. Pour ce faire, il met en place la « Land Bank », un banque publique chargée des opérations financières. Mais le système se grippe rapidement. Plusieurs milliers de demandes d’accession à la propriété sont enregistrées, mais la bureaucratie traîne. De nombreux scandales vont aussi émailler l’action des responsables de la « Land Bank », accusés de détournement de fonds. Par ailleurs, peu habitués à gérer les plantations industrielles, les récipiendaires noirs ne sont pas prêts à prendre en main les exploitations agricoles. Toutes choses qui retardent la redistribution des terres acquises par l’Etat, qui se retrouvent pour la plupart à l’abandon.

Fermiers blancs persécutés

Pendant ce temps, une vague de persécutions s’abat sur les fermiers blancs. Plus d’un millier d’entre eux aurait ainsi été tué, depuis 1994. Les survivants doivent assurer eux-mêmes leur protection, en organisant des rondes autour de leurs domaines. L’arrivée au pouvoir en mai dernier du populiste Jacob Zuma ne les rassure pas : celui-ci a inscrit la réforme agraire en tête de son agenda.

Autant de raisons qui les poussent à envisager l’expatriation. Ils commencent à réduire leurs investissements en Afrique du Sud, et entament des démarches d’acquisition de terres dans douze pays africains. En choisissant de soutenir leur démarche, le gouvernement Zuma souhaite mener en douce une réforme qui ne lèse personne, mais aussi éviter le contre-exemple zimbabwéen. En expropriant par la force les fermiers blancs, le président Mugabe a plongé son pays, dont l’économie est essentiellement agricole, dans une crise sans précédant.

Les fermiers sud-africains ne sont pas les seuls à vouloir acheter des terres à l’étranger. Ils marchent sur un chemin déjà pris par des Etats comme la Chine, l’Inde et le Brésil qui comptent désormais sur l’achat des terres cultivables dans d’autres pays pour nourrir leur populations. Les pays d’accueil espèrent de leur côté bénéficier de la création des emplois, du transfert des technologies et de l’expérience.

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