Afrikamera : le miroir du cinéma africain


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Les festivals de cinéma africain se multiplient sur le continent. Le Fespaco à Ouaga, le festival de Carthage ou de Marrakech en Afrique du nord, Dockanema au Mozambique et Durban… Mais qu’elles visibilités ont ces manifestations hors du continent ? C’est toute l’idée d’Afrikamera : offrir à ces festivals, au cinéma africain dans son ensemble, un espace de rencontre et d’échange avec le public européen. C’est ainsi qu’Afrikamera est né en 2007 à Berlin. Une initiative de l’association Toucouleur qui réuni un groupe d´acteurs culturels professionnels africains et allemands, passionnés de cinémas avant tout. Forts de leurs premiers succès, ils lancent la 4e édition du 16 au 20 novembre au cinéna Arsenal à Potsdamer Platz qui se veut être un clin d’œil aux festivals de cinéma africain. Entretien avec Alex Moussa Sawadogo, directeur du festival.

Afrik.com : Comment est né le festival Afrikamera ?

Alex Moussa Sawadogo : Dans presque toutes les grandes villes occidentales, Londres, New York, Amsterdam, des manifestations ont été initiés pour la promotion du cinéma africain. Berlin, capitale de l´Allemagne, ville foisonnante de la nouvelle Europe ne disposait, avant Afrikamera, d’aucune manifestation constante autour des cultures africaines et plus précisément des cinémas d´Afrique. Si la Berlinale, l´un des plus grands festivals du monde présentait des films du monde entier, il était très fréquent que le cinéma africain reste absent des écrans de ce festival. Le public berlinois était donc mal informé sur l´évolution du cinéma africain. Ainsi est né Afrikamera, le festival des films contemporains d´Afrique afin de permettre au public berlinois et des villes avoisinantes d´êtres au même titre d´informations que les habitants des autres villes européennes. Il est aussi l´unique plate-forme où réalisateurs, producteurs et diffuseurs se rencontrent pour discuter des cinémas d’Afrique.

Afrik.com : Quel lien entretenez-vous avec le Festival Panafricain du Cinéma de Ouagadougou (Fespaco) ou encore le festival de Durban, Carthage, Dockanema etc. ?

Alex Moussa Sawadogo : Afrikamera dès sa création se donnait pour ambition d´être la plate-forme des grandes manifestations cinématographiques qui se déroulent sur le continent africain. Ces festivals qui font la fierté du continent africain se font le baromètre des nouvelles productions cinématographiques africaines. Ces festivals, l´une des belles créativités du continent, doivent bénéficier aussi bien de soutiens locaux mais également de sa diaspora sur le plan relationnel et organisationnel. L´un des malheurs du continent africain est, pour moi, sa difficulté à impliquer sa diaspora dans le processus de son développement politique, économique et culturel. Afrikamera veut sortir des sentiers battus et apporter sa contribution á l´épanouissement de ces évènements. C´est ainsi qu´il se veut donc le miroir de ces festivals sur le continent européen et plus précisément en Allemagne vue le succès qu´ils drainent constamment.

Afrik.com : Pour l’édition 2011, le programme tourne autour de quelle thématique ? Qui sont les invités vedettes ? Les films attendus ?

Alex Moussa Sawadogo: « African Film festivals beyond the present and future » tel est le thème d’Afrikamera 2011. Cette année nous avons décidé de donner carte blanche aux directeurs artistiques des festivals déjà connus comme le Fespaco, JCC, festival de film de Durban, Dockanema (Mozambique) et aux jeunes festivals comme celui du Kenya, du Rwanda et de Madagascar, afin de présenter à Afrikamera des films qui ont marqué leur festival respectif. Ces directeurs auront l´occasion de présenter aussi leur festival à chaque projection et autour de tables rondes. L’idée est de permettre à ces festivals de glaner quelques nouveaux partenaires pour renforcer le dynamisme de leur festival. Le film « Pegase » production 100% marocaine fera l´ouverture en présence de Soma Ardiouma du Fespaco. Pedro Pimenta, directeur de Dockanema, présentera entre autre Espelho Meu de Isabel Noronha Vivian. Dora Bouchacha représentée par Annie Djamal donnera l´occasion au public berlinois de voir le superbe film Les secrets de Raja Amari. Le Festival de Durban nous fait cadeau de la dernière production d’Oliver Hermanus, Skoonheid Beauty. Charles Asiba, directeur du Kenya Film festival, nous offre la première allemande du meilleur documentaire du Fespaco 2011 The unbroken spirit. Enfin, c´est au Rwanda et à Madagascar que revient la tâche de présenter des films courts en animations, fictions et documentaires en présence des deux directeurs de leur festival respectif.

Nous avons un public très constant et très critique. Des universitaires, des diplomates, ou de simples « amoureux » du cinéma africain.

Afrik.com : Cette année, c’est la 4e édition. Comment se sont passées les précédentes éditions ? Quel public touchez-vous?

Alex Moussa Sawadogo : L´organisation d´un jeune festival comme Afrikamera nécessite une certaine ingéniosité, une bonne dose de patience. Nous ne disposons pas de budgets constants qui nous assurent l´organisation de l´édition suivante. Nous sommes amenés chaque année à courir derrière les partenaires solliciter leurs aides pour l’organisation d’Afrikamera. Pourtant les salles de projections, depuis sa création, sont quasi pleines et la plupart du temps, on est contraint de refuser du monde. Nombre de nos projections sont à guichets fermés malgré nos maigres moyens sur le plan communicationnel. En particulier le festival des films courts qui se déroulent en marge d’Afrikamera. Nous avons un public très constant et très critique qui vient de milieux divers. Ils sont soient universitaires, diplomates, ou de simples « amoureux » du cinéma africain.

Afrik.com : Quelles sont les clés du succès d’Afrikamera ?

Alex Moussa Sawadogo : L´organisation d´un festival ou tout événement culturel est un métier proprement dit. Afrikamera est une initiative de personnes sorties d´une grande école de management culturel et de médias en Allemagne. Ces personnes, en plus de leur fonction pour Afrikamera, travaillent pour de grands évènements culturels internationaux et dans de grandes institutions culturelles. Cette équipe dispose donc d´une bonne connaissance en recherche de financements, de Networking, de connaissance artistique, de production et de communication et marketing. La collaboration étroite et franche avec les institutions allemandes, de nos partenaires et avec les associations communautaires renforce notre visibilité á l´intérieur du pays. C´est ainsi qu´avec un budget limité, Afrikamera en moins de 5 ans, est arrivé à s´imposer comme le seul événement africain constant dans la capitale allemande. Ce qui n´était pas gagné d´avance vue la place qu´occupe l´Afrique en Allemagne et surtout de nombreux festivals qui se déroulent à Berlin.

Afrik.com : En dehors de ce festival, Afrikamera, y a t-il d’autres manifestations organisées au cours de l’année ?

Alex Moussa Sawadogo : Vu le succès que draine Afrikamera à travers les nouvelles productions cinématographiques africaines, l´équipe du festival a décidé de créer á partir du mois de février 2012 un ciné Club Afrique. La programmation artistique tournera autour des anciens films africains en allant de « l´Afrique sur Seine » de Paulin Soumanou Vieyra à Buud Yam de Gaston Kaboré.

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