Accord d’association Algérie-UE


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L’accord d’association entre l’Algérie et l’Union européenne est entré en vigueur le 1er septembre dernier. Une semaine après cette première étape, qui doit amener à l’établissement d’une zone de libre échange à l’horizon 2007, les producteurs algériens affichent leurs craintes.

Comme dirait Fellag, du chocolat européen pour tout le monde, le « chicoula » à la poubelle. Sucre, blé, huiles, orge, levures, laits en poudre, soja, margarine ou encore fromages, tous ces biens de consommation font partie de la première liste de produits exemptés de droits de douane ou soumis à des droits réduits, à leur entrée en Algérie, depuis le 1er septembre dernier. C’est à cette date bénie des importateurs et honnie des producteurs locaux qu’est entrée en vigueur l’accord d’association entre Alger et l’Union européenne. A terme, ce processus progressif de démantèlement des barrières douanières devrait aboutir à la mise en place d’une zone de libre échange, en 2017.

L’Algérie fait ainsi un pas de plus vers l’Organisation mondiale du commerce (OMC), avec laquelle elle négocie son adhésion. Les partisans de l’accord notent que les entreprises algériennes auront un meilleur accès au marché européen, qu’elles pourront importer des produits industriels en franchise totale, acheter des intrants et des équipements à des prix moindres. Un meilleur accès au marché européen, mais pour exporter quoi ? dans un pays où les sociétés d’« Import-Export » sont sarcastiquement appelées « Import-Import ».

Les entreprises algériennes ne sont pas prêtes

La date d’entrée en vigueur de l’accord est connue depuis plus de deux ans, mais le Programme d’aide à mise à niveau des entreprises, mis en place en 2002, n’a pas porté ses fruits. Ce qui fait dire à Réda Hamiani, vice-président du Forum des chefs d’entreprise, cité par le quotidien Liberté, que « 90% des entreprises algériennes fabriquent des produits qui ne répondent pas aux normes internationales ». Et qu’elles ne sont pas prêtes pour cette ouverture. De même que les syndicats et opérateurs économiques, qui jugent que l’accord va fragiliser l’outil de production.

L’UGTA (Union générale des travailleurs algériens, ex syndicat unique), principal syndicat algérien, avertit que l’entreprise publique Enasucre est menacée de disparition par le contingent d’exportation de 150 000 tonnes de sucre – en un an et exonéré de droits de douane – obtenu par l’UE. C’est surtout la méthode du « premier arrivé, premier servi » (FITO, First in, First out) qui inquiète la Fédération nationale des travailleurs de l’industrie agro-alimentaire (FNTIAA). Celle-ci a demandé des mesures « palliatives urgentes » au gouvernement. Selon l’analyse du bureau d’étude Sema-Schlumberger, effectuée pour les autorités algériennes, « une application immédiate du démantèlement tarifaire aurait un effet dépressif certain sur la production sectorielle et sur l’emploi ».

« La lame de fonds des cinq/sept ans »

Pourtant, le pire serait à venir. L’Algérie (signature en 2002) est le dernier pays du (petit) Maghreb, après la Tunisie (signature en juillet 1995) et le Maroc (signature en février 1996), à réaliser un accord d’association avec l’UE. Interrogé par le quotidien El Watan, Mouloud Hédir, expert en commerce international et auteur d’un ouvrage sur l’accession de l’Algérie à l’OMC, explique que « l’architecture de l’accord d’association est faite de façon à ce que le début soit agréable pour les pays du Sud qui opèrent un démantèlement de leurs barrières tarifaires. C’est un peu comme le morceau de sucre que l’on donne au début ».

En s’appuyant sur l’expérience tunisienne, l’ancien directeur de l’Observatoire du commerce extérieur indique que c’est lorsque les barrières tarifaires atteignent les produits industriels que les effets se font le plus sentir sur les PME. Il appelle cela la « lame de fond des cinq/sept ans ». Autour de 2010-2012 en Algérie. En cas de « difficultés graves », l’accord permet que le calendrier soit révisé, d’un commun accord, pour un produit donné. Des mesures exceptionnelles peuvent même être appliquées par l’Algérie. En attendant d’en arriver là, les amateurs de houblon peuvent noyer leur chagrin dans l’alcool : selon El Watan, le contingent de bière à l’exportation a déjà été épuisé.

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