Mali : « On a sous-estimé la capacité de riposte des islamistes »


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Les affrontements entre la coalition et les islamistes ont fait rage pendant tout le week-end. Dans la nuit de dimanche à lundi, l’armée française a bombardé les camps du Mouvement arabe de l’Azawad (MAA) à In-Khalil et In-Farah. Alors que le bilan des combats de vendredi à Gao s’élève désormais à 90 islamistes tués et 23 morts tchadiens. Michel Galy, politologue et sociologue, nous explique les raisons de cette recrudescence de la violence. Interview.

Afrik.com : Comment expliquez-vous cette recrudescence de la violence au Mali ?

Michel Galy :
C’était prévu. Les militaires le savaient, même si les politiques ne le présentaient pas comme cela. La guerre au Mali devait se décomposer en trois phases : l’armée française a commencé à bloquer la descente des islamistes vers Mopti et Bamako. Puis, elle reconquis les trois villes principales -Gao, Tombouctou et Kidal- du Nord-Mali. Maintenant, c’est la traque des islamistes retranchés dans le massif d’Adrar des Ifoghas. La recrudescence de la violence s’explique par le fait qu’on a sous-estimé la capacité de riposte des islamistes, notamment à Gao. D’où le nombre de morts, surtout des Tchadiens pour le moment.

Afrik.com : Pourquoi le MNLA est visé ?

Michel Galy :
En dehors des jihadistes, c’est le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) qui est détesté par la population de Bamako. Quand le MNLA a pris le contrôle de l’Azawad, ils ont été violents avec le massacre des civils et des militaires maliens : à Agueloc, une centaine de soldats maliens on été égorgés par les Touaregs.
Si le MNLA est pris pour cible par les islamistes, c’est parce qu’il a changé ses alliances. Ce qui arrive souvent dans ce mouvement qui a, par exemple, un colonel pro-gouvernement de Bamako. Les Touaregs ont toujours été divisés. Avant l’intervention militaire de la France, ils étaient alliés aux islamistes. Ils se présentent maintenant comme supplétifs de l’armée française qui leur a laissé Kidal. Ce que conteste le gouvernement de Bamako et sa population.

Afrik.com : On assiste à une guérilla très violente. A quoi doit-on s’attendre ?

Michel Galy :
Il y a plusieurs hypothèses. En cas de poursuite des incursions autour de Gao, la violence n’est pas prête de s’arrêter. Puisqu’une partie de la population est islamisée. On peut aussi assister à l’extension de la guerre dans les pays voisins du Mali, comme l’Algérie, le Niger, la Mauritanie ou le Burkina Faso.
L’intérêt de la France serait de se retirer, en tenant cependant une ligne sur Mopti pour que les islamistes ne redescendent pas vers Bamako.

Afrik.com : Pourquoi la France peine tant à sécuriser les villes reconquises du Nord-Mali ?

Michel Galy :
A cause d’une erreur d’analyse. On criminalise les groupes islamistes . Or tout en organisant les trafics, comme celui de la drogue, ils sont plus que des groupes criminels, ils ont en outre des bases sociales et religieuses même à Bamako.

Afrik.com : Quelle est alors la solution pour sortir de ces scènes de guerre urbaine ?

Michel Galy :
Le cantonnement. L’armée française devrait tracer une ligne entre le Nord et le Sud qui permettra de sécuriser le Mali et sa capitale. D’autre part, les troupes françaises doivent laisser les Maliens et Africains s’occuper de Gao, Tombouctou et Kidal.

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