Egypte : ce que dit la nouvelle loi antiterroriste


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L’Egypte veut promulguer, dans les prochains jours, une nouvelle loi antiterroriste dans ce pays confronté à la multiplication des attentats.

Au lendemain de l’assassinat du procureur général d’Egypte, Hicahm Barakat, le 29 juin au Caire, le Président égyptien Abdel Fatah al-Sissi avait promis une législation plus sévère. Il pourrait promulguer, dans les prochains jours, une nouvelle loi antiterroriste.

Cette nouvelle loi antiterroriste, adoptée par le gouvernement au moment où des attaques terroristes ont été menées, mercredi, dans le Sinaï faisant une dizaine de morts, sera soumise à l’examen du chef de l’Etat égyptien, après que la Cour suprême du pays l’ait examinée. Mais d’ores et déjà, des voix s’élèvent contre cette législation qui étoufferait les libertés notamment celle de la presse. Les experts et défenseurs des droits de l’Homme dénoncent un texte répressif.

La couverture journalistique des attentats terroristes sera désormais encadrée par cette nouvelle loi. Selon l’article 33, un journaliste qui publie volontairement un « faux » bilan concernant une attaque terroriste, en contradiction avec les « communiqués officiels », risque deux ans de prison, au moins. En cas d’entrave à cette loi, la justice égyptienne pourra également expulser un journaliste, s’il s’agit d’un étranger. Ce délit peut être puni d’une assignation à résidence également. Selon le ministre égyptien de la Justice, Ahmed Al-Zind, la loi est en partie née de la couverture médiatique des attentats du Sinaï où plusieurs bilans différents ont été annoncés.

Le syndicat des journalistes considère ce projet de loi comme « de nouvelles restrictions à la liberté de la presse ». En effet, selon le Comité pour la Protection des Journalistes (CPJ), au moins 18 journalistes, essentiellement accusés d’appartenir aux Frères musulmans dont est issu l’ex-Président Mohamed Morsi, étaient emprisonnés, au 1er juin, en Égypte. Un record depuis 1990, selon le CPJ.

Plus de liberté pour la police et la justice

L’Egypte est confrontée a une vague d’attentats terroristes notamment dans la péninsule du Sinaï où est implanté le groupe terroriste Beit Al-Maqdes rebaptisé «Province du Sinaï» suite à son allégeance à l’organisation Etat islamique (EI). L’armée égyptienne mène une guerre sans merci contre les terroristes qui ciblent régulièrement les forces de l’ordre.

La loi supprime, pour les procès de « terrorisme », la procédure d’appel devant la Cour de cassation prévue dans le droit égyptien. « Nous n’allons pas attendre 5 ou 10 ans pour juger les gens qui nous tuent », a déclaré Al-Sissi lors des funérailles du procureur général. Même le Conseil suprême de la magistrature a exprimé ses réserves notamment en ce qui concerne les possibilités d’appel.

Cette nouvelle loi préconise aussi la peine de mort pour les personnes coupables d’avoir créé, dirigé ou financé une organisation « terroriste ». Une peine de cinq ans de prison est prévue pour quiconque utilise les réseaux sociaux ou internet pour promouvoir le « terrorisme ».

Les opposants à cette nouvelle loi redoutent que celle-ci favorise l’impunité de la police. En effet, les policiers qui « auront recours à la force » lors des opérations « antiterroristes », tant que ce recours est « nécessaire », seront exonérés des poursuites judiciaires. Une disposition qui existe déjà dans le code pénal, mais qui en revanche encouragerait les policiers à utiliser excessivement la force.

Des responsables et des médias ont indiqué qu’en réaction à ce projet de loi, une institution judiciaire égyptienne a demandé la modification de certaines dispositions du projet de loi antiterroriste préparé par le gouvernement, mais pas celle enfreignant la liberté de la presse, qui constitue pourtant l’un des points les plus controversés de ce texte.

Depuis la destitution en 2013 de Mohamed Morsi, par l’actuel président, alors chef de l’armée, le gouvernement est accusé de mener une répression sanglante contre toute voix critique et opposante. Selon Human Rights Watch (HRW), policiers et soldats ont tué plus de 1 400 personnes, en majorité des manifestants islamistes et pro-Morsi. Plus de 40 000 autres personnes ont été arrêtées ou poursuivies en justice. Des centaines d’autres ont été condamnées à mort dans des procès de masse expéditifs, qualifiés par l’ONU de « sans précédent dans l’histoire récente », du monde. Mohamed Morsi a également été condamné à la peine de mort.

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