Les mutilations génitales existent aussi au Cameroun


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Les mutilations génitales, souvent identifiées aux pays de l’Afrique de l’Ouest et de l’Est, sont effectivement pratiquées au Cameroun sous diverses formes, a révélé une enquête de la PANA.

Par Panapress

Longtemps pratiquées dans le secret de la tradition, les mutilations génitales vont sortir de l’ombre en 1987 avec le concours du Comté interafricain de lutte contre les pratiques traditionnelles affectant la santé de la femme et des enfants (CI-AF).

Selon la présidente de CI-AF-Cameroun, Comfort Effiom, c’est de retour d’un séminaire international que lui est venue l’idée de vérifier si la pratique existait au Cameroun. Les recherches ont confirmé l’existence sous plusieurs formes des mutilations sexuelles dans ce pays.

Excision

Outre l’excision, qui se pratique par l’utilisation d’outils tranchants pour couper ou diminuer les parties génitales de l’enfant ou de la jeune fille, il y a l’introduction des certaines herbes dans les parties intimes de la fille.

Selon l’enquête menée par la PANA, il est difficile de circonscrire avec précision les localités concernées par cette pratique, mais selon Mme Effiom, l’excision se pratique à 100% dans le Logone et Chari, dans la province de l’Extrême-Nord, chez les Arabes chouaves, dans le Manyu (sud-ouest), chez les Ejagam et les Eboki et à la Briqueterie, un quartier de Yaoundé peuplé majoritairement de ressortissants du Grand-Nord, du Tchad et de pays de l’Afrique de l’Ouest (…)

Les spécialistes de la santé sont unanimes: les mutilations génitales freinent l’épanouissement de la femme sur tous les plans. Pour le Dr André M., gynécologue, cette pratique n’a rien à voir avec la fécondité et l’embellissement de l’organe de la femme, comme le laissent souvent croire ceux qui l’encouragent. Au contraire, explique-t-il, elle expose les victimes aux infections et irritations qui peuvent conduire à la mort.

« Eliminer les envies libidinales de son épouse »

Pour le Dr Jean-Marie O., anthropologiste, les raisons de l’excision seraient liées plutôt à la culture guerrière de ces peuples. Le mari, appelé à se déplacer constamment, prenait les dispositions pour éliminer les envies libidinales de son épouse. Ainsi, selon lui, serait née une tradition dans beaucoup de villages.

Cette tradition a créé des emplois dans ces sociétés avec une classe d’exciseuses qui gagnent leur vie en s’adonnant à la pratique. Hawa Fadimatou, environ 60 ans, exciseuse au quartier Briqueterie, explique qu’elle pratique l’excision pour perpétuer une tradition familiale et pour gagner son pain. Elle déclare gagner 5.000 à 20.000 FCFA (7,5 à 30 euros) par excision plus les dons en nature (savon, huile, pagnes, etc.)

La dénonciation des mutilations sexuelles et les mutations de ces sociétés à travers l’instruction des jeunes filles font reculer le phénomène au Cameroun, surtout pour ce qui est de l’excision. L’utilisation des herbes a encore de la peine à diminuer puisque les filles la pratiquent sans contrainte extérieure, selon Mme Effiom.

« La répression n’est pas la solution »

Les autorités chargées des questions des femmes ont soumis un avant-projet de loi sur les violences faites aux femmes à l’appréciation du Premier ministre avec un chapitre sur les mutilations génitales.

Cependant, pour Mme Flora Tchatchoua, juriste inspectrice des affaires sociales, même si en l’état actuel des choses le code pénal peut être utilisé pour sanctionner ceux qui pratiquent les mutilations génitales, parce que constituant des violences physiques, la répression ne saurait résoudre le problème.

Selon elle, il faut continuer à sensibiliser sur les méfaits des mutilations génitales sur la société, la loi venant en appoint lorsque les populations seront suffisamment informées et éduquées.

Tel est également l’avis du CI-AF qui affirme avoir déjà réussi à convaincre un groupe de femmes exciseuses dans la Manyu, en leur offrant un moulin à écraser pour leur permettre d’avoir une activité génératrice de revenus.

Selon le CI-AF, la sensibilisation porte déjà des fruits, mais elle est limitée par l’enclavement de ces localités qu’on ne peut atteindre qu’en parcourant des dizaines, voire plusieurs centaines de kilomètres à pied.

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