L’Algérie célèbre le poète oranais Jean Sénac


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Brutalement, le poète oranais Jean Sénac semble d’une brûlante actualité : comme si le soleil de sa poésie revenait briller sur l’Algérie. Un film, « Le Soleil assassiné », un volume d’hommages croisés «Pour Jean Sénac», et toute une série d’événements à Oran et à Alger, en marge du Salon du Livre…

Par Khaled Elraz

Yahia El Ouahrani, c’était son surnom, Jean l’Oranais, Jean Sénac. Compagnon d’armes de la première heure du Front de libération national (FLN), engagé dès la première minute aux côtés de la révolution algérienne, par un appel puissant, intelligent, généreux, à la fraternité des hommes par delà les frontières des races.

Jean l’Oranais, c’était avant tout le poète : celui que Malek Alloula évoque dans le livre d’hommage Pour Jean Sénac avec des mots trépidants : « jaillissement ininterrompu de paroles, sauts du coq à l’âne, véhémences emportées, digressions erratiques, insinuations mystérieuses, rires intempestifs, inattendus et contagieux, énergique fièvre jaculatoire, passion de convaincre », évoquant un « spectacle total ». Cette faconde intelligente et émouvante à la fois, c’est la force d’une parole en liberté. La parole de la liberté et la liberté de la parole. Le refus du mensonge et l’acceptation de la surprise causée par la vérité, quand elle est justement proférée.

Un homme de convictions

Jean l’Oranais, c’était cet homme météore sorti de nulle part, et qui ne se reconnaissait d’identité que cette terre d’Algérie qu’il s’était battu pour libérer, pour lui donner son plein statut. « Il avait choisi la justice et sa mère d’adoption », écrit si nettement Habib Ayyoub. A ceci près que sa mère ne le reconnaissait pas pleinement, lui faisait des difficultés pour l’admettre parmi ses enfants, lui refusait le passeport que plus que beaucoup d’autres il méritait, lui refusait la tolérance que plus que tous il incarnait…

Ce poète était homme de foi : « Jeunes gens, vous serez des hommes libres. / Vous construirez l’autogestion, vous construirez une culture sans races. Vous comprendrez pourquoi ma mort est optimiste… » Optimiste, il l’était, et il lui fut tragiquement épargné de voir vers quelles aubes de sang l’Algérie nouvelle allait se lever. Comment Jean Sénac aurait-il supporté la montée des meurtres intégristes, la marée sanglante de l’Islamisme, de la bêtise aux yeux de bœuf, de l’aveuglement à autrui ?

Un homme libre

Cette liberté pour laquelle il s’était battue, qu’il avait cru léguer entière et vive à l’Algérie, il en fut l’une des premières victimes, expiatoire, le 29 août 1973… Mais le poète n’a pas une seule vie, et il se relève, l’Oranais, pour redire avec des mots simples sa leçon d’azur et de soleil ! Quarante ans sont passés, et la leçon sonne toujours limpide et juste : « Refus, notre jeunesse ! Prairie, notre illusion ! / Nous sommes riches à déchiqueter la foudre, victorieux bien au-delà de nous-mêmes. » La victoire, il nous appelle à la construire, contre tous les obscurantismes et tous les mensonges, au soleil de la vérité.

Pour connaître tous les événements organisés à Alger et à Oran autour de Jean Sénac, on peut contacter le Centre culturel français d’Alger ou se rendre au Salon international du Livre d’Alger et obtenir toutes les infos sur le volume d’hommage au poète.

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