Les femmes Lambas gagnent la bataille de l’eau à Makwacha en République démocratique du Congo


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Alors que la communauté internationale prend note des progrès effectués dans l’amélioration de l’approvisionnement en eau potable au niveau mondial, les disparités en termes d’accès entre les villes et les zones rurales d’Afrique sub-saharienne s’accroissent. Face à cette situation, les femmes Lambas de la communauté rurale de Makwacha en République démocratique du Congo se sont mobilisées pour l’accès à l’eau potable de leur village. Trois nouveaux puits, réalisés dans le cadre du projet « Women for Water » couronnent leurs efforts et changent le quotidien du village. Ces trois puits, financés par le fonds de dotation français African Artists For Development, ont été remis à l’ « Association des Femmes de Makwacha », dorénavant responsable de leur gestion et de leur maintenance.

Si la cible des Objectifs du Millénaire pour le Développement des Nations-Unies, qui consistait à réduire de moitié le pourcentage de la population n’ayant pas accès à l’eau potable, devrait être atteinte avant 2015, l’accès à une eau salubre demeure pour beaucoup de zones rurales en Afrique telles que Makwacha un enjeu primordial. Comme l’indique en effet le rapport 2011 sur l’avancement des Objectifs du Millénaire, « en Afrique sub-saharienne, un citadin a 1,8 fois plus de chances d’utiliser une source améliorée d’eau potable que quelqu’un qui vit en zone rurale ».

Traditionnellement en charge de la collecte de l’eau, les femmes de Makwacha devaient jusqu’en 2011 parcourir plusieurs kilomètres pour s’approvisionner à un marigot insalubre. African Artists for Development s’est engagé auprès de ces femmes dans le cadre du projet « Women for Water » pour répondre à cette préoccupation majeure de leur communauté. Mobilisant l’expertise d’Aquassistance (l’association humanitaire des personnels de Suez-Environnement), AAD a financé la réalisation de trois forages d’une profondeur de 80 mètres; le premier en janvier 2011 et les deux derniers en mars 2012.

Ces forages garantissent aux habitants du village de Makwacha, pour la première fois dans leur histoire, l’accès à une eau potable même en saison sèche. Environ 40 litres par foyer en sont extraits chaque jour, afin de couvrir l’ensemble de leurs tâches ménagères. Ces puits permettront ainsi d’éviter la propagation de maladies dûes à l’insalubrité de l’eau (dysenterie, choléra, typhoide) ou la déshydratation, tout en augmentant la production agricole, et par conséquent l’autonomie du village sur le plan alimentaire.

Le 8 mars 2012, à l’occasion de la journée de la Femme, AAD remettait la propriété des puits à « l’Association des Femmes de Makwacha », créée spécialement à cet effet. Alors que les femmes Lambas sont systématiquement exclues de toutes les instances politiques locales, cette association constitue en soi, en République démocratique du Congo, un premier moyen d’affirmation du rôle des femmes congolaises dans le développement et la vie des villages. Au delà de cette nouvelle responsabilité, elles s’efforcent de sensibiliser les membres de leur communauté, sur l’importance de l’hygiène et les vertus d’une eau saine.

« Maintenant que nous avons l’eau, rappelle Fernande, Présidente de l’association, nous allons apprendre à faire du savon; nous voulons également permettre à tous d’accéder à des soins de qualité ». Ces vœux, communs aux membres de l’association, montrent la détermination des femmes Lambas à bâtir un avenir meilleur pour les générations à venir.

Elles pourront désormais consacrer plus de temps à leur pratique artistique hors du commun, qui est à l’origine de cette belle aventure. Les femmes Lambas de Makwacha sont en effet connues pour une tradition artistique ancestrale qui leur est propre : chaque année au début de la saison sèche, elles réalisent des peintures éphémères représentant les évènements marquants de l’année écoulée sur les murs de leur case à l’aide de pigments naturels. Au cours de ce projet, elles ont réalisé huit toiles monumentales qui seront exposées à partir de la fin de l’année 2012 à Paris, Londres et New-York.

LES FEMMES LAMBAS DE MAKWACHA:

Le village de Makwacha se situe à 50 km au sud de Lubumbashi, capitale de la Province du Katanga, à l’extrémité Sud de la République démocratique du Congo.

Les femmes Lambas sont soucieuses de garder leur village accueillant et propre ; à chaque début de la saison sèche, elles recouvrent leurs cases de nouvelles fresques, perpétuant ainsi une pratique culturelle ancestrale. Celles-ci, mêlant événements quotidiens et motifs traditionnels, racontent l’histoire de l’année passée.

Pour pouvoir peindre, les femmes déposent d?abord sur les murs un enduit naturel blanc. Il leur faut ensuite collecter de la terre et des cailloux aux alentours du village et les malaxer jusqu?à obtenir une poudre qu?elles mélangent à de l?eau. Les femmes appliquent cette pâte sur le revêtement des cases. Se servant de leurs doigts comme pinceaux, les femmes Lambas apposent alors les peintures, qu?elles constituent elles-mêmes à partir de pigments naturels issus de plantes locales.

Jean-Michel Champault, Délégué Général d?AAD, a souligné les efforts des femmes Lambas à la suite de sa visite au village de Makwacha en mars 2012: « J’ai été frappé, dit-il, par la modestie et la détermination des femmes Lambas de Makwacha. Elles ont su donner l’eau potable, source de mieux être, à l’ensemble des membres de leur communauté, et cela en peignant sur les murs de leur case l’histoire de leur quotidien. La consommation d’eau impropre à la consommation, ou encore l’absence d’eau en saison sèche, ont provoqué des drames qui ont touché chaque famille du village. On ne peut que les accompagner dans cette lutte qu’elles mènent pour apporter une vie meilleure à leurs enfants. »

AFRICAN ARTISTS FOR DEVELOPMENT :

Créé en 2009, le fonds de dotation African Artists for Development (AAD) initie, développe et soutient l’action d’artistes africains s’engageant dans des micro projets de développement ancrés dans leur communauté.
Démarche à la fois artistique et sociétale, African Artists for Development lie intrinsèquement art contemporain et initiative de développement local, en ne promouvant pas l’un et l’autre mais l’un dans l’autre.

Les projets d?AAD ont pour objectif de générer du développement économique et sociétal durable, du mieux être, du mieux vivre et des changements de mentalité en jouant plus sur les effets de leviers que sur le volume des budgets engagés.

AAD donne l?impulsion nécessaire et apporte le financement pour la maturation et la consolidation des projets de développement et des initiatives artistiques qui leur sont liées, mais refuse toujours toute démarche se limitant à du simple assistanat. Les projets AAD s’inscrivent dans le court/moyen terme; il s?agit de catalyser des actions, pas de les opérer en tant que telle.

Ce fonds de dotation est une initiative privée qui relève d’un mécénat humainement engagé mais indépendant de toute impulsion politique, diplomatique ou religieuse.

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