La malédiction des jumeaux de Mananjary


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Dans la ville de Mananjary, à Madagascar, les jumeaux sont, à leur naissance, abandonnés au nom d’une tradition ancestrale. Ils sont considérés comme des êtres maléfiques et sources de malheur.

Gare aux jumeaux de Mananjary ! Les parents de cette ville malgache, à 600 km de la capitale, suivent une pratique ancestrale bien étrange. A leur naissance, les jumeaux, considérés comme des êtres maléfiques, sont abandonnés. Ces familles pensent qu’elles mourront si elles décident de les garder. Rares sont les familles qui osent braver cette coutume ancestrale. La destination finale de ces enfants, pour les plus chanceux, est au Centre d’Accueil et de Transit des Jumeaux Abandonnés (CATJA). Crée en 1987 par un évangéliste, qui a été lui-même orphelin, le CATJA accueille depuis 24 ans ces enfants frappés par la malédiction.

Aujourd’hui, ils sont près d’une centaine à y vivre. Pour certains, le transit peut durer toute une vie, comme c’est le cas notamment pour les enfants handicapés – le centre accueille également des orphelins ou des enfants atteints d’un handicap majeur. Pour d’autres, la chance peut être au rendez-vous, surtout pour les enfants de moins de deux ans qui trouvent refuge dans des familles d’adoption. Les associations ne sont pas nombreuses à aller sur le terrain pour lutter contre cette malédiction. Souvent, ce sont les membres de l’église qui agissent. Les chiffres officiels sont sans appel. Selon France 24, chez les Antambahoakas, une ethnie du sud de Madagascar, on dénombre deux fois moins de jumeaux que dans le reste du pays. Le sujet est tellement « fady » (tabou), que certains parents préfèrent abandonner leurs enfants le long du canal des Pangalanes, le long des routes ou au pied d’un arbre, sans même se donner la peine de se rendre jusqu’au CATJA. Puis il y a ceux qui utilisent le prétexte de la pauvreté pour justifier ces abandons.

La légende des Antambahoakas

Au XVIIe siècle, l’intégration d’immigrés orientaux, moyen orientaux et africains donne naissance à différentes ethnies dont celle des Antambahoakas. Ils occupent alors un territoire au sud-est de la Grande île, près de Mananjary. Mais l’ennemi n’est jamais très loin. Lors d’une invasion étrangère, les Antambahoakas ont dû quitter précipitamment leur village. Dans sa fuite, le chef de la tribu aurait oublié l’un de ses jumeaux. Il décida alors de retourner sur place afin de sauver son fils des griffes de l’ennemi. Instruit du courage de cet homme et de l’amour qu’il portait à ses enfants, l’envahisseur patienta jusqu’au retour du chef de tribu pour le tuer. Fous de rage, les Antambahoakas tinrent les jumeaux pour responsables de la mort de leur chef. Depuis, la consigne est claire. Ni jumeaux, ni jumelles ne peuvent vivre dans la communauté. D’autres tribus, comme celle des Antemoros, décidèrent qu’en cas de naissance gémellaire, seul l’un des deux enfants serait gardé. Histoire ou légende? Ces pratiques, elles, sont bien réelles, et toujours en vigueur.

Aujourd’hui encore, cette terre malgache a en effet beaucoup de mal à abandonner cette pratique enracinée dans les consciences. Une folie ancestrale qui sévit depuis quatre siècles dans la région de Mananjary.

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