Sud-Soudan : la paix mise à mal


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Près de 100 personnes ont été tuées depuis lundi dans des combats entre l’armée sudiste et des milices rebelles dans les régions du haut Nil et du Jonglei, au Sud-Soudan. Ces affrontements jettent une ombre sur l’accord de paix signé en 2005 et sur l’indépendance totale du pays qui devrait être définitive en juillet prochain.

Les accords de paix entre Nord et Sud-Soudan survivront-ils au regain de violences des deux dernières semaines dans la zone frontalière entre les deux États ? Rien n’est moins incertain. Depuis la mi-janvier, les relations entre Khartoum et Juba sont mises à mal par une série d’affrontements entre milices et armée régulière sudiste.
Derniers affrontements en date ? Lundi, dans la région du Jonglei. L’armée populaire de libération du Soudan (SPLA) – désormais l’armée souveraine de la région quasi-autonome du sud – et des miliciens ont échangés des tirs nourris faisant 21 morts dont sept soldats. Dans la même journée, l’armée sudiste a également répertorié d’autres affrontements avec des miliciens dans la province voisine du Haut Nil avec, ici, un bilan de 72 morts – 65 rebelles et sept soldats. Les miliciens semblent déterminés à s’en prendre également aux populations civiles des régions frontalières puisque trois villages de la région d’Abyei, soit près de 300 habitations, ont été incendiées hier par des miliciens proches de Khartoum comme l’affirme Enough Project , une organisation de lutte contre les génocides.

La main de Khartoum ?

L’identité et les revendications de ces milices sont encore incertaines. Plusieurs sources avancent les noms de George Athor, ancien haut gradé de la SPLA entré en rébellion, et celui d’Ulony, un milicien longtemps au service de Khartoum. De même, un officier de l’armée sudiste déclare que la SPLA aurait mis la main sur 37 fusils d’assaut AK-47 « sans aucun doute, fournis par le Nord ». Les responsables politiques du Sud-Soudan accusent les rebelles d’agir pour le compte de Khartoum afin de déstabiliser leur pays. Une assertion niée par le gouvernement nordiste qui a reproché à son tour au Sud-Soudan de soutenir les groupes rebelles du Darfour. Ces diatribes mutuelles rompent avec l’entente cordiale affichée jusqu’à maintenant par les deux parties depuis 2005 et plus récemment, le 4 février dernier, lorsque le président soudanais Omar el Béchir admettait l’existence de l’Etat du Sud-Soudan en validant les résultats du référendum d’auto-détermination du mois de janvier. Si les affrontements continuent de se multiplier de la sorte, une radicalisation des relations entre Juba et Khartoum est à craindre.

Première victime, la population

Avec les incendies volontaires d’habitations, les populations civiles ne sont pas épargnées par la reprise des violences aux Soudan. La chaîne France 24 annonçait vendredi dernier que les habitants de la ville d’Abyei fuyaient par dizaines de millier la région en proie à des affrontements, laissant ainsi une ville « presque vide », rapporte l’ONG Médecins du Monde.
Dans cette région pétrolière contestée d’Abyei, « Les civils n’ont plus aucun moyens de se protéger et personnes ne veut les protéger » explique un commerçant dans cette vidéo de l’organisation Enough Project. Certains civils, auraient même décidé de prendre les armes pour protéger leurs habitations.

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L’ONU appelle au respect des accords de paix

Ces migrations de masse inquiètent le coordonnateur humanitaire de l’ONU au Soudan, Georg Charpentier, qui a appelé les parties au calme et au respect des accords de paix d’Abyei du 13 et 17 janvier dernier. Ils prévoyaient un référendum sur l’appartenance de la ville et de sa région pétrolifère au Nord ou au Sud. Mais il a été repoussé sine die après un désaccord sur la participation des Misseriya au vote. Ces nomades arabes du nord insistent pour y participer car ils craignent de perdre l’accès à cette région en cas de rattachement au Sud-Soudan. Pour canaliser ce regain de tensions dans la région, l’ONU a annoncé jeudi dernier l’envoi de casques bleus supplémentaires au 10 500 déjà déployés dans cette zone frontalière.

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