Fouettée pour avoir porté un pantalon: une vidéo insoutenable


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Une vidéo qui circule depuis mercredi sur internet embarrasse les autorités soudanaises. On y voit une femme se faire fouetter par des policiers en public, pour avoir osé mettre un pantalon. L’association « Non à l’oppression des femmes » milite pour l’abrogation de cette peine.

Cette vidéo en a choqué plus d’un. La femme qu’on voit sur ces images a été condamnée à cinquante coups de fouet pour avoir osé porter un pantalon. Selon des sites soudanais, la scène se serait déroulée le 5 décembre et a été filmée au siège de la police de Khartoum, en présence d’un juge du tribunal de police. Elle a été postée sur YouTube et a très vite fait le tour du web. D’après le quotidien espagnol El Mundo, le gouvernement soudanais a annoncé lundi le lancement d’une enquête sur les policiers qui ont appliqué la sentence.

Le soudan récidive

Plus que le jugement, c’est la manière avec laquelle la peine a été appliquée qui a mis en émoi l’opinion publique. Selon Mariam Ezzedine, membre du parti de « La coalition nationale » et militante au sein du mouvement « Non à l’oppression des femmes », « on entend également des policiers rire alors qu’elle hurle de douleur. Ses bourreaux ne semblent d’ailleurs pas le moins du monde gênés par la présence d’une caméra. Un agent demande même à ce que l’on filme les gens qui assistent à la punition même si lui se cache le visage dès que l’objectif est braqué sur lui ».

Ce n’est pas la première fois que le Soudan est face à ce genre d’affaire. Le mouvement « Non à l’oppression des femmes » avait d’ailleurs été créé suite à la fameuse affaire de la journaliste Loubna Hussein qui avait aussi été poursuivie pour avoir porté un pantalon jugé « indécent ». Condamnée à 200 livres soudanaises, soit 66 dollars, la peine n’avait pas été appliquée en raison de la médiatisation de son histoire.

Une pratique autorisée par la loi

« Depuis l’affaire de la journaliste Loubna Ahmad Hussein, nous ne cessons de lutter pour l’abrogation de “la loi sur l’ordre public”. Au cours de nos manifestations, nos militantes sont prises à parti par les forces de police et même parfois arrêtées. Il y a six mois, nous avons voulu saisir la Cour constitutionnelle pour demander l’abrogation de cette loi, mais notre requête n’a même pas été examinée », explique Mariam Ezzedine.

Selon elle, « ce genre de punition est toutefois légal. Il est stipulé dans la loi sur l’ordre public que les femmes ne doivent pas porter de vêtements indécents. Celles qui s’y adonnent peuvent être fouettées ou soumises à une amende. Sachant que la définition de ce qu’est une tenue indécente est laissée au libre arbitre des policiers. Ils ont carte blanche pour arrêter les femmes, mais aussi pour exécuter la sentence sans passer par un juge et sans que l’accusée puisse recourir à un avocat ou appeler qui que ce soit. Ces pratiques ne sont ni plus ni moins que de la ségrégation envers les femmes soudanaises et nous refusons que ces policiers restent impunis ».

Mariam Ezzedine et trente huit autres militantes ont été arrêtées par les autorités ce matin lors d’une marche de protestation devant le Parlement régional de Khartoum.

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