Rwanda : un SMS pour sauver mère et nouveau-né


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Un téléphone mobile
Un téléphone mobile

En Afrique, moins de la moitié des femmes bénéficient d’une assistance pour donner la vie. Un taux de mortalité que l’ONU tient à diminuer considérablement. Dans un district test du Rwanda, une initiative, le RapidSMS permet de lutter efficacement contre les décès en couche. Un simple SMS et ce sont deux vies sauvées.

« Au Rwanda, 750 femmes enceintes sur 100 000 meurent chaque année, constate Friday Nwaigwe, responsable de la santé de l’enfant et de la nutrition au Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef). D’ici à 2015, l’Organisation des Nations unies (ONU) s’est fixé comme objectif de réduire de 75% la mortalité maternelle au niveau mondial. Le Rwanda, territoire où la densité de population est la plus importante d’Afrique, fait l’objet de toutes les attentions. En effet, ce pays enregistre les pires taux en matière de mortalité maternelle selon l’ONU.

Pour combattre ce phénomène, trois agences onusiennes, le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef), le Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP) et l’Organisation mondiale pour la santé (OMS), ont mis en place une initiative basée sur le système RapidSMS. Le principe est simple : un court message utilisant des codes et des abréviations préétablis qui renseignent l’hôpital sur l’état de santé de la mère et de l’enfant. En retour, l’établissement de santé peut envoyer des indications sur la marche à suivre au cas par cas aux agents de santé sur place. Ce programme d’analyse de données est déjà utilisé dans d’autres pays d’Afrique, tels que le Nigeria, la Zambie, le Malawi pour lutter, par exemple, contre la malnutrition.

« Suivre la mère dès le début de sa grossesse, pendant et aussi après »

Ce dispositif est actuellement testé à Musanze, un district de la Province du Nord du Rwanda. Près de 500 agents de santé, des bénévoles, qui officient dans cette zone, ont reçu des téléphones portables grâce auxquels ils peuvent communiquer et collecter plus facilement des données médicales concernant les femmes enceintes. Toutes les futures mères commencent par être enregistrées dans ce programme, ensuite, un suivi régulier tout au long de la grossesse est réalisé, surtout quand il s’agit de gestation à risque, et les informations recueillies sont envoyées en direction d’un serveur central dans la capitale, Kigali. La technologie RapidSMS ne s’arrête pas à l’accouchement. Les femmes sont suivies jusqu’à six semaines après la naissance et les nouveaux-nés jusqu’à leur 9 mois. Quand une anomalie est détectée, via SMS, l’hôpital en charge du suivi peut aussi fixer un rendez-vous à la mère. « On s’est inspiré de Cuba, explique Misbah Sheikh, responsable de la communication et des relations extérieures de l’Unicef à Kigali. Là-bas, le taux de mortalité maternelle et néonatale est très bas parce qu’on a compris qu’il fallait suivre la mère dès le début de sa grossesse, pendant et aussi après. »

Difficile pour l’heure de dresser le bilan chiffré du Rapid SMS. « Il est encore un peu tôt, affirme Friday Nwaigwe, le RapidSMS est opérationnel au Rwanda depuis mai seulement.» Toutefois l’efficacité du système ne fait pas l’ombre d’un doute pour tous les acteurs sur place et surtout pour John Kalach, directeur de l’hôpital le plus proche de Ruhengeri, la capitale du district. « Je n’ai pas encore recensé dans mon hôpital de décès maternel, alors qu’à la même époque, l’an dernier, on en comptait déjà dix ».

Prochaine étape pour l’Unicef : équiper les 17 500 personnels de santé maternelle du Rwanda de téléphones portables. Selon Friday Nwaigwe, le succès du RapidSMS au Rwanda est dans un premier temps basé sur le vaste réseau téléphonique. « Le pays jouit d’une couverture téléphonique étendue, explique-t-il. Elle n’est pas parfaite certes mais c’est largement suffisant ». Cette technologie implique aussi une continuité de la fourniture en électricité, car il faut recharger les téléphones. Dans un pays où seulement 6% de la population a accès à l’électricité, le recours au SMS et au téléphone portable pourrait être problématique mais ce n’est pas le cas. « Certes, les agents de santé doivent marcher un petit peu pour charger les téléphones, mais ici, les gens se débrouillent », explique Misbah Sheikh. De plus, le gouvernement rwandais apporte son soutien financier au projet. De nombreuses ambulances ont été mises à disposition pour que les mères puissent être transportées rapidement dans l’hôpital le plus proche.

Thème central du sommet l’Union africaine (UA) qui s’est achevé le 27 juillet dernier, la santé maternelle et infantile sur le continent est préoccupante. L’initiative RapidSMS pourrait permettre de faire face au phénomène. Jean Ping, président de la Commission de l’UA, a rappelé que « la mortalité maternelle et infantile fait plus de victimes que les conflits ». D’ici à la fin 2010, le projet RapidSMS devrait être étendu au reste des vingt-neuf districts rwandais et permettra de suivre la grossesse d’environ 400 000 femmes par an.

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