Tchad : les rebelles aux portes de N’Djamena


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Drapeau du Tchad
Drapeau du Tchad

L’armée tchadienne est allée à la rencontre d’une colonne rebelle qui a percé le pays d’est en ouest, depuis mardi, et se trouvait jeudi à moins de 300 Km de N’Djamena. Elle serait formée de 300 véhicules. La dernière attaque de cette nature avait été matée, en avril 2006, avec l’appui de la France, qui avait expliqué vouloir protéger ses ressortissants.

C’est reparti comme en avril 2006, lorsque des rebelles du Front uni pour le changement (FUC, rébellion unifiée) avaient traversé le Tchad d’est en ouest avant d’atteindre N’Djamena, puis d’en être chassés par l’armée. Mais cette fois, les autorités tchadiennes semblent avoir décidé d’arrêter la percée des trois principaux mouvements tchadiens, dont le commandement est unifié et dirigé par le colonel Fizani Mouhajir depuis décembre dernier, avant qu’ils n’arrivent dans les murs de la capitale. Selon une source militaire citée par l’AFP, l’armée et le président Deby lui-même seraient montés au front pour s’opposer à l’avancée d’une colonne partie mardi dernier de l’est du pays. Mais ils ont renoncé dans l’après-midi et sont retournés sécuriser les environs de N’Djamena.

La colonne rebelle serait composée de 300 pick-up, ce qui représente « une grosse force », selon une source militaire tchadienne citée par l’AFP.
La rébellion a annoncé mercredi par la voix de son porte-parole, Abderamane Koulamallah, s’être emparée d’Oum Hadjer, entre Abéché et N’Djamena, et de plusieurs autres villes. Jeudi matin, elle précisait que quatre colonnes faisaient route vers la capitale, où elles comptaient arriver dans l’après-midi, avec pour objectif de l’encercler. L’armée y aurait fait creuser des tranchées et la France a appelé ses ressortissants à la vigilance.

Eufor, rebelles, armée, France…

Aucun contact terrestre n’avait eu lieu jeudi en début d’après-midi. L’armée affirme que les colonnes rebelles évitent soigneusement les positions de l’armée tchadienne, alors que le porte-parole du Commandement unifié explique que « les troupes gouvernementales ont fui en direction d’Abéché [et qu’elles] ont refusé de se battre ». Abderamane Koulamallah, qui est lui-même un ancien conseiller du président Deby, assure que de nombreux ralliements ont eu lieu.

La rébellion a lancé son attaque alors qu’elle venait d’être bombardée par l’aviation tchadienne, mardi, et que l’Eufor avait reçu lundi l’autorisation définitive de l’Union européenne pour le déploiement de ses 3700 hommes dans l’est du pays. Celui-ci prendra au moins trois mois, mais une centaine d’éléments français, suédois, irlandais, néerlandais et italiens sont déjà présents à N’Djamena et Abéché pour préparer l’arrivée du gros des troupes.

Jusqu’où ira Epervier ?

Elles seront composées pour plus de la moitié de militaires français, ce qui a fait craindre aux contributeurs européens et surtout aux rebelles que la partialité de l’Eufor dans le conflit tchadien ne soit pas assurée. Le général irlandais Patrick Nash a indiqué mardi que la mission qu’il dirige, chargée de protéger les réfugiés et déplacés à la frontière du Tchad, de la Centrafrique et du Soudan, répondrait en cas d’attaque des rebelles. Mais « si les rebelles n’interfèrent pas avec notre mission, alors ce n’est pas notre affaire », a-t-il précisé.

Même son de cloche de la part du ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, qui a expliqué vendredi dernier que l’Eufor ne soutiendrait pas Idriss Déby Itno. En avril 2006, le FUC s’était heurté à la résistance de l’armée nationale appuyée par la France. Dans le cadre de l’Opération Epervier, un Mirage avait effectué « un tir de semonce » en direction d’une colonne rebelle. « Un message clair aux rebelles pour signifier que nous protégions les ressortissants français. », selon le porte-parole de l’opération.

Depuis mardi, l’aviation française aurait assuré une mission d’information en survolant l’avancée de la rébellion. Ce que Abderamane Koulamallah, qui invite la France à devenir « une puissance médiatrice », considère comme un « acte de guerre ». La semaine dernière, le commissaire européen au Développement, Louis Michel, s’était dit « prêt à rencontrer les rebelles (…) pour rapprocher les points de vue et pour faire la paix », alors qu’il venait de rencontrer le président tchadien. Ce à quoi les rebelles ont répondu mercredi qu’ils l’étaient aussi.

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