Souhayr Belhassen, première présidente de la FIDH


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Souhayr Belhassen

La Tunisienne Souhayr Belhassen a été élue, mardi, au Portugal à la tête de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH). L’ancienne journaliste est la première femme à accéder à la présidence de l’organisation.

Souhayr Belhassen, 63 ans, est devenue mardi, à Lisbonne (Portugal) la présidente de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) pour un mandat de trois ans. Une nomination accueillie avec fierté et humilité par celle qui est la vice-présidente, depuis novembre 2000, de la Ligue tunisienne de défense des droits de l’Homme (LTDH), la plus ancienne organisation de défense des droits de l’homme dans le monde arabe et en Afrique. Elle fêtera le 7 mai prochain son trentenaire. « C’est grâce à l’action de la LTDH, celle d’une longue chaîne d’hommes et de femmes, que se poursuit aujourd’hui, dans un pays où sévissent l’injustice et l’abus de pouvoir, la lutte pour la défense des droits humains », n’a pas manqué de rappeler Souhayr Belhassen dans le discours prononcé après son élection. La Tunisienne succède à la tête de la FIDH à l’avocat sénégalais Sidiki Kaba, le premier africain élu en 2001 à la tête de l’organisation et dont elle était l’adjointe. L’ancienne journaliste est devenue, elle, la première femme à accéder à la présidence de l’ONG. « Mon élection, a-t-elle noté, est la preuve matérielle qu’une autre vision des femmes dans la vie publique est en train de devenir réalité. »

La première femme à la tête de la FIDH

L’engagement de la Tunisienne en faveur de la défense des droits de l’Homme date du 5 juin 1967. Ce jour là, les Tunisiens protestent contre la guerre des 6 jours. Devenue journaliste, l’ancienne étudiante en Sciences politiques à Tunis, puis à Paris, mène de front sa carrière professionnelle, elle travaille notamment pour l’agence de presse Reuters, et son activisme. Il commence à prendre un tournant déterminant quand en 1984, elle s’investit, au sein de la LTDH, dans une campagne pour sauver 18 jeunes tunisiens condamnés à mort pour avoir participé aux émeutes du pain du 28 janvier 1984 [[ Entre le 27 décembre 1983 et le 6 janvier 1984, la Tunisie est au bord de la guerre civile à cause des « émeutes du pain », provoquées par les augmentation des prix du pain et des produits céréaliers]].

Le journalisme, ni le militantisme ne l’empêchent pas non plus de s’attacher à la co-écriture de Bourguiba, la biographie la plus complète sur l’homme politique tunisien, interdite en Tunisie jusqu’au coup d’Etat de Zine El Abidine Ben Ali, l’actuel président tunisien. Elle ne sera publiée qu’en 1990. Trois ans plus tard, en 1993, son militantisme acharné lui vaut d’être expulsée durant cinq ans de son pays. En cause, une pétition de soutien aux femmes algériennes où l’activiste dénonce la passivité du gouvernement tunisien face à là situation de ces dernières, de loin moins bien loties que les Tunisiennes. Les femmes, un sujet cher à Souhayr Belhassen qui considère son élection comme une « reconnaissance ». « Femme du monde arabo-musulman, où la culture et les traditions musèlent les femmes et freinent leur émancipation, je vis aujourd’hui mon élection comme l’aboutissement d’un parcours […], car la présence d’une femme arabe à la présidence de la FIDH revêt une importance capitale.»

Un signe fort pour la Tunisie et le monde arabe

De retour d’exil en 1998, elle crée l’hebdomadaire culture dénommée 7 sur 7. Le magazine meurt l’année de sa création pour s’être attaqué au régime de Ben Ali en faisant allusion à une émission de la chaîne nationale française France 2. Cette absence de liberté d’expression qui mine le monde arabe, Souhayr Belhassen l’a rappelée mardi. « Cette région qui compte 300 millions de personnes n’a jamais connu, excepté récemment la Mauritanie et la Palestine, d’alternance démocratique. (…) Les défenseurs des droits humains y mènent un travail de Sisyphe pour introduire la notion de droit élémentaire de l’être humain dont, au premier chef, le droit à la vie. » A l’instar de tous les militants pour les droits de l’Homme en Tunisie, Souhayr Belhassen est l’objet d’une surveillance constante des autorités tunisiennes. Ce qui n’a jamais découragé la militante dans son activisme qui prend aujourd’hui une nouvelle dimension.

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