
Les relations entre les États-Unis et l’Afrique du Sud entrent dans une nouvelle zone de turbulences après l’annonce, jeudi 8 mai, du prochain accueil d’un groupe d’Afrikaners aux États-Unis. Ce projet, voulu par l’administration Trump, suscite une vive inquiétude à Pretoria, qui a officiellement exprimé sa préoccupation auprès de Washington ce vendredi 9 mai.
Le programme de réinstallation devrait débuter dès lundi 12 mai, avec l’arrivée des premiers Sud-Africains blancs – descendants des colons néerlandais, allemands et français, communément appelés Afrikaners – que Donald Trump considère comme des victimes de persécutions dans leur pays d’origine. Dans un décret signé en février, le Président américain affirmait que les « États-Unis encourageraient la réinstallation des réfugiés afrikaners », qualifiant la situation en Afrique du Sud de « génocide ». « Ils prennent la terre des fermiers blancs, puis les tuent, eux et leurs familles », a écrit Trump sur son réseau Truth Social, sans que ces accusations soient corroborées par des données ou rapports indépendants.
Une diplomatie prudente mais ferme
Face à cette escalade verbale, le gouvernement sud-africain a adopté une posture à la fois mesurée et ferme. Un entretien qualifié de « cordial » a eu lieu ce vendredi entre le vice-ministre sud-africain, Alvin Botes, et le vice-secrétaire d’État américain Christopher Landau. Pretoria a rejeté catégoriquement les allégations de discrimination raciale, tout en rappelant que tout citoyen sud-africain est libre de quitter le pays.
Dans un communiqué, le ministère sud-africain des Affaires étrangères a indiqué : « Les allégations de discrimination ne sont pas fondées. Cette discussion fait suite aux échanges par canaux diplomatiques, au cours desquels l’Afrique du Sud a fait part de sa préoccupation concernant les informations selon lesquelles les États-Unis ont commencé à examiner les prétendus réfugiés d’Afrique du Sud et à réinstaller ces citoyens sud-africains aux États-Unis. »
Réformes foncières sous tension
Au micro de RFI, le ministre sud-africain des Affaires étrangères, Ronald Lamola, a souligné que la réforme foncière, cœur des inquiétudes américaines, vise avant tout à réparer les injustices historiques de l’apartheid. « Les projets de loi sur l’expropriation sont des projets de loi qui visent à corriger les déséquilibres du passé afin de garantir une distribution équitable de toutes les ressources de notre pays. Cela se fait dans le respect de la Constitution, qui offre suffisamment de garanties contre tout usage arbitraire du pouvoir par l’exécutif ou par l’État », a-t-il précisé.
M. Lamola a également insisté sur le fait que malgré les divergences actuelles, Pretoria reste déterminée à maintenir des liens solides avec Washington. « Les relations entre l’Afrique du Sud et les États-Unis ont toujours été dynamiques et évolutives, avec évidemment beaucoup plus de défis depuis l’élection du Président Trump », a-t-il expliqué avant d’ajouter que Washington reste un partenaire commercial stratégique, le deuxième plus grand du pays après la Chine.
Un dossier hautement politique
Cette décision américaine soulève de nombreuses interrogations. Pour Donald Trump, dont le discours en matière d’immigration est d’ordinaire très restrictif, l’accueil des Afrikaners semble répondre à des considérations idéologiques et électorales, s’inscrivant dans une rhétorique valorisant la protection des « minorités européennes persécutées ». Du côté sud-africain, cette polémique vient raviver les tensions autour de la réforme foncière, qui divise profondément la société, entre impératif de justice historique et crainte des débordements.