Un prix Nobel de la Paix au féminin


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Le prix Nobel de la paix a été attribué ce vendredi à Oslo pour la première fois de son histoire à trois femmes : la présidente du Liberia, Ellen Johnson, sa compatriote militante des droits de l’homme, Leymah Gbowee, ainsi qu’à l’activiste yéménite, Tawakkul Karman.

Trois femmes lauréates du prix Nobel de la paix. Une première. Le prestigieux prix a été décerné ce vendredi à Oslo en Norvège à la dirigeante du Liberia Ellen Johnson et à sa compatriote militante des droits de l’homme, Leymah Gbowee, ainsi qu’à l’activiste yéménite, Tawakkul Karman, première femme arabe à le recevoir. Toutes les trois ont été récompensées « pour leur lutte non violente en faveur de la sécurité des femmes et de leurs droits à participer au processus de paix », a déclaré Thorbjoern Jagland, le président du comité Nobel norvégien.

Ellen Johnson, « la dame de fer »

Ellen Johnson, 72 ans, première femme à être élue démocratiquement en 2005 à la tête d’un pays africain, brigue un second mandat à la présidentielle qui se tiendra dans quatre jours au Liberia. Elle a œuvré pour la reconstruction de son pays ravagé durant quatorze ans par la guerre civile qui a causé la mort de 25 000 personnes et miné l’économie. Cette mère de quatre enfants et grand-mère de huit petits enfants, économiste formée à la prestigieuse université américaine Harvard, est également très connue des institutions financières internationales. Elle a travaillé durant plusieurs années au sein de l’ONU et à la banque mondiale. « Depuis son investiture en 2006, elle a contribué à assurer la paix au Liberia, à promouvoir le développement économique et social, et à renforcer la place des femmes », a souligné Thorbjoern Jagland.

Ministre des Finances dans les années 1960 et 1980, son objectif est d’effacer la dette et d’attirer les investisseurs pour la reconstruction de son pays. Pour atteindre ce but, Ellen Johnson s’attèle ainsi à la lutte contre la corruption dans la plus vieille République d’Afrique subsaharienne, fondée en 1822 par des esclaves noirs affranchis venus des Etats-Unis. Elle engage notamment de profondes réformes institutionnelles. Mais la tâche est ardue, tant le Liberia est gangrené par les scandales de corruption et miné par les profondes déchirures issues des guerres fratricides. Elle est surnommée « la dame de fer » pour ce combat, pour lequel elle est aussi envoyée deux fois en prison dans les années 1980 sous le régime de Samuel Doe.

Leymah Gbowee lance « la grève du sexe » contre la guerre

Ellen Johnson doit notamment son accession au pouvoir à sa compatriote Leymah Gbowee. Elle a contribué à la fin de la deuxième guerre civile en 2003 avec le lancement de son mouvement pacifique en 2002, intitulée « la grève du sexe », qui incite toutes les femmes de toutes confessions religieuses confondues à se refuser aux hommes tant que les hostilités se poursuivent. Une initiative qui contraint Charles Taylor, ex-chef de guerre devenu président, à les associer aux négociations de paix. « Leymah Gbowee a mobilisé les femmes au-delà des lignes de division ethniques et religieuses pour mettre fin à une longue guerre au Liberia et assurer la participation des femmes aux élections », selon Thorbjoern Jagland. La lauréate recommande également aux femmes de son pays de prier pour la paix, ce qu’elles font sans distinction de religion, souvent vêtues de blanc.

Tawakkul Karman, leader de la révolte contre Saleh

Tawakkul Karman, la troisième lauréate, journaliste née en 1792 a, quant à elle, dédié sa récompense aux révolutions arabes qui ont provoqué la chute ou déstabilisé plusieurs régimes autoritaires en Afrique du Nord et au Moyen-Orient. Cette jeune femme frêle est une figure emblématique du soulèvement contre le président du Yemen, Ali Abdallah Saleh. Dans un pays conservateur où les femmes sont toujours reléguées au second plan en politique, elle n’a pas hésité à s’engager en tant que leader dans les manifestations étudiantes en janvier au péril de sa vie. Pour Thorbjoern Jagland, elle a « aussi bien avant que pendant le printemps arabe joué un rôle prépondérant dans la lutte en faveur des droits des femmes, de la démocratie et de la paix au Yémen ». En 110 ans, seules douze femmes ont reçu le prestigieux prix. La dernière en date étant l’écologiste kenyane Wangari Maathai, récemment décédée. Le prix Nobel de la paix semble donc se féminiser.

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