Un 15ème gouvernement pour la Somalie


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Un nouveau gouvernement, en transit au Kenya, se trouve désormais à la tête de la Somalie et doit réintégrer d’ici 3 semaines la capitale Mogadiscio. L’insécurité qui règne encore en Somalie et l’avortement des 14 tentatives précédentes rendent sceptiques certains observateurs. Mais des moyens financiers et humains vont être mis en œuvre pour assurer la sécurité des dirigeants somaliens une fois rentrés au pays.

Par Valentine Lescot

Le nouveau Premier ministre Ali Mohamed Gedi a nommé, depuis Nairobi où il s’est établi, une équipe de 89 ministres et secrétaires d’Etat. Elle remplace sans grands bouleversements un premier gouvernement destitué le 11 décembre dernier par le Parlement pour non respect des quotas claniques. Objectif de cette 15ème tentative: retourner au pays après 2 ans « d’exil » et mettre fin à la violence et au chaos qui y règne. En 13 ans, la guerre a fait près d’un demi million de morts.

Gouverner la Somalie n’est pas une mince affaire. Depuis 1991, date à laquelle un conflit entre clans rivaux a éclaté après la chute du dictateur Mohamed Siad Barre, aucun pouvoir n’a réussi à s’imposer face aux chefs de guerre. A partir de 2002 des pourparlers de paix se sont tenus à Nairobi au Kenya sur une initiative du GIAD (Inter-Governmental Authority on Development) et de personnalités somaliennes. Pour la première fois, les factions rivales, des hommes politiques, des notables et la diaspora somalienne se sont retrouvés pour élire un parlement d’environ 250 députés. Le 24 octobre dernier Abdoullahi Yusuf Ahmed, l’ancien militaire qui s’est battu contre Mohamed Siad Barre et fondateur de la région autonome du Puntland, est élu Président du gouvernement fédéral de transition, remplaçant Abdi Kassim Salad Hassan. Ce dernier, nommé chef de l’Etat en 2000, n’avait pu régner que sur un seul quartier de la capitale somalienne.

Des seigneurs de guerres aux postes ministériels

Le Premier ministre, nommé en novembre, a pris soin de s’entourer des principaux chefs de guerre. Hussein Mohammed Aydid, fils de Mohammed Farah Aydid, « l’homme à abattre » des Américains lors de l’opération raté Restore Hope, a été nommé vice-premier ministre en charge du portefeuille de l’Intérieur. Mohamed Qanyare Afrah, l’un des grands Warlords de Mogadicio, est promu à la Sécurité intérieure. Un certain Osman Hassan Ato va diriger le ministère des Travaux publics et du logement. Les noms de Mussa Sudi Yallahow et Yusuf Hirale sont également cités dans le gouvernement. « Sans leur participation, celui-ci ne peut fonctionner. Mais les défis restent énormes », dit Ali Youssouf de La lettre d’Addis. Si les nouveaux dirigeants somaliens veulent se réinstaller à Mogadiscio, ils doivent s’assurer du bon accueil des milices qui occupent toujours le terrain. D’après Ali Youssouf, le Président et son équipe pourraient d’abord s’installer dans la région pacifiée de Puntland, où l’ambiance serait évidemment plus propice au travail. La question est de savoir comment des hommes qui ont combattu les uns contre les autres pendant de longues années arriveront à collaborer et renonceront totalement à devenir l’homme fort du pays.

Pacifier et reconstruire la région

Les espoirs de normaliser la Somalie restent encore assez minces vu l’état dans lequel se trouve le pays. Les bâtiments publics (écoles, ministères) sont devenus des camps de réfugiés. Les hôpitaux sont inexistants. Le Président Yusuf a demandé, peu après son investiture, l’envoi de 20 000 soldats de la paix pour aider à désarmer les quelques 55 000 miliciens et protéger le gouvernement. Mais la communauté internationale reste encore traumatisée par ses précédentes interventions. En 1993, l’opération américaine Restore Hope s’était soldée dans un guet-apens où les corps des marines avaient été traînés ans les rues de Mogadiscio. L’Union africaine a annoncé qu’elle accepterait d’envoyer une Mission de soutien de la paix. Si l’Ouganda a proposé l’envoi de 2 000 hommes, l’offre est finalement tombée à 200 soldats. L’Union européenne devrait, quant à elle, envoyer 160 000 euros pour financer la logistique du rapatriement du gouvernement somalien.

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