Umoja ou le rêve d’une passion


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Quand Themi Nyandeni décide en 1981 de monter une petite école de danse pour les jeunes des ghettos à Johannesburg, personne ne s’imaginait que l’aventure amènerait, vingt ans plus tard, l’ancienne danseuse à la tête d’un formidable show artistique qui électrise aujourd’hui l’Afrique du Sud, l’Angleterre et l’Australie. Umoja. Ou l’histoire d’un conte de fée à l’africaine.

Queen’s Theatre, Londres, 23 heures. Fin du spectacle. Themi Nyandemi, en coulisse, assiste à une énième standing ovation du public pour saluer la prestation des 36 artistes d’Umoja. La créatrice du show, une lueur de fierté dans les yeux, ne peut s’empêcher d’apprécier tout le chemin parcouru depuis l’Afrique du Sud et sa petite école de danse des ghettos de Johannesburg. Trois spectacles tournent actuellement à travers le monde et Themi professe que le phénomène n’en est encore qu’à ses prémisses.

Tout remonte à 1981, Thelmi Nyandemi, ancienne étoile du célèbre spectacle sud-africain Ipi Ntombi décide de s’investir dans le social et de mettre son expérience au service d’une cause.  » J’ai créé une école de danse pour sortir les jeunes de la rue, pour leur offrir une autre alternative « , explique-t-elle. Au départ, ils ne seront que 10, âgés de16 à 18 ans.  » Les enfants croyaient en moi parce qu’ils m’avaient déjà vu danser dans Ipi Ntombi. Beaucoup ne savaient pas danser en arrivant. Mais en Afrique nous avons le rythme. Toutes les choses de la vie sont naturellement structurées autour de la musique. Il ne restait plus qu’à canaliser les énergies « .

Thelmi et Todd

Avec la chorégraphe Todd Twala, Thelmi imagine tout un spectacle mêlant chants et danses retraçant l’histoire musicale de l’Afrique du Sud. Elles l’appellent Umoja (harmonie ou solidarité en swahili). Mais les moyens manquent.  » Peu à peu le petite troupe s’est étoffée, mais nous n’avions aucune aide de la part des autorités locales. Outre nos propres fonds, nous étions obligées de nous débrouiller comme nous pouvions. Comme vendre des t-shirts pour financer nos activités. »

Le tournant intervient en 2000 à la faveur d’une rencontre. Une rencontre avec celui qui deviendra le manager de la compagnie. Joe Theron. Joe n’est alors qu’un simple producteur de disque anglais. De passage à Johannesburg, un ami lui fait écouter la bande originale du spectacle. Séduit, il décide d’en faire un album et de soutenir le show pour épauler la sortie du disque. Il saute le pas et s’engage aux côtés des deux femmes pour développer Umoja.  » Je ne connaissais rien du monde du spectacle mais j’ai tout de suite cru en ce que faisaient Thelmi et Todd. Je ne les connais pas depuis longtemps mais j’ai infiniment plus de respect pour elles que pour beaucoup d’autres personnes quand je regarde tout ce qu’elles ont accompli jusque-là « .

Audition : 700 jeunes pour 30 places

Alors Joe se démène pour apporter le show en Angleterre. Il investit tout l’argent qu’il peut et n’épargne pas ses efforts pour organiser la venue des 36 artistes et leur trouver un lieu de spectacle à Londres. Umoja élit domicile en novembre 2001 à Shaftesbury. Lieu d’où il sera expulsé après quelques représentations sous les plaintes des riverains. Umoja fait trop de bruit. Brocardé pour tapage nocturne, il est obligé de trouver une autre salle de spectacle. Ce sera le Queen’s Theatre en plein centre de Londres. Le succès est immédiat. Si bien qu’un promoteur australien à l’issue du show décide lui aussi d’apporter Umoja chez lui. Les accords sont pris pour qu’une troisième troupe Umoja se produise à Sydney.

 » Tous les artistes des trois spectacles Umoja sont et seront issus d’Afrique du Sud « , précise Themi.  » Et tous de notre école, qui existe toujours à Johannesburg. La dernière audition a attiré plus de 700 jeunes. Pour 30 places uniquement. En tout, nous formons chaque année une soixantaine de jeunes danseurs et chanteurs. Notre objectif est d’arriver à 80 « .

Pas de triomphalisme

Pour autant, Joe reste prudent.  » Il y a encore beaucoup à faire au niveau de la publicité pour installer le spectacle. Pour imposer la reconnaissance d’Umoja, une production africaine, comme un spectacle à part entière. Tous ce que nous gagnons pour l’instant nous le réutilisons pour la publicité. Nous dépensons près de 25 000 livres par semaine pour cela. Mais les choses prennent. Nous allons d’ailleurs bientôt déménager au New London Theatre, la salle de Cats, le spectacle au 27 ans de représentation. Notre slogan est déjà prêt :  » Il y a un nouveau chat en ville, celui-ci ne ronronne pas, il rugit  » « .

 » Il n’y a aucun artifice dans le spectacle. C’est simplement nous et c’est ce que nous savons faire de mieux. Ils (les 36 artiste, ndlr) savent tout faire. Il y a tellement de talents inconnus dans Umoja. La plus grosse réussite reste que le spectacle à changer la vie des jeunes. Il leur a offert une véritable planche de salut et se construit comme une plate forme pour beaucoup d’autres « . Themi rayonne. La machine Umoja est en marche.

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