Swaziland : se soumettre ou être expulsé


Lecture 4 min.
Drapeau du Swaziland
Drapeau du Swaziland

Le roi contraint à l’exil des citoyens qui ne se soumettraient pas à son frère. Face à cela, un vaste mouvement de mécontentement submerge le Swaziland .

Les manifestations populaires d’étudiants, de syndicats, d’enseignants et de simples sujets du Roi Mswati continuent de croître après l’expulsion d’environ 200 résidents de deux chefferies par le roi Mswati. Le roi a, en effet, offert leurs terres à son frère aîné, le prince Maguga Dlamini en lui proposant de régner comme un « second chef ». Les habitants refusent de considérer le prince comme leur guide.

Minuit, le 14 octobre dernier l’armée rassemble comme du bétail les résidents et les déplacent à 100 km de leurs terres ancestrales. Ils vivent à l’heure actuelle en plein air entourés de soldats. L’un des chefs évincés, Mliba Fakudze s’est enfui en Afrique du Sud où il a demandé l’asile politique.

Un roi autoritaire

Les ligues de droits de l’Homme condamnent ces expulsions. Leurs avocats ont écrit au roi Mswati.  » Nous prions sa Majesté et son gouvernement de faire raisonnablement en sorte que le tri se fasse entre le vrai et le faux en ce qui concerne les attentats subis par les populations déplacées.  » La missive rajoute :  » Il est difficile de croire ce qui arrive actuellement en Swaziland.  »

L’association nationale des enseignants milite pour les 70 enfants qui ont été retirés de leurs établissements. Certains d’entre eux ont ainsi été séparés de leurs parents quand les chefs de familles ont fui l’assaut nocturne des soldats. Le syndicat enseignant a appelé à une grève de protestation. Cette dernière a été déclarée illégale par le gouvernement, faisant ainsi avorter la rencontre de masse du 28 octobre dernier. La manifestation a été interdite par le Premier ministre Sibusiso Dlamini en évoquant la loi sur l’ordre public datant de 1963.

Cette loi mise en place par les colons anglais avait pour objectif d’endiguer les manifestations politiques en faveur de l’indépendance du pays.

Le gouvernement monarchique du roi Mswati l’a maintenue afin de l’utiliser contre les dissidents politiques comme la fédération swazie des syndicats dont les 800 000 membres sont au premier plan de la lutte pour la démocratie. Le Premier ministre a aussi invoqué cette loi pour interdire une manifestation du syndicat des travailleurs prévue pour le 29 octobre, visant à protester contre l’expulsion des chefferies.

Toutes les couches sociales indignées !

La marche des étudiants sur le palais a été dispersée par la police au moyen de gaz lacrymogènes et de balles en caoutchouc. L’Université est depuis lors fermée. En réponse à cette interdiction le syndicat des enseignants annonçait pour le 30 octobre une fermeture des écoles sur le territoire national. Et cela pendant que celui des travailleurs envisageait une journée morte.

Ces protestations non coordonnées, maintenant vieilles de deux semaines, ne montrent aucun signe d’accalmie. Si elles ne constituent pas une menace réelle pour le pouvoir, elles expriment néanmoins une insatisfaction largement partagée concernant la façon dont un groupe de Swazis, loyaux à leur chef et ne voyant aucune raison de prêter allégeance à un prince qu’il n’apprécient pas, sont traités.

Thembisile Mabuza, une femme d’un certain âge, raconte :  » Quand les soldats sont venus nous prendre dans le milieu de la nuit, ils ont dit que nous pourrions revenir dès l’instant où nos excuses auraient été présentées à Maguga.  »

Même les infirmières swazies ont rejoint le mouvement de protestation contre les  » exilés internes  » , comme les désigne la ligue swazie des droits de l’Homme. Les infirmières refusent de soigner le vieux prince Maguga, agé de 70 ans, qui souffre de diabète et, susceptible d’être amputé d’une jambe.

Le Prince craint que les infirmières n’en fassent plus que nécessaire. Durant son séjour à l’hôpital gouvernemental de Mbabane sous surveillance policière, on aurait rapporté qu’il aurait déchiré les quatre sondes qui lui étaient injectées, croyant le sérum empoisonné.

L’éventualité du décès du prince pourrait avoir incité les autorités à ordonner ces expulsions  » Quand je mourrai mon fils et, après lui, son fils deviendront des chefs « , affirmait Maguga arguant que la terre lui avait été donnée par son père, le roi Sobhuza. Ce mois-ci les familles déplacées ont reçu en moyenne 28 000 dollars américains en vue de leur réinstallation. Mais les populations de Macetjeni et de Kamkhweli n’ont rien perçu.

James Hall

Traduit de l’anglais par Falila Gbadamassi

Retrouvez le précédent coup de sang du frère du roi…

Suivez Afrik.com sur Google News Newsletter