Somalie : réveil d’un sentiment anti-éthiopien


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Une dizaine de personnes ont été tuées, samedi et dimanche, dans le Sud de la Somalie, lors d’affrontements opposant notamment des islamistes à l’armée régulière et aux forces éthiopiennes. Certains islamistes appellent à attaquer les soldats de l’Ethiopie alors que d’autres, qui ont notamment pu fuir au Yémen, sont ouverts à des négociations de paix avec le gouvernement de transition.

Les territoires sous contrôle des islamistes somaliens se réduisent comme peau de chagrin. Le gouvernement de transition a annoncé avoir repris, dimanche, la ville de Ras Kamboni (extrême Sud du pays, à la frontière avec le Kenya). « Nos forces, accompagnées de nos amis éthiopiens, ont complètement battu les derniers islamistes présents dans la zone frontalière. Les islamistes ne contrôlent plus rien », a affirmé à l’AFP le Colonel Abdulrasq Afgebub.

Manifestations anti-éthiopiennes

Mais dans d’autres zones du pays, l’heure n’est pas à l’accalmie. Des hommes en armes ont attaqué un convoi de soldats éthiopiens et somaliens, dimanche soir, dans la capitale Mogadiscio, où s’est rendu, lundi, le président Abdullahi Yusuf Ahmed pour la première fois depuis sa prise de fonction en 2004. Le nombre de victimes varie selon les sources, mais l’agence d’information somalienne Shabelle indique qu’au moins deux soldats et deux civils ont péri. L’identité des assaillants n’est pas claire : « Il est possible que des gens qui ont de mauvaises intentions contre le gouvernement soient responsables des attaques. Le gouvernement fait très attention et nous ne voulons pas blâmer activement les cours islamiques », a expliqué Abdirahman Dinari, porte-parole du gouvernement.

Il semble que des Somaliens soient prêts à les soutenir, ne supportant pas la présence de l’Ethiopie. Samedi, à Mogadiscio, des centaines de manifestants ont violemment protesté contre « l’occupation éthiopienne ». Ils ont brûlé des pneus, brisé des vitres de voiture… Bilan : deux morts et plusieurs blessés. Une marche a également été organisée le lendemain à Beledweyne (Centre), apparemment parce que des Ethiopiens détenaient un commandant somalien qui aurait refusé de livrer un milicien islamiste. Les débordements ont fait un mort.

Al-Qaeda appelle à la guerre sainte

Des experts estiment que les actes de révolte qui secouent la capitale sont peut-être liés à l’appel des islamistes à leurs compatriotes pour qu’ils s’en prennent aux soldats éthiopiens. La diffusion d’un message vidéo du numéro deux du réseau terroriste al-Qaeda ne serait pas non plus étrangère à ce climat. « J’exhorte tous les musulmans à répondre à l’appel du jihad (guerre sainte, ndlr) en Somalie, a déclaré Ayman al-Zawahri. (…) La véritable guerre va commencer par des attaques contre les forces éthiopiennes d’agression. (…) Je vous recommande les embuscades, les mines et opérations suicides. »

Le responsable ajoute : « J’exhorte les lions de l’Islam au Yémen, dans la péninsule arabique, en Egypte, au Soudan et dans le Maghreb arabe à voler au secours de leurs frères musulmans en Somalie. (…) J’exhorte la nation islamique en Somalie à tenir fermement dans ce nouveau champ de bataille contre la croisade menée par l’Amérique, ses alliés et les Nations unies contre l’Islam et les musulmans ».

Inclure les islamistes dans le processus de paix

Pour certains leaders islamistes, l’heure semble pourtant à l’apaisement. Ceux qui ont pu fuir se sont rendus au Yémen, qui se veut médiateur entre eux et le gouvernement de transition. L’un d’entre eux, le Professeur Ibrahim Hassan Adow, aurait déclaré que son organisation était prête à négocier avec les autorités somaliennes. En tournée régionale dans la Corne de l’Afrique, la secrétaire d’Etat américaine adjointe aux affaires africaines, Jendayi Frazer, a déclaré : « Nous pensons que tous ceux qui renoncent à la violence et à l’extrémisme ont un rôle à jouer en Somalie ».

Elle a précisé que l’Union des tribunaux islamiques devait être intégrée au processus « de réconciliation et de dialogue ». Une mission à laquelle le président du parlement de transition, Sharif Hassan Sheikh Adan, a bien voulu participer. Et cela malgré l’opposition de ceux qui pensent que l’inclure est aujourd’hui inutile car ils estiment que ce mouvement est mort.

L’Union africaine, réunie ce lundi à Addis-Abeba (Ethiopie), prépare les modalités d’une force de maintien de la paix pour la Somalie, qui pourrait être déployée d’ici la fin du mois. Elle devrait être modelée sur celle qui a servi au Burundi, où les soldats avaient pour mission de défendre les dirigeants et les installations essentielles.

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