Reine gospel


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Manu Dibango, Cheb Mami ou encore Geoffrey Oryema ont fait appel à ses services en tant que choriste. Son coeur, son tempérament et surtout sa voix ont fait d’elle une reine : Queen Etémé. Avec l’album Soki, l’artiste camerounaise, a décidé de voler de ses propres ailes. Une production qui a nécessité près de quatre ans de travail. Interview.

Queen Etémé. Et Delphine devint reine. Née Delphine Etémé, la jeune artiste gagne son prestigieux nom de scène dans la chorale gospel où elle officiait avant d’être repérée par les plus grands. Queen (reine en anglais) pour ses solides qualités vocales, mais queen aussi pour son tempérament et sa générosité. Manu Dibango, Cheb Mami ou autre Geoffrey Oryema ne s’y sont pas trompé en réclamant ses services en tant que choriste. Et sont fiers aujourd’hui de sa jeune carrière solo. Après avoir longtemps chanté pour les autres, elle a décidé, il y a quatre ans de présenter son propre univers musical. Le résultat est là : Soki. Un treize titres (plus un remix) dont elle peut être fière. Rencontrée à Monaco le week-end dernier, à l’occasion du Festival Asiafrica de Monaco pour les œuvres universelles de solidarité (Famous) qu’elle soutenait, Queen Etémé s’est confié à Afrik.

Afrik : Vous avez été remarquée dans des formations gospel. Votre album n’est pas à proprement parlé du gospel. Comment définiriez-vous votre style ?

Queen Etémé :
Ce que je fais n’est certes pas du gospel, mais ça reste très inspiré par le gospel au niveau des messages. Parce que je parle beaucoup d’espoir, d’espérance et de Dieu. Au-delà de ça, ma musique est à l’image de moi-même et de toutes mes influences : le blues, le gospel, ou le jazz. Mais aussi les musiques traditionnelles africaines.

Afrik : Comment ont réagi les grands noms de la musique que vous avez accompagnés en tant que choriste quand ils ont su que vous vous lanciez dans une carrière solo ?

Queen Etémé :
Ils étaient très contents, très fiers. C’est comme un enfant qui grandit à la maison et qui finit par voler de ses propres ailes. C’est en somme un cheminement logique.

Afrik : Quel est votre moteur dans la musique ?

Queen Etémé :
Je chante pour pouvoir assouvir ma passion et accomplir un rôle social. C’est-à-dire aider les plus démunis et surtout les enfants, à travers une certaine notoriété artistique. Je suis marraine de deux associations pour les enfants. L’une qui s’appelle Launatho qui s’occupe des enfants handicapés à Dakar et l’autre qui se trouve à Ouidah (Bénin, ndlr), avec la famille Jah.

Afrik : Combien de temps a nécessité la réalisation de Soki

Queen Etémé :
De la préparation à la réalisation, j’ai mis quatre ans. Pourquoi si longtemps ? Parce qu’après toutes ces années d’expérience auprès de ceux que j’ai accompagnés, j’avais besoin de faire une synthèse pour pouvoir trouver mon propre style. Il fallait également que je trouve les bons partenaires et collaborateurs pour faire ce premier disque.

Afrik : Que signifie le mot « Soki » ?

Queen Etémé :
Soki, signifie « Et si » en lingala. « Et si » une chanson pouvait permettre aux gens de s’aimer. C’est un titre que je trouve bien puisqu’il interpelle l’auditeur sans être forcément moralisateur.

Afrik : Vous avez longtemps été choriste. Aviez-vous quelques appréhensions la première fois que vous vous êtes produite seule ?

Queen Etémé :
Je n’avais pas d’appréhension puisque j’ai toujours fait de la scène, même si je n’étais que choriste. Le souci du professionnalisme est toujours là. Je suis une artiste de scène. C’est un endroit où je me sens bien, car c’est là que je vais vraiment à la rencontre du public.

Afrik : En tant qu’artiste de scène, avez-vous du mal à travailler en studio ?

Queen Etémé :
Pas du tout. Si je me définis comme une artiste de scène, j’ai également beaucoup travaillé en studio, comme avec Geoffrey Oryema, et je continue d’ailleurs à poser ma voix sur certains albums où on me sollicite. La scène et le studio sont pour moi indissociables et complémentaires.

Afrik : Vous êtes alto mais vous pouvez passer de la basse au soprano. Est-ce le fruit d’un long travail ou un atout naturel ?

Queen Etémé :
J’avais déjà une voix très développée, mais j’ai continué à la travailler avec un professeur de chant qui s’appelle Eric Tavelli (il a entre autres fait travailler les artistes françaises Laam, Zazie, Assia… ndlr). Cela nécessite beaucoup de travail. Il faut surtout savoir se servir de sa voix et maîtriser les techniques vocales. Ne serait-ce pour ne pas se faire mal parce que c’est un instrument précieux.

Afrik : Par rapport à vos parents, vous a-t-il été difficile d’embrasser une carrière artistique étant donné la mauvaise réputation du milieu chez les Africains ?

Queen Etémé :
Mes parents ont eu très peur. Ils considéraient que la musique n’était pas un métier. A raison d’ailleurs, parce qu’il y a très peu de musiciens qui vivent de leurs musiques. Il y a beaucoup d’appelés et peu d’élus. Pour ma part, comme c’est une passion, je ne peux pas faire autrement, c’est ma raison de vivre et je ne peux tout simplement pas m’en passer. Il a tout de même fallu que j’aille au bout de mes études pour pouvoir convaincre mes parents que je pouvais enfin commencer à faire de la musique.

Afrik : Vous avez grandi en France. Comment gardez-vous un lien étroit avec le continent ?

Queen Etémé :
Même si j’ai grandi en France, je suis née en Afrique et je la garde dans mon cœur et dans mon être. Je chante d’ailleurs en plusieurs langues du continent : lingala (Congo, ndlr), bassa, eton et douala (langues camerounaises, ndlr). Outre le fait que je chante en français et en anglais.

Afrik : Qu’auriez-vous fait si vous n’aviez pas pu faire de la musique ?

Queen Etémé :
Je pense que j’aurai travaillé dans le domaine social. Educatrice. Ou alors je me serais occupée d’enfants.

 Queen Etémé, Soki, distrib. Next Music, 2004

 Pour acheter le disque

Queen Etémé se produit, ce mardi, à l’occasion d’un concert événement au Club Méd World à Paris. 39, cour St Emilion. Métro : cour St Emilion. Réservation au 0810 810 410.

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