Qui sera le prochain président ?


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Ils sont cinq à vouloir accéder à la magistrature suprême en Mauritanie. Qui du Président sortant, Maaouiya Ould Sid’Ahmed Taya, du leader de l’opposition, de l’opposant historique, de la première femme candidate ou du digne représentant des Harratines (anciens esclaves) deviendra le prochain président mauritanien ? Réponse le 7 novembre prochain.

Cinq candidats sont en lice pour les prochaines élections présidentielles mauritaniennes qui se tiendront le 7 novembre prochain. La campagne, qui a démarré le 22 octobre dernier et s’achève ce mercredi à minuit, aura été marquée par la volonté de changement émanant des partis d’opposition. Ce sont les troisièmes élections présidentielles depuis le changement de la constitution en 1991. « Un changement au sommet, avec plus de démocratie et moins de corruption dans le gouvernement », rapporte Irinnews. Le Président sortant, Maaouiya Ould Sid’Ahmed Taya, sera confronté à quatre challengers pour le premier tour de cette élection qui se tiendra vendredi.

Changement et transparence

Le plus important est Mohamed Khouna Ould Haidalla. Colonel à la retraite de 72 ans, il a été Président de la Mauritanie de 1980 à 1984, date à laquelle il a été renversé par son Premier ministre d’alors et compagnon d’armes, le général Ould Taya. Il est à la tête d’une large coalition composée de réformistes libéraux et de radicaux musulmans. Un courant contre lequel se bat le régime actuel qui a arrêté plusieurs imams. Des fidèles de Ould Taya ont également rejoint le camp de M. Ould Haidalla. Autre challenger : l’opposant historique, candidat du Rassemblement des forces du progrès (RFD), Ahmed Ould Daddah, demi-frère du défunt Président mauritanien, Moktar Ould Daddah. Candidat malheureux des élections de 1992, au cours desquelles, il a récolté deux-tiers des votes. Ahmed Ould Daddah a le soutien de la « petite classe moyenne» mauritanienne.

Le dernier opposant majeur, c’est Messaoud Ould Boulkeir, 70 ans, issu de la communauté noire « harratine » de Mauritanie. Il porte les espoirs d’une frange importante de la population mauritanienne. Les Harratines étaient les esclaves des Bidanes (population blanche maure majoritairement représentée dans cette élection) avant l’abolition officielle de l’esclavage en 1981. Nombreux et pauvres, ils aspirent à une meilleure représentation dans les hautes sphères de l’Etat. Orateur éloquent, le leader harratine s’est présenté comme « le candidat du peuple qui sent et a compris » les plus démunis, a choisi de s’exprimer dans les dialectes populaires locaux. Ceci a contrario de ses concurrents qui font campagne en arabe, langue officielle du pays. A côté de ces trois figures majeures de l’opposition, notons la candidature de l’unique femme de ce scrutin, Aicha Mint Jiddana. C’est la première femme, en Mauritanie et voire dans le monde arabe, à se présenter à une élection présidentielle.

Bientôt l’alternance ?

Aicha Mint Jiddana est une transfuge du Parti Républicain Démocratique et Social (PRDS), parti au pouvoir, et une ancienne conseillère municipale de Kiffa, sa ville natale. La femme d’affaires de 43 ans devrait récolter les voix des femmes et celles des tribus du Tarza et de l’Assaba (centre-sud). Le président du Parti Mauritanien du Renouvellement et de la Concorde (PMRC), Moulay El Haceb Ould Jiyid, est le dernier candidat en lice. Cet ancien ingénieur est le maire de Zouerate, ville minière (fer) du Nord de la Mauritanie.

Selon les observateurs, l’alternance pour les six prochaines années à venir (durée du mandat) serait possible puisque les élections pourront difficilement être truquées comme en 1992 et 1997. Notamment grâce à de nouvelles procédures de votes plus rigoureuses. De plus, de nouvelles cartes d’électeurs ont été données lors des précédentes élections parlementaires et législatives (2001). La liste des 1,1 millions d’électeurs a été publiée sur Internet et, enfin, les urnes seront transparentes dans les 1900 bureaux de vote prévus vendredi prochain. Autre raison, la main-mise du général-Président semble s’être assouplie depuis le coup d’état manqué de juin dernier perpétré par des rebelles issus de l’armée.

Fin de campagne houleuse

Bémols cependant. Le gouvernement a interdit aux organisations de la société civile de former un observatoire indépendant pour contrôler le scrutin et n’a pas souhaité la présence d’observateurs étrangers. Disposition qui a suscité la crainte des trois principaux leaders de l’opposition s’exprimant dans un communiqué conjoint à la fin du mois de septembre. Comme pour confirmer leurs inquiétudes, la campagne se termine en pleins rebondissements. L’un des derniers en date a été l’arrestation, ce mercredi, du deuxième fils de Mohamed Khouna Ould Haidalla, Sidi Mohamed Ould Haidalla aux même motifs que son frère aîné, arrêté mardi dernier. La police mauritanienne a reproché à Sid’Ahmed Ould Haidalla dit « Bazra » de « s’adonner à des actes d’intimidation et de menace dans le but de porter atteinte à la tranquillité et à la sécurité publique ». De même, ce mercredi matin, une marche de soutien organisée par l’opposition en soutien à Mohamed Khouna Ould Haidalla, dont la maison a été perquisitionnée lundi par la police, a été dispersée.

Une manœuvre jugée provocatrice dans le camp de l’opposant. Outre ces incidents, des lapidations ont été orchestrées par des fidèles du Président Ould Taya. Ce dernier a d’ailleurs accusé, ce mercredi, le clan de l’ex-président Mohamed Khouna Ould Haidalla de préparer un coup d’Etat. Le vainqueur du scrutin de vendredi prochain devra gérer un pays à la fois rongé par des rivalités de clans et des conflits ethniques tout en luttant contre la pauvreté croissante. Si toutefois, aucun des candidats n’atteignait le quorum de 50%, un deuxième tour aura lieu deux semaines plus tard. La Mauritanie, pays désertique dont l’islam est la religion d’Etat depuis 1991, est sujette à une insécurité alimentaire chronique. Elle compte 2,5 millions d’habitants et son économie repose sur la pêche et l’exportation de minerais de fer. Mais les espoirs du pays se tournent désormais ver l’or noir dont l’exploitation a été initiée en 2001.

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