Qu’est-ce que l’Afrique peut attendre du nouveau pouvoir socialiste français ?


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L’élection de François Hollande à la présidence de la République française a suscité beaucoup d’espoirs, tant au niveau national qu’international. En France, ces espérances sont plus que justifiées dans un contexte économique et social très difficile et dont les issues restent pour l’instant complètement incertaines. Cette situation pourrait en partie expliquer la chute de Nicolas Sarkozy qui a vite compris que ses chances d’effectuer un second mandat étaient limitées.

Après les moments d’euphorie et d’exaltation, viendront très rapidement ceux des réalités qui risquent d’être très douloureuses par ses lots de déceptions et de désillusions, tant les attentes sont grandes et parfois même, décalées par rapport à la réalité. Les dossiers de suppression de milliers d’emplois, mis en stand by pendant la période électorale sont déjà d’actualité et assombrissent l’horizon politique et social du président élu. La victoire de François Hollande a été également fêtée en dehors de la France, notamment sur le continent africain, où le discours du président Sarkozy à Dakar, le 26 juillet 2007 avait été vécu comme une provocation inutile, et pour certains, comme une agression. Pour Nicolas Sarkozy, « le drame de l’Afrique (…), c’est qu’il n’y a pas de place ni pour l’aventure humaine, ni pour l’idée de progrès. Le problème de l’Afrique, ce n’est pas de s’inventer un passé plus ou moins mythique pour s’aider à supporter le présent mais de s’inventer un avenir avec des moyens qui lui soient propres, etc ». Chacun appréciera.

Après cette victoire de François Hollande, plusieurs drapeaux étrangers, notamment algériens, tunisiens, marocains et bien sûr ivoiriens flottaient sur la place de la Bastille à Paris, créant de fait un malaise au sein du Parti socialiste français, mais surtout dans une grande partie de la communauté française, choquée par cette intrusion au goût douteux. Ces drapeaux hissés, sur cette place hautement symbolique de la révolution française de 1789 par des personnes d’origine africaine pour la plupart, étaient aussi agressifs aux regards que le discours de Nicolas Sarkozy à Dakar. On imagine très mal des drapeaux français sur la place de la République à Abidjan, en pleine victoire du candidat PDCI, RDR ou encore moins FPI. C’est une question de bon sens et d’éducation politique et démocratique. En Côte d’Ivoire par exemple, la victoire du socialiste François Hollande a été célébrée dans l’allégresse et la joie, avec sans doute de très gros espoirs de voir la politique française s’infléchir en faveur de l’ancien pouvoir ivoirien. Certains rêvent même de voir le nouveau président faire libérer Laurent Gbagbo, qu’il a contribué à faire exclure de l’Internationale socialiste et en affirmant publiquement que « Laurent Gbagbo était infréquentable ». Dans ces circonstances, on voit mal François Hollande devenir soudainement amnésique alors qu’il a voté et soutenu la résolution de l’Assemblée nationale française relative à l’intervention militaire française en Côte d’Ivoire, sous mandat de l’Organisation des Nations unies pour faire respecter la volonté du peuple ivoirien lors de la dernière élection présidentielle.

Le réalisme politique nous oblige à constater que François Hollande a été élu par le peuple français, dont il tient sa légitimité et à qui il a des comptes à rendre. Il est également contraint par la Constitution de s’inscrire dans la continuité de l’État dans l’intérêt de la France. Le général de Gaulle disait, « la France n’a ni amis, ni ennemis, elle n’a que des intérêts à défendre ». Alors, compte tenu des difficultés actuelles de la France, de l’état de ses caisses qui sont de plus en plus vides, elle n’a plus les moyens d’aider l’Afrique à travers sa politique de coopération d’aide au développement. De fait, l’Afrique ne doit rien attendre de ce nouveau pouvoir français, elle doit compter sur elle-même pour exister. Avec les richesses que détiennent les Etats africains, c’est à eux d’établir un rapport de force intelligent et subtil afin d’obtenir les moyens de développement de leurs pays en instaurant la démocratie.

En politique, tout s’arrache avec force en s’imposant à l’autre comme l’ont si bien fait les pays émergents des BRICs (Brésil, Russie, Inde, Chine). Personne ne fait de cadeaux à qui que ce soit, seuls les intérêts priment. Avec le recul, on peut quand même se demander si le discours de Dakar de Nicolas Sarkozy, en dépit de la violence des propos, n’a pas un fond de vérité qui peut heurter les sensibilités et interpeler les consciences ?

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