Pékin ouvre grand ses portes aux exportations africaines : vers un nouveau tournant du partenariat Chine-Afrique


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Xi Jinping et les chefs d'Etat africains
Xi Jinping et les chefs d'Etat africains

La quatrième édition de l’exposition économique et commerciale Chine-Afrique, qui s’est tenue à Changsha le 12 juin 2025, a été marquée par une annonce d’envergure de la part de Pékin : la suppression des droits de douane sur les exportations en provenance de 53 pays africains. Cette mesure vise à renforcer les échanges commerciaux tout en réduisant les déséquilibres économiques entre les deux partenaires.

Un geste stratégique dans un climat commercial tendu

Jusqu’à présent, seuls 33 pays africains, classés parmi les moins avancés, bénéficiaient de l’exonération sur les droits de douane. Désormais, l’initiative inclura également les pays à revenu intermédiaire, élargissant ainsi l’éventail des bénéficiaires. Une seule nation reste exclue de ce dispositif : l’Eswatini, ex-Swaziland, en raison de sa reconnaissance diplomatique de Taïwan, ce qui contrevient à la doctrine de Pékin sur la politique d’une seule Chine.

Cette décision intervient au moment où la Chine fait preuve d’ouverture économique envers le continent africain, alors que, dans le même temps, les États-Unis, eux, viennent de durcir leur position commerciale en imposant jusqu’à 50% de droits de douane sur certains produits africains. Ce contraste met en relief une stratégie chinoise claire : séduire les nations africaines par des gestes concrets, tout en se positionnant comme une alternative commerciale crédible face aux puissances occidentales.

Réduire un déséquilibre de 62 milliards de dollars

Le principal objectif affiché par Pékin est de dynamiser les exportations africaines vers la Chine. Cette mesure pourrait avoir un impact immédiat pour des économies industrielles comme le Nigeria, l’Afrique du Sud, le Kenya, l’Égypte ou encore le Maroc, qui cherchent à diversifier leurs débouchés commerciaux et à renforcer leur présence sur les marchés asiatiques.

Mais cette ouverture commerciale ne répond pas seulement à un impératif de solidarité : elle vise également à corriger un déséquilibre commercial criant. Actuellement, la Chine affiche un excédent de 62 milliards de dollars dans ses échanges avec le continent africain. En facilitant l’accès des produits africains au marché chinois, Pékin espère rétablir un certain équilibre et apaiser les critiques sur la nature déséquilibrée de son commerce avec l’Afrique.

Un accompagnement pour les pays les plus vulnérables

Consciente que certains pays africains risqueraient d’être marginalisés dans cette ouverture, la Chine s’engage à accompagner les économies les plus fragiles, telles que le Mali ou la Tanzanie. Des programmes de soutien technique et logistique seront mis en place : formations pour les producteurs, aide à la certification, soutien au marketing, infrastructures douanières modernisées… L’idée est de garantir une inclusion maximale, même pour les pays qui ne disposent pas encore de capacités industrielles importantes.

Au-delà de l’économie, à travers cette initiative, Pékin entend renforcer la coopération Sud-Sud en approfondissant son concept de « communauté de destin Chine-Afrique ». Cette expression, fréquemment utilisée par le Président Xi Jinping, désigne une vision à long terme où la Chine et l’Afrique construisent ensemble un avenir commun basé sur la solidarité, le respect mutuel et le développement partagé. Un pacte économique élargi serait en cours de discussion, intégrant à la fois des accords commerciaux, des projets d’infrastructures, des partenariats en matière de formation, ainsi que des échanges humains et culturels accrus.

Une politique cohérente avec les précédents accords bilatéraux

Cette décision s’inscrit dans la continuité d’accords bilatéraux déjà signés entre la Chine et plusieurs pays africains au cours des dernières années. Par exemple, en 2021, la Chine et le Rwanda avaient signé un accord de libre-échange permettant aux produits agricoles rwandais d’accéder au marché chinois sans droits de douane, ce qui a fortement stimulé les exportations de café et de thé.

En 2022, un partenariat similaire avait été établi avec l’Éthiopie, incluant non seulement des avantages douaniers, mais aussi un important soutien logistique pour faciliter l’exportation de produits textiles. Le Ghana, de son côté, a bénéficié, en 2023, d’un programme de facilitation douanière pour ses produits cacaoyers, en échange de l’ouverture de certains secteurs miniers aux entreprises chinoises.

Le cas du Sénégal et du Zimbabwe

Le Sénégal a également été au cœur d’un accord important, en 2024, avec l’entrée en vigueur d’un programme d’exportation préférentielle vers la Chine couvrant des produits halieutiques, agricoles et artisanaux. Ce partenariat a été accompagné d’un soutien technique pour améliorer les normes de qualité des produits sénégalais destinés au marché asiatique.

Quant au Zimbabwe, il a signé un protocole d’entente avec Pékin visant à développer l’exportation de minerais rares vers la Chine. En contrepartie, le pays a bénéficié d’investissements chinois dans la réhabilitation de son réseau ferroviaire, facilitant ainsi les échanges régionaux.

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Une plume qui balance entre le Sénégal et le Mali, deux voisins en Afrique de l’Ouest qui ont des liens économiques étroits
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