Quand épilation rime avec tradition…


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L’épilation intégrale du maillot est plus répandue qu’on ne le pense. Alors qu’elle est devenue à la mode dans certains pays occidentaux, comme en France, elle fait partie des prescriptions religieuses de l’islam. De nombreux hommes et femmes la pratiquent de façon traditionnelle dans les pays arabes et musulmans.

Côté épilation du maillot, on connaît le « ticket de métro » (une bande étroite, des côtés nets et rien qui dépasse) ou encore le « brésilien » (une bande mince et un petit triangle devant)… Depuis quelques années, la mode est à « l’intégrale », aussi bien chez les femmes que chez les hommes. « C’est notre spécialité », explique une esthéticienne de la chaîne parisienne Estetika. « L’intégrale est très demandée, nous en faisons en moyenne dix par jour. Nous utilisons de la cire basse température qui est, avec la cire orientale, la seule technique supportable pour cet endroit sensible du corps. Nous avons des clients de tous horizons et de tous âges qui viennent pour ce service. »

Une mode récente en France, pourtant pratiquée traditionnellement dans les pays arabes et musulmans depuis fort longtemps… Les spécialistes estiment que l’épilation au sucre est née en Egypte au temps des Pharaons, mais la cire orientale, qui permet une épilation intégrale relativement douce, est surtout appliquée pour répondre… à une prescription religieuse ! En effet, l’islam enseigne des règles d’hygiène, contenues notamment dans les hadiths (actes ou paroles du prophète). Ainsi Mahomet a dit : « Cinq [normes] appartiennent à la fitrah (nature innée de l’Homme, ndlr) : le rasage du pubis, la circoncision, la coupe des moustaches, l’épilation des aisselles et la taille des ongles ».

Religion et hygiène

Ou bien encore : « Dix choses font partie de [ce que l’être humain fait par] prédisposition naturelle : se tailler les moustaches, garder la barbe, se brosser les dents, se rincer les narines, se tailler les ongles, se laver les articulations des doigts, s’enlever la pilosité des aisselles, se raser la pilosité du pubis, utiliser l’eau après fait ses besoins et se rincer la bouche ».

« Se raser la pilosité du pubis » s’applique aux femmes et aux hommes et « il ne faut pas laisser 40 jours s’écouler sans l’avoir fait », précise un hadith. « Veiller à ne pas avoir de poils pubiens est une recommandation religieuse mais aussi une hygiène de vie », précise Amine, jeune Sénégalais musulman de 32 ans né à Dakar et vivant en France. « Si je ne me rase pas le pubis et les aisselles, je ne me sens pas bien. J’ai commencé à le faire à 16 ans, après avoir lu les hadiths. Je le fais tous les 40 jours avec une tondeuse spéciale que je ne réserve qu’à cet usage. J’ai une peau très sensible mais je n’ai jamais eu de problème de rasage. C’est devenu une habitude. C’est un précepte religieux mais une fois qu’on a essayé, on se rend compte des avantages hygiéniques. »

Culture traditionnelle

Mohammed H. Benkheira, professeur à l’université de Rouen, explique dans son étude, « Le visage de la femme. Entre la shari’a et la coutume », réalisée en Algérie, que, « dans la culture traditionnelle, il est d’usage pour la femme de s’épiler la totalité du corps, notamment pour sa nuit de noces. La beauté féminine dans ce cas coïncide avec un corps dénué de toute pilosité à l’exception des cheveux, qui doivent rester longs, et des sourcils considérablement amincis. » Aujourd’hui, l’épilation intégrale du maillot est une réalité pour de nombreuses jeunes filles maghrébines ou d’origine maghrébine. Ce n’est pas forcément la religion qui les pousse à s’épiler mais plutôt une tradition transmise de mères en filles. « Je m’épile le maillot intégralement tous les mois et ce, depuis mes 14 ans », explique Linda, 30 ans, qui vit à Alger.

« C’est ma mère qui m’a initiée et la plupart des femmes de ma famille le font. J’ai commencé à me faire épiler au hammam, ça fait partie du rituel de nettoyage et de décrassage complet ! Ce n’est pas une question de suivre la religion, car je ne suis pas pratiquante. C’est juste que je ne supporte pas d’avoir des poils pubiens, lorsqu’ils repoussent je me sens sale ! Pour moi, c’est une question d’hygiène, surtout l’été, avec la chaleur, lorsqu’on transpire. Je préfère être nette à cet endroit… »

Du bon usage de la cire orientale

La jeune femme explique qu’elle prend rendez-vous chez une amie esthéticienne : « La cire au miel, c’est ce qu’il y a de mieux : les poils repoussent moins vite et plus fins. Il m’est arrivé de faire n’importe quoi quand j’étais plus jeune, notamment avec un rasoir… l’horreur ! La repousse était douloureuse : ça gratte, ça irrite et ça peut même faire de petits boutons… »

La cire orientale est une sorte de caramel, mélange de sucre (ou de miel), d’eau et de citron. On en fait une boule qui sera roulée sur les zones à épiler avec rapidité et dextérité par les esthéticiennes. « La méthode a de nombreux avantages », explique Samia, esthéticienne à domicile d’origine marocaine, qui travaille à Paris. « La cire agit comme un exfoliant : elle élimine les cellules mortes. Le miel permet d’adoucir la peau et le citron désinfecte… C’est un vrai produit de beauté ! » Que ce soit pour des raisons religieuses, esthétiques, hygiéniques ou même érotiques, l’épilation est une pratique quasiment universelle. Et « l’intégrale » a de plus en plus de défenseurs farouches !

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