
Au Nigeria, une crise humanitaire sévère est en cours : 31 millions de personnes souffrent de malnutrition.
Le Nigeria, géant démographique d’Afrique, fait face à une crise humanitaire sans précédent. Dans un contexte de violences jihadistes persistantes, de hausse vertigineuse du coût de la vie et de retrait massif de l’aide internationale, près de 31 millions de personnes souffrent aujourd’hui de malnutrition sévère. Le nord-est du pays, en proie à l’insécurité et aux déplacements massifs de populations, est à l’épicentre de cette catastrophe silencieuse.
Un pays à genoux face à la faim
Jamais le Nigeria n’avait enregistré un tel niveau de malnutrition. Selon le Programme alimentaire mondial (PAM), près de 31 millions de Nigérians sont en situation d’urgence alimentaire. Dans les États les plus touchés (Borno, Yobe et Adamawa), la situation est alarmante : près de 5 millions de personnes y souffrent de malnutrition aiguë sévère. La ville de Damboa, jadis poumon agricole du nord-est, est devenue aujourd’hui un bastion de la survie, encerclée par la violence et vidée de son potentiel agricole.
Le PAM tire la sonnette d’alarme : 150 centres de nutrition doivent fermer à la fin du mois de juillet, faute de financements. Une décision qui menace directement environ 300 000 enfants, selon les experts humanitaires. Les stocks sont vides, les rations sont devenues symboliques, et des familles entières survivent désormais avec un sac de riz comme unique source de nourriture. Pour Chi Lael, porte-parole du PAM au Nigeria, « des vies seront perdues dans les semaines à venir ».
Quand la guerre empêche de cultiver
L’insécurité a transformé les terres agricoles en zones interdites. À Damboa, des hectares de champs sont abandonnés, des agriculteurs tués, des familles déplacées. Même la route Maiduguri-Mafa est quadrillée de milices armées pour sécuriser les quelques cultivateurs qui osent sortir. Le cycle des récoltes est brisé. La « saison de soudure », entre les semailles et les récoltes, est devenue un gouffre de privations pour des millions de personnes, sans aucune réserve et sans revenu.
La crise humanitaire est aggravée par la réduction drastique de l’aide internationale, notamment américaine. Le retrait de l’USAID, conséquence d’une politique de désengagement initiée sous l’administration Trump, a laissé un vide immense. Les sacs de riz estampillés USAID, visibles dans les entrepôts, sont les derniers d’une époque qui s’achève brutalement. L’avenir est incertain, et les mécanismes de survie des populations deviennent de plus en plus dangereux.
Une bombe à retardement régionale
Pour les responsables humanitaires, la situation dépasse la simple urgence alimentaire. Le Dr John Ala, responsable nutrition au PAM, prévient : « Ce n’est plus seulement une crise humanitaire, c’est une menace pour la stabilité régionale. » Car la faim alimente l’extrémisme, le banditisme, les migrations forcées et la radicalisation.