Maroc : un hub pour l’Afrique ?


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Étant la deuxième zone géographique la plus dynamique en termes de croissance après l’Asie, et ayant un marché dont la croissance est estimée à plus de 300 milliards d’euros par an d’ici 2020, l’Afrique est plus que jamais l’objet de toutes les convoitises. Le Royaume chérifien peut-il en profiter ?

L’on peut affirmer que c’est en cours ! Les échanges commerciaux entre le Maroc et l’Afrique subsaharienne ont triplé entre 2000 et 2010, grâce à une diplomatie économique pragmatique amorcée depuis la fin des années 90, pour sortir le Maroc de son isolement africain depuis son départ de l’UOA en 1984 suite à l’intégration du Polisario.

Ainsi, en 2000, le Roi Mohammed VI a annulé la dette des pays les moins avancés (PMA) d’Afrique subsaharienne, a exonéré leurs produits de droits de douane à l’entrée du marché marocain, et a signé en 2004 avec plusieurs États (Bénin, Cameroun, Gabon, Niger et Sénégal) des conventions portant sur la « non-double imposition » et encourageant les investissements. De ce fait, le Maroc est devenu le second investisseur africain dans le continent noir après l’Afrique du Sud. Mais avec à peine 5 % des exportations du royaume qui se dirigent vers le sud du Sahara, il y a encore de la marge. Pour profiter pleinement du potentiel africain, le Maroc doit devenir un hub régional, courroie de transmission entre l’Afrique et l’Europe. Mais, le peut-il ?

La base et le potentiel sont là. Déjà au XIIème siècle le Maroc servait de carrefour commercial entre l’Europe et l’Afrique, avec l’avènement des Almohades et de l’Espagne musulmane, une grande voie de commerce reliait le sud de l’Europe au Niger, via le Maroc. Par ailleurs, le Maroc est aussi le seul pays du Maghreb à avoir eu des relations commerciales depuis des siècles avec l’Afrique subsaharienne, notamment via les routes commerciales partant de Sijilmassa au Tafilalet vers le sud de l’actuelle Mauritanie et allant jusqu’au au Ghana.
En plus de ce lien historique, le Maroc dispose de certains atouts lui permettant de prétendre à ce rôle régional. En effet, le Maroc a tissé un partenariat privilégié avec les pays européens à travers l’accord de libre-échange et le statut avancé, ce qui constitue un tremplin pour les investisseurs africains désireux de conquérir les marchés européens en partant de la plate-forme marocaine.

Ensuite, l’expertise marocaine commence à être reconnue en Afrique au regard de son bon rapport qualité-prix, notamment dans les domaines bancaire, des infrastructures, de l’Agro-alimentaire, l’exploitation minière, etc. Enfin, de par sa position géostratégique à la fois porte d’Afrique et d’Europe, le Maroc dispose de son port Tanger Med se situant sur la seconde voie maritime la plus fréquentée au monde, à savoir le détroit de Gibraltar qui représente 20% du trafic mondial de conteneurs.

Toutefois, pour prétendre devenir un hub régional, il faut être un carrefour commercial et financier compétitif. Or, ce n’est pas encore le cas puisque le coût de la logistique au Maroc est l’un des plus élevés au monde, soit 20% du PIB, un taux supérieur au 10% des pays européens et au 15% et 17%, du Brésil et de la Chine.Par conséquent, il faut agir sur les différents maillons de la chaine logistique du passage de la frontière jusqu’à la gestion des stocks en passant par la gestion documentaire, le dédouanement et le transport local, point noir de la logistique marocaine.

De la même manière, l’accélération des réformes financières permettrait de faire du Maroc un hub financier régional, capable de drainer les capitaux étrangers pour les canaliser vers les terres africaines. Casablanca Finance City a certainement une carte à jouer en se focalisant sur toute la partie « Grand Nord-Ouest » du continent.
Parallèlement, le Maroc doit accélérer la conclusion d’accords de libre-échange avec les blocs régionaux africains pour favoriser une intégration économique régionale dont il serait à la fois le moteur et la passerelle vers l’Union européenne. Bref, devenir un hub pour l’Afrique exige un environnement des affaires favorable à la circulation des personnes, des biens et services, mais aussi des capitaux.

Avec cette intégration régionale, le Maroc pourrait faire d’une pierre deux coups : d’une part, relancer sa croissance économique en réhabilitant son rôle de plaque tournante du commerce entre l’Afrique et l’Europe, et d’autre part, grignoter de nouveaux soutiens à son intégrité territoriale auprès de ses nouveaux partenaires économiques. C’est bien connu : la fortification des liens économiques facilite le rapprochement politique.

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