Les routes sont des facteurs de développement


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Un séjour à Dakar de nos jours ne permet pas d’imaginer qu’il existe une autorité de régulation des transports. Pourtant elle travaille à rationaliser l’organisation des transporteurs pour mieux répondre aux besoins de déplacements des habitants.

Par Florence Le Nulzec, consultante

Les routes sont des facteurs de développement. Né en 1997, le (CETUD) est l’aînée des autorités organisatrices des transports en Afrique. Elle rassemble, aux cotés de l’Etat, la région et les quatre principales communes de Dakar, les représentants des transporteurs, structurés et informels, et deux représentants désignés sur leurs compétences. Le CETUD conçoit le réseau, planifie le système global de transports urbain, définit l’offre et négocie avec les opérateurs sur leur prestation, les tarifs, les compensations relatives aux contraintes imposées par les pouvoirs publics. Elle assure également un accompagnement des opérateurs informels dans leur professionnalisation. A l’occasion d’une cession spéciale d’Africités sur la mobilité et les transports, son président, Monsieur Ousmane Thiam, a présenté l’expérience de cette organisation. En privé, il nous a apporté quelques précisions.

Afrik.com : Les transports publics ont un coût important qui ne peut être répercuté intégralement sur les usagers, notamment les plus pauvres. Quels mécanismes financiers mettez-vous en place pour en permettre l’accès à tous ?

Ousmane Thiam :
L’Etat subventionne les opérateurs qui répondent aux exigences pour leur permettre de faire face à une situation difficile d’équilibre financier nécessaire. Le principe est celui du « demandeur-payeur », c’est donc à l’Etat qui demande une desserte de payer la différence entre le tarif d’équilibre financier et le coût négocié avec l’opérateur. A charge pour nous (CETUD, ndlr) de vérifier la régularité du service. Sur ce principe, si une collectivité ou une entreprise devient prescripteur, elle peut être amenée à contribuer au financement. Cela pourrait être le cas des collectivités locales à l’occasion d’un transfert de la compétence transport, transfert qui n’a pas été jugé prioritaire à l’occasion du dernier renforcement de la décentralisation en 1996.

Afrik.com : Vous avez également souligné lors des cessions que le développement des transports est un facteur de développement économique. Comment ?

Ousmane Thiam :
Le développement, c’est d’abord la croissance, c’est-à-dire l’intensification des échanges, donc des déplacements, donc des transports. Encore qu’avec l’Internet aujourd’hui, on a de moins en moins besoin de se déplacer. D’ailleurs l’un des facteurs limitant dans le développement de la compétitivité des économies nationales et sous-régionales de l’Afrique, ce sont les transports. Maintenant, en rendant accessibles des zones déshéritées, on donne l’opportunité à certaines personnes d’accéder à l’emploi. Et les investissements réalisés sont eux-mêmes créateurs d’emplois.

Afrik.com : Vous avez également parlé de « rendre plus noble et sécurisante la marche à pied ». Pouvez-vous préciser votre propos ?

Ousmane Thiam :
On n’avait pas pris conscience de l’importance de la marche à pied. Une enquête ménage réalisée en 2000 nous a montré que, sur 4 déplacements, au moins 3 se faisaient à pied. Or, en matière d’aménagement, nous n’avons pas pensé aux piétons : il n’y a pas de trottoirs. S’il y en a ils sont étroits, souvent pris d’assaut par les commerces, si ce n’est par les véhicules.

Afrik.com : Comment peut-on y remédier ?

Ousmane Thiam :
Tout d’abord en informant et en sensibilisant. Que les populations sachent quelles sont les fonctions de différentes composantes d’une infrastructure routière. Que la population sache que la chaussée, ce n’est pas pour les piétons mais pour les véhicules et les deux roues ; que les automobilistes et les commerçants sachent que les trottoirs c’est pour les piétons, c’est pour la marche. Peut-être qu’on peut aménager et dédier aux commerces une partie des trottoirs, mais sans constituer un obstacle à la marche en toute sécurité des piétons.

Afrik.com : Comment voyez-vous la perspective des transports en Afrique ?

Ousmane Thiam :
Il y a des problèmes internes au pays, mais également des problèmes de liaisons entre les pays. Les relations internationales, au plan ferroviaire et routier, étaient traitées en parent pauvre. Avec le NEPAD, l’idée est d’assurer ces grandes liaisons pour permettre aux populations africaines de se déplacer d’un pays à un autre. C’est une vision qui est salutaire. Cela va signifier pour nous, l’Union Africaine des Transports Publics [<*>L’Union Africaine des Transports Publics a été créée le 15 novembre 2002. Ousmane Thiam en est le vice-président.]] ([UATP) la nécessité de préparer les opérateurs à s’organiser au-delà du déplacement à l’intérieur de nos propres territoires. Il y a un travail intéressant à faire au niveau sous-régional voir régional. Il faut également mieux entretenir et densifier les infrastructures, notamment par rapport à l’étalement urbain. Mais aujourd’hui les partenaires du développement comme les pouvoirs publics sont conscients que sans les transports il est difficile d’avancer.

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