Le Port d’Abidjan prend l’eau


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L’instabilité grandissante de la Côte-d’Ivoire, pays en crise depuis septembre 2002, frappe de plus en plus le secteur maritime. Le Port autonome d’Abidjan fait état d’une importante baisse de 14,5% de son trafic entre 2004 et 2005. Les reculs de 4,8% en 2002, de 5,5 % en 2003 et de 5% en 2004 n’étaient que les prémices d’une tendance qui s’affirme.

Par Morad Ouasti

Le Port autonome d’Abidjan (PAA) traverse une grave crise. Alimentée par l’instabilité du pays en dégénérescence depuis septembre 2002 et une concurrence véhémente des ports de la sous-région, la situation s’aggrave pour enregistrer une chute de 14,5%. Le PAA enregistre, ces derniers mois, des résultats médiocres. En août 2005, le trafic des navires était de 1 928 contre 2 256 arrivées, à la même époque l’année dernière.

Pour le directeur des affaires générales maritimes et portuaires, au ministère ivoirien des Transports, Jean Christophe Tibé, le mot « crise » est pourtant excessif. « La baisse n’est que de 16% ! Une baisse de 50% justifierait le mot ‘crise‘ », affirme-t-il. Ce dernier, ajoute que : « de toute manière, le déficit de 16% est grandement compensé par une augmentation de 40% des rentes pétrolières ».

En 2003 et 2004 le trafic des navires avaient déjà subi un recul, respectivement, de 5,5% et de 5%. Diminution des activités économiques nationales, risque pays élevé, augmentation du fret et de l’assurance, transfert des activités de transbordement vers d’autres ports de la sous-région, diminution de la fréquence des escales des armateurs ou suppression des escales directes pour d’autres, les affres dont souffrent les installations portuaires abidjanais sont nombreux.

Le trafic national a lui aussi connu des difficultés. De 2002 à 2004 le pays a enregistré des baisses successives de 13,4%, 4,2% et 3,9%, après avoir connu une hausse de 22,5%, en 2001. Fin août 2005 la baisse était de 10,6%. Le trafic des conteneurs a été très durement touché. Les conteneurs de transbordement ont été frappés d’une chute de 38,5% contre 22% pour le total du trafic.

Le Port autonome d’Abidjan était jadis le véritable poumon économique d’Afrique de l’Ouest. Lieu de transit de 90% des échanges du pays et de la majeure partie des échanges de pays tels que le Mali ou le Burkina Faso. La crise de novembre 2002, est le point de départ de cette impasse économique. Les heurts ont provoqué le départ des personnes ayant un fort pouvoir d’achat, 8 000 Européens dont une majorité de Français. Plusieurs PME/PMI ont fermés, une recrudescence de l’insécurité et la délocalisation de certains services portuaires.

A cela s’ajoute une concurrence aigue des ports ghanéens, togolais ou sénégalais. Ils sont devenus un itinéraire alternatif à la Côte d’Ivoire en matière de commerce extérieure. « C’est à cause du manque de confiance en l’autorité gouvernementale et l’arrière-pays, à l’instabilité notoire du pays, mais aussi pour des causes de carences de fluidité du mouvement routier, des transporteurs sont quotidiennement assujettis aux chekpoints et au rançonnage », explique Jean Christophe Tibé, qui se dit toutefois « serein » quant à l’avenir du PAA. Bien que la décision du report de l’élection présidentielle sine die, prévue originellement le 30 octobre, ait nourri une nouvelle tension politique en Côte d’Ivoire. Les investisseurs ont préféré attendre pour avoir plus de garanties, même si de grosses entreprises, comme Bouygues, viennent de renouveler leurs engagements en Côte-d’Ivoire.

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