
Après des décennies de traversées périlleuses en pirogue ou sur un bac de fortune, le fleuve Logone dispose enfin d’un pont moderne reliant le Cameroun au Tchad. Inauguré en avril 2025, cet ouvrage de 620 mètres incarne une nouvelle approche de l’intégration régionale, où les infrastructures deviennent des catalyseurs de développement économique et social. Retour sur un chantier exemplaire qui transforme déjà la vie de milliers d’habitants.
Chronique d’un chantier devenu symbole d’intégration
- 2014 : Les présidents Paul Biya et Idriss Déby signent, à N’Djamena, un accord par lequel ils s’engagent à doter la zone du Lac Tchad d’un « ouvrage d’art intégrateur ».
- 11 décembre 2017 : La Banque africaine de développement (BAD) approuve 66 M € pour lancer les études détaillées et boucler le tour de table financier.
- 27 février 2020 : Pose de la première pierre à Bongor, en présence d’Idriss Déby et du Premier ministre camerounais Joseph Dion Ngute.
- Pandémie & crues 2021-2023 : Le chantier – confié au groupement Razel-Bec/Sotcocog – accuse 18 mois de retard, le fleuve débordant à deux reprises de son lit.
- 28 avril 2025 : Par 43 °C de chaleur sahélienne, les Premiers ministres des deux pays inaugurent officiellement le deuxième pont transfrontalier du Logone (après celui de Ngueli, Kousseri–N’Djamena).
Fiche d’identité technique
Financement
Pourquoi ce pont transforme la région
- Sécurité & continuité du trafic – Terminé le bac aléatoire ou la pirogue surchargée : les 10 000 véhicules/mois attendus peuvent franchir le Logone 24h/24 toute l’année.
- Commerce régional – 80 % des importations tchadiennes transitent par les ports camerounais ; le nouvel itinéraire raccourcit de 250 km la liaison Bongor-Ngaoundéré par rapport au passage Ngueli-Kousseri.
- Corridor Douala–N’Djamena – Le pont complète les travaux routiers et ferroviaires en cours (330 M € BAD, phase 4 PAST) pour réduire le temps de transport camion port-N’Djamena de 20 à 12 jours à l’horizon 2028.
- Retombées locales immédiates – 500 emplois directs créés, 15 forages d’eau potable, un marché frontalier, un poste de contrôle juxtaposé et un centre de formation professionnelle, dont les marchés ont été attribués le 18 juin 2025.
Une transformation attendue
Pour les riverains, ce pont incarne une rupture avec des décennies de précarité. Marie Béatrice Tikamda, commerçante de Yagoua, résume parfaitement cette révolution du quotidien en confiant à la Banque Africaine de Développement : « Traverser en saison des pluies, c’était jouer sa vie ; aujourd’hui je passe avec ma moto en trois minutes ». Cette transformation radicale des conditions de passage illustre l’impact direct de l’infrastructure sur la vie économique locale.
Côté officiel, le Premier ministre camerounais Joseph Dion Ngute n’hésite pas à voir dans cet ouvrage « une promesse de prospérité », traduisant l’espoir que placent les autorités dans ce nouveau corridor d’échanges transfrontaliers.
Prochaines étapes
- Décembre 2025 : Réception définitive et certification de charge.
- 2026-2027 : electrification de 30 km d’axe routier côté Cameroun (solaire + LED).
- 2027 : Déploiement du guichet unique douanier dématérialisé sur le poste frontalier, connecté à la plateforme e-GUCE du Cameroun et au Sydonia tchadien.