La victoire ultime de « Sweet Sweetback’s Baadasssss » sur ARTE


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Melvin Van Peebles
Melvin Van Peebles

Detroit, le 31 mars 1971. Une foule jeune et noire se presse devant le cinéma Grand Circus, une affluence inhabituelle pour un film indépendant au titre bizarre, «Sweet Sweetback‘s Baadasssss Song». Ébahi et ravi, le public découvre un héros noir en révolte contre une Amérique raciste.

L’histoire que raconte Melvin Van Peebles, réalisateur noir, dont il est l’acteur principal et dont il a composé la musique, est une histoire qui détonne dans l’Amérique blanche et ségrégationniste des années Nixon.

Employé dans une maison close du ghetto de Watts, à Los Angeles, Sweetback a pris la tangente parce qu’il a défendu un Black Panther et assommé les policiers qui l’agressaient. «Le thème du film c’est : vous avez saigné mon père et ma mère, mais vous ne m’aurez pas», résume posément Melvin Van Peebles, dans une chanson fredonnée au fil du film.

 

Sweet Sweetback
Sweet Sweetback

Le documentaire passionnant de Catherine Bernstein et Martine Delumeau, coréalisatrices, accompagne l’aventure de ce film mythique de la communauté noire américaine, qui a brutalement fait sauter toutes les barrières que Hollywood mettait à l’expression des afro-américains. En bousculant tous les tabous, en montrant crûment le sexe, la violence, le racisme et les abus policiers. Le tout dans une grammaire cinématographique explosée, qui fait écho à la liberté formidable de l’auteur-réalisateur-producteur-compositeur-acteur de ce film OVNI.

Merci à ARTE et merci aux Producteurs (13 Prods et Pop Films) d’avoir donné à Melvin Van Peebles l’hommage que méritait cet homme libre aux talents multiples, capable de donner aux afro-américains le premier héros d’un peuple jusque-là rabaissé, caricaturé, limité à n’apparaître que dans des rôles de composition conformes aux stéréotypes réducteurs de l’Amérique blanche régnant sur Hollywood.

Ce que ce documentaire restitue admirablement, c’est la puissance à la fois esthétique et politique d’une œuvre inclassable, qui fut source d’inspiration pour des cinéastes plus jeunes, comme Spike Lee. En accompagnant l’aventure de sa production, sa réalisation, sa distribution, et l’événement fondateur qu’elle constitua, les deux réalisatrices nous font rentrer intelligemment dans la complexité d’un créateur pour qui les mots liberté et indépendance étaient des valeurs suprêmes.

Parce que la création ne connaît pas de demi-mesure ni d’accommodements, et que la liberté est la seule garantie d’une expression originale et authentique.

« Sweet Sweetback Naissance d’un héros noir au cinéma » est à voir mercredi 16 mars sur ARTE à 22h45, et à tout moment ici-même… A voir et à revoir sans limitation.

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