La chute de Mohamed Morsi vue de Tunisie


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Le revers de la médaille est sans appel. Mohamed Morsi a finalement été destitué par l’armée égyptienne, à l’issue de l’ultimatum de 48 heures fixé par cette dernière. Les Tunisiens suivent de près les évènements en Egypte. Après un bref passage mercredi soir chez Kamal et Heba, un couple égyptien, nous avons recueilli, ce jeudi, l’avis de la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme, sur la situation en Egypte et en Tunisie.

Explosion de joie chez Kamal et Heba. Ce couple d’Egyptiens récemment installé en France a suivi, en direct devant la télévision, les informations sur la destitution du Président Morsi. « Je suis très heureux de cette annonce. Morsi a créé la désillusion quelques temps après son élection, il n’était plus légitime pour gouverner notre pays, contrairement à ce qu’il affirmait », confie Kamal. Pendant ce temps, Heba verse des larmes de joie, en voyant ces milliers de personnes rassemblées sur la célèbre Place Tahrir, au Caire, après que l’armée ait annoncé avoir repris le pouvoir. Nous quittons le jeune couple qui avait l’air heureux mais inquiet pour l’avenir…

« Les militaires ont donné le pouvoir aux civils »

A l’instar de la Tunisie, les projets politiques des islamistes au pouvoir n’ont pas convaincu. Morsi en paie aujourd’hui les pots cassés. A ce propos, que pensent les Tunisiens de cette volte-face en Egytpe ? Contacté par Afrik.com, la Ligue tunisienne des Droits de l’Homme (LTDH) affirme soutenir l’action de l’armée et du peuple égyptiens. « La Ligue tunisienne est toujours aux côtés des peuples lorsqu’ils demandent la démocratie, nous sommes toujours à côté de ceux qui sont réprimés », confie Mohamed Salah Kherigi, le responsable des relations médias de la LTDH. « On entend dire qu’il s’agit d’un putsch militaire, mais les militaires ont donné le pouvoir aux civils en destituant Mohamed Morsi », affirme-t-il en précisant que « le despotisme sous la forme religieuse de Morsi était peut-être pire que celui de Moubarak ».

Les soutiens de Morsi crient au complot. Sur les réseaux sociaux, les commentaires en ce sens fusent : « Ce n’est pas une révolution, mais plutôt une confusion totale, car je ne peux pas imaginer qu’un président élu démocratiquement par son peuple, soit destitué à peine un an après. Moi je dis que cette confusion est appuyée de l’extérieur », conteste Moustapha Nakantché sur la page Facebook d’Afrik.com. Carrem Carim est quant à lui plus direct : « Le boss, c’est la Maison blanche ». Ce second souffle contestataire en Egypte peut-il déferler sur la Tunisie ?

« La révolution du Jasmin 2 » en marche ?

Le contexte égyptien est différent de celui de la Tunisie. « La comparaison est difficile », mais selon Kherigi, un embryon de soulèvement en Tunisie commence à renaître. « Nos frères musulmans (Ennahda) vont en tout cas devoir revoir leur tactique et leur politique, c’est certain. Les peuples n’acceptent plus ! », lance Kherigi. En cause, la nouvelle Constitution que le peuple tunisien attend encore et toujours tout comme la tenue de nouvelles élections, dont la date du 12 octobre 2012 n’a pas été respectée.

Toutefois, « on peut en tirer un aspect positif » estime la LTDH. Cela prouve que certains politiques se donnent corps et âme « pour ne pas laisser le Frères musulmans tunisiens imposer leur Constitution ». La LTDH ne s’attend pas, elle non plus, à des élections courant 2013, comme le laisse entendre le pouvoir. Celles-ci devraient avoir lieu courant 2014, d’autant plus que la loi électorale n’a toujours pas été votée. Les Tunisiens, mis parfois en exergue en tant que pionnier du « Printemps arabe » dans les slogans de la rue égyptienne, semblent être solidaires avec les revendications du peuple égyptien.

A la chute de Moubarak, les Egyptiens, épuisés par la répression et la restriction de la liberté d’expression, ont été séduits par le discours de Mohamed Morsi. Très vite, « ils ont compris que les islamistes ne pouvaient pas mener la barque en Egypte », affirme la LTDH.

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