La banlieue toute crue


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Wesh Wesh Qu’est-ce qui se passe ? de Rabah Ameur-Zaïmeche sort le 30 avril sur les écrans. Un autre film sur la banlieue, direz-vous. Mais pas n’importe lequel. Celui-ci n’utilise pas la banlieue pour divertir ou servir un propos. Il la laisse s’exprimer. Dans son désarroi et sa vérité crue.

Un homme fait du stop sur une route de banlieue. Cheveux ras, jean et blouson de cuir, un sac de voyage à la main. Il rentrera à pied. Cet homme, c’est Kamel, qui s’apprête à retrouver sa famille après avoir purgé une double peine. Cinq ans de prison, assortis d’une expulsion vers son pays d’origine, l’Algérie, où il n’a malheureusement rien ni personne à rejoindre. Alors, après deux ans d’exil, il revient chez lui clandestinement. Avec la ferme intention de se réinsérer.

Chez lui ? Monfermeil, Cité des Bosquets. Barres interminables, vitres brisées, halls graffités, des enfants et des adolescents qui s’ennuient, assis sur les marches ou appuyés aux balustrades, quelques voitures de police embusquées. Voilà le décor planté et la porte ouverte à tous les scénarios. Autour des injustices, de la clandestinité, des préjugés, de l’exclusion, de l’ennui… Ou autour des trafics divers, de la violence, des règlements de compte et des affrontements avec la police. On a déjà vu tout cela.

Un militantisme sans discours

Sauf que le film ne choisit aucun de ceux-là. Ou plutôt les traite tous, mais pas comme on l’attendrait, dans la surenchère des images-chocs ou à travers le prisme d’un polar bien ficelé. A tout cela, il préfère l’ellipse, la discrétion. La réalité des choses, pour tout dire.

Car la réalité n’entre pas dans la logique haletante du polar. Elle est plutôt dans un temps qui s’étire en longueur au gré des démarches infructueuses et des errances affectives de Kamel. Ou dans les hasards qui remplissent la vacuité des journées de son jeune frère, apprenti-dealer, et de ses copains. Eux qui se mettent subitement à jouer au golf sur la pelouse de la cité, parce qu’un toxicomane vient de leur fourguer des clubs, volés pour payer sa dose. La caméra numérique, mobile, sans recherche esthétique particulière – » une caméra souvent utilisée dans les reportages télé  » précise le réalisateur- sert le propos à merveille.

Alors sans doute cet homme qui fait du stop en vain est-il un symbole. Sans doute Irène, une jeune institutrice qui s’interpose pendant un contrôle d’identité intempestif est-elle un modèle possible de résistance. Mais le film laisse les faits bruts. Sans discours superflu.

 » Un film entièrement auto-produit, financé par mes frères, joué par mes soeurs et mes neveux, pour être autonome par rapport aux institutions cinématographiques. » s’enorgueillit le réalisateur. Un film libre en effet. Qui laisse le spectateur libre à son tour…

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