Kufuor : succès annoncé de l’homme en bas


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Drapeau du Ghana
Drapeau du Ghana

Avec 48% des voix au premier tour, le candidat de l’opposition ghanéenne paraît plus que jamais placé pour réussir son pari : être le premier président de l’opposition après 20 ans de règne du président Jerry Rawlings. Ce vieux briscard de la politique compte sur le soutien des petits partis, de la presse et une confortable avance au premier tour.

 » Sopi ! Sopi !  » – changement -, scandaient les partisans de Wade en avril dernier, à la veille de son élection à la magistrature suprême sénégalaise. Huit mois plus tard, c’est au cris d’  » Asiao !  » – en bas – que l’opposition ghanéenne s’apprête à renouveler l’exploit de l’alternance démocratique sur le continent noir, alors que la phase finale des élections présidentielles se déroule dans un calme apparent.

A voir l’euphorie qui règne dans les meetings ghanéens, lorsque le leader du Nouveau parti patriotique (NPP), John Kufuor salue ses supporters, le pouce tourné vers le sol, désignant la case du bas des bulletins de vote où son nom est inscrit derrière le candidat du pouvoir, difficile de nier l’engouement des Ghanéens pour le  » gentil géant « . Dans un pays où l’illettrisme dépasse encore les 35% la consigne, (à la fois mise à mort d’un régime usé et pied de nez à un adversaire en tête sur les bulletins, mais bien derrière dans les sondages) passe de bouche à oreille.

Pour siéger à la présidence après 19 ans de règne sans partage du président Jerry Rawlings, John Kufuor devra , en effet, battre le dauphin désigné de celui-ci, John Atta Mills, actuel vice-président et candidat investi du Congrès démocratique national au pouvoir. Calme, mesuré, mais dénué de charisme, Kufuor a su néanmoins rallier son parti autour d’un savoir-faire politique. Après les 20 ans de régime militaire, puis civil, de Jerry Rawlings, c’est une denrée précieuse.

Un vieux briscard de la politique

Car cet homme de 62 ans, père de quatre enfants, est aussi un  » gentil géant  » de la politique. Membre de l’Assemblée Constituante, et du Parlement sous l’étiquette du Parti du progrès, cet ancien avocat fut l’un des initiateurs, en 1969, de la seconde république ghanéenne. Dans le gouvernement du Dr Kofi Abrefa Busia, il occupe le poste de vice-ministre des Affaires étrangères jusqu’au renversement de ce dernier par un coup d’Etat militaire. Sept ans plus tard, la levée de l’interdiction des partis politiques (suite au premier coup d’Etat du capitaine d’aviation Rawlings) propulse à nouveau cet ancien d’Oxford sur le devant de la scène. Il est élu député du Parti populaire. En 1981, Rawlings mécontent de la gestion du gouvernement du président Hilla Limann, reprend le pouvoir par les armes. Mais à la différence de son premier coup de force il reste aux affaires. Kufuor est alors nommé ministre de l’Aménagement du territoire. Très vite il démissionnera, accusant la junte de persécuter les petits paysans.

Renonçant pendant dix ans à la politique, il se tourne vers ses premières amours et son métier d’avocat d’affaires et prendra de 1988 à 1991, la direction du Asante Kotoko football club.

Lorsqu’en 1992, Jerry Rawlings autorise à nouveau les partis politiques, il entre en campagne pour le compte du NPP et du candidat malheureux, le professeur Albert Abdu Boahen. Quatre ans plus tard, c’est en tant que candidat que Kufuor affronte encore son grand rival, Jerry Rawlings. Il est à la tête d’une grande alliance regroupant outre le NPP, le Parti de la convention du peuple (PCP). Nouvel échec.

Soutien des partis et de la presse

Mais aujourd’hui que le très populaire Jerry Rawlings passe la main à un dauphin beaucoup moins charismatique et que les signes de lassitude des Ghanéens se multiplient face à un pouvoir incapable de lutter efficacement contre la crise économique qui frappe la région, Kufuor est certain que son heure est venue.

Avec 48% des suffrages, contre 44% pour Atta Mills, lors du premier tour du 7 décembre, le leader du NPP est passé à deux doigts de la majorité absolue. Il peut compter aussi sur le soutien des petites formations qui ont appelé à voter pour lui au second tour. La presse indépendante, elle aussi, a choisi Kufuor, n’hésitant pas à conseiller ses lecteurs de voter…  » Asiao « .

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