Journaliste guéri du Covid-19, il témoigne : « J’ai souffert, ma famille était marginalisée »


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Pape Alioune Ndiaye
Pape Alioune Ndiaye

Journaliste sénégalais du quotidien sportif RECORD, Pape Alioune Ndiaye, récemment guéri de Covid-19, a accepté, pour Afrik.com, de revenir sur son passage à l’hôpital, sa vie d’infecté de Covid-19 et les conditions dans lesquelles tout s’est passé.

Entretien exclusif

Comment avez-vous chopé le virus et à quel moment avez-vous eu le sentiment d’être effectivement infecté ?

IMG 20200827 WA0277Je ne suis pas sûr du jour exact. Je sais cependant que c’est entre le mercredi 18 et le jeudi 19 mars 2020. J’ai chopé le virus dans la rédaction de RECORD. J’étais en contact avec mon rédacteur en chef qui revenait de voyage. C’est le vendredi suivant que j’ai commencé à ressentir les symptômes. Des douleurs, une forte fièvre, une fatigue et tout.

Excepté la toux, j’avais eu tous les autres symptômes. Ce vendredi-là, mon rédacteur en chef, qui m’a transmis le virus, m’a appelé pour me dire qu’il a été testé positif. Je devenais dès lors un cas suspect. Je suis resté cloitré sur mon lit pour ne pas entrer en contact avec les membres de ma famille.

Quelle a été votre réaction quand on vous a confirmé que vous étiez effectivement atteint ?

J’ai effectué le test le mercredi suivant, qui s’est avéré positif. J’avais un peu peur au vu de tout ce qui se disait de cette maladie. J’étais quand même sûr que je pouvais guérir de la maladie.

Membre de toute une rédaction sportive, avez-vous pensé un moment à vos collaborateurs ?

Tout naturellement. Il y avait les journalistes et les monteurs. Je m’inquiétais pour eux. J’ai également prié pour eux afin qu’ils ne soient pas contaminés comme je l’ai été. Malheureusement, un autre collègue a été testé positif. Et nous nous sommes retrouvés dans le même hôpital.

Avez-vous senti un soutien moral venant de vos collègues et de la maison, le Groupe Futurs Médias ?

IMG 20200827 WA0279Effectivement, j’ai bénéficié du soutien de toute la rédaction. Et c’est ce qui m’a permis de moralement surmonter la maladie. J’ai reçu des appels multiples. Certains m’auraient rendu visite si on le leur permettait. Ils ont tout le temps essayé d’avoir de mes nouvelles. Je me devais alors de les assurer que tout allait bien pour moi et que j’allais sortir plus fort de cette épreuve.

J’ai également reçu des appels du PDG, Birane Ndour (fils du président et propriétaire du groupe, Youssou Ndour), ainsi que de la responsable du personnel, Emilie. Ils m’appelaient régulièrement pour s’enquérir de mon état de santé. Très sincèrement, j’ai eu tout le soutien qu’il fallait pour un collaborateur.

Combien de temps avez-vous passé à l’hôpital ?

Le mercredi où j’ai reçu les résultats des tests, j’ai été interné à l’hôpital Dalal Jamm de Guédiawaye (banlieue dakaroise). C’était le deuxième centre, après Diamniadio, où on accueillait les malades du Covid-19. J’y suis resté deux semaines. Et tout s’est bien passé. La prise en charge et tout.

Comment passiez-vous votre temps ?

J’étais tout le temps avec mon téléphone. Il n’y avait pas grand-chose à faire. On devait attendre que les médecins viennent chaque jour prendre notre température, le rythme cardiaque et tout. Au bout d’une semaine, ils ont commencé à nous donner de la chloroquine [l’efficacité du médicament n’est pas prouvée dans ce cadre, ndlr].

Comment vous a-t-on annoncé votre guérison du Covid ?

On nous faisait faire des tests tous les trois jours. S’ils reviennent négatifs, tu refais un test deux jours plus tard. S’il est positif aussi, tu en refais trois jours après. Quand j’ai été testé négatif deux fois de suite, ils m’ont dit que je devais sortir le lendemain.

Au retour à la maison, quelle était la réaction de la famille, des proches parents voire du voisinage ?

IMG 20200827 WA0278La famille, les parents, les frères et sœurs, tous étaient contents de me revoir et de se rendre compte que j’étais sorti sain et sauf. Que j’ai pu remporter cette bataille contre cette maladie. Plus fort après cette épreuve. Ils étaient vraiment satisfaits. Je n’étais pas encore marié. C’est d’ailleurs après que j’ai épousé ma copine qui m’a beaucoup soutenu pendant ces moments très difficiles. Moins d’un mois après que je suis sorti.

Portez-vous toujours les stigmates de la maladie ? Vous arrive-t-il de temps en temps d’avoir une fièvre et de penser à choper de nouveau le virus ?

Des stigmates ? Pas tellement. Peut-être moralement car j’ai tendance à revivre les moments que j’ai passés à l’hôpital. Tous les membres de ma famille ont souffert parce qu’ils étaient marginalisés dans le quartier où nous habitons. C’est une épreuve qui m’a beaucoup marqué. Ça m’a fait mal. Mais physiquement, je me sens bien. Je ne ressens plus rien.

Si vous aviez des conseils à donner aux autres, afin qu’ils soient épargnés de la pandémie, quels seraient-ils ?

Beaucoup ont tendance à croire que cette maladie a été inventée de toute pièce. Mais elle est bel et bien là. Elle continue à faire des dégâts. Les populations devraient être plus conscientes en respectant les mesures-barrière, en utilisant les masques, en se lavant avec les gels antiseptiques, en évitant les rassemblements afin de se protéger au mieux.

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