En finir avec les sanglots de l’homme noir, réactions et débat


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Le visage d'un homme noir
Le visage d'un homme noir

Suite aux différentes réactions quant à sa contribution sur Afrik « Il faut en finir avec les sanglots de l’Homme noir », l’écrivain Bolya répond aux internautes et poursuit sa réflexion. Il apporte de l’eau au moulin d’un débat nécessaire autour d’une prise de conscience qui devrait être collective.

« Comment être moderne sans être occidental ? » Telle est la seule interrogation en filigrane de cet article. Et c’est la question qui vaut pour les Africains qui veulent et qui sont décidés à faire atterrir l’Afrique au XXIe siècle. Qui sont décidés à faire entrer le Continent dans l’économie globalisée. Bref, dans le monde tel qu’il est ! Dans ce monde où la puissance économique est la condition de la puissance politique. Et la capacité d’innovation technologique et scientifique est le préalable à toute transformation sociale. Paradoxalement, c’est aussi le socle de la préservation de l’identité africaine dans la modernité. L’exemple japonais le prouve. Le modèle culturel sud-coréen le confirme. La réussite de l’Inde dans les technologies de l’information, dans l’informatique l’amplifie. La Chine, depuis la révolution de Deng Xiao Ping en 1978 (c’est-à-dire la remise en question radicale des politiques économiques et culturelles de l’époque de Mao Ze Dong), a permis le décollage de l’Empire du Milieu et d’en faire l’usine du monde… D’aucuns parlent déjà de « la Revanche de l’Empire ». Seule réserve, la Chine n’est pas totalement moderne puisqu’elle demeure un pays non démocratique.

Tous ces pays ont prouvé que l’on pouvait être moderne sans être occidental. Alors arrêtons de gémir… La culture africaine n’est pas un obstacle au développement du Continent. Mais les erreurs de stratégie économique et culturelle le sont…. Par conséquent, c’est dans la capacité des Africains à se propulser dans l’avenir que se trouve la ou les réponses aux questions qui nous assaillent et nous tourmentent. Les sanglots de l’Homme noir ne résoudront pas, par exemple, le problème du paludisme (l’une des premières causes de mortalité en Afrique). D’autant que le paludisme est une pathologie qui ne touche pas les Occidentaux en Occident. Il ne faut donc pas attendre des multinationales pharmaceutiques d’Europe, d’Amérique et du Japon investissent dans la recherche d’une médication sur cette maladie. D’autant qu’ils considèrent le marché africain comme peu solvable et peu rentable. Il faut que se soient les Africains qui s’investissent eux-mêmes dans la recherche scientifique des solutions pharmaceutiques au paludisme et bien d’autres pathologies ( la drépanocytose par exemple) qui les touchent en majorité.

Mais pour relever cet énorme défi, il faudra que cesse les années blanches, les écoles closes, les universités fermées. Sinon, il n’y aura jamais de grands scientifiques africains, en Afrique, susceptibles de relever cet immense chalenge. En effet, l’effondrement du système éducatif et l’affaissement du système sanitaire sont les conditions permissives d’une régression économique et surtout d’une croissance perpétuelle de la pauvreté absolue de masse. De ce fait, elle ouvre les vannes de l’humiliation et du mépris de l’Autre. Bref, au mépris de la civilisation africaine. Et les sanglots de l’Homme noir n’y feront rien… C’est ainsi. Comme le rappelle, à juste titre, un internaute d’Afrik.com : « Le temps est à la réactivité : il n’y a pas d’écoles, de routes, d’économies pourquoi ? Parce qu’au fond il n’y a pas d’États ! Et alors, créons des États ! Il y a une main-mise sur notre politique ? Cherchons les maillons faibles et brisons-les ».

Il est urgent d’en finir avec ces guerres sans enjeux, sans idéologies. Car il s’agit de guerres de rapines. Quant au mythe du « plan Marshall » (le Nepad, Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique), il mériterait d’être approfondi par les partisans de cette solution pour l’Afrique. Ce plan comprenait par exemple l’introduction du management à l’Américaine et surtout la création de « centres de productivité ». Paradoxalement, le plan Marshall a été un levier de l’américanisation des sociétés européennes. Par conséquent, un « plan Marshall pour l’Afrique » aboutirait à une occidentalisation à marche forcée du Continent. La France a pu sauver son cinéma grâce à l ‘exception culturelle. Et aujourd’hui, en défendant la convention sur la Diversité culturelle de l’UNESCO, signée en octobre 2005.

C’est dire qu’il n’y a plus de place en ces temps de tempêtes pour les préjugées, pour les approximations régressives. L’Histoire n’explique pas tout…Car le présent, notre présent, c’est l’Histoire qui est en train de se faire devant nous. Le présent, c’est l’Histoire ! La nôtre ! Il n’y a donc pas de complot universel contre l’Homme noir. Le pessimisme culturel sur les Africains n’est pas de mise. Bien au contraire. Il ne s’agit pas non plus de succomber aux charmes d’un optimisme béat, encore moins de céder à un scepticisme délirant et paranoïaque. La théorie du complot aboutit paradoxalement à l’infantilisation. Pire, à l’abaissement de soi par soi ! A la perte de confiance en Soi ! Et en sa destinée…

L’heure n’est pas à la soumission et encore moins à la démission. Mais à la construction et à la diffusion de nouvelles formes, de nouvelles idées… Cheik Amidou Kane dans l’Aventure Ambiguë notait (on cite de mémoire) : « les Blancs nous ont battu, mais ils n’avaient pas raison ». Les temps ont changé. Le monde ne ressemble plus à un piano à deux touches : Noirs, Blancs ! Il est multicolore, « arcenciel », comme le pays du « Nègre fondamental » (concept d’Aimée Césaire) du XXe siècle Nelson Mandela.

C’est pourquoi il faut en finir avec les discours de pleureuses, l’idéologie des matières premières. Car la seule matière première, c’est la Ressource Humaine. Et elle est inépuisable ! …Être Moderne sans être occidental, c’est possible !

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