
En Gambie, la mort d’une fillette de moins d’un mois après une excision a bouleversé le pays. La mutilation génitale féminine, pourtant interdite depuis 2015, reste pratiquée dans certaines communautés. Ce drame relance les débats politiques et sociétaux autour d’une tradition profondément ancrée.
Entre défense des droits humains et arguments culturels, la question divise plus que jamais.
Un drame dans le village de Wellingara
L’affaire a éclaté après l’annonce de la police de Wellingara. Une petite fille, âgée d’un mois, est décédée des suites d’une grave hémorragie consécutive à une excision. L’opération aurait été pratiquée dans le village, avant que l’état de l’enfant ne se dégrade rapidement. Transportée en urgence à l’hôpital maternel et infantile de Bundung, elle a été déclarée morte à son arrivée. Une autopsie est en cours pour déterminer si la mutilation est la cause directe du décès, mais une enquête interne a déjà confirmé qu’elle avait subi une excision.
Une pratique interdite mais persistante
En Gambie, la loi de 2015 interdit toute forme de mutilation génitale féminine et prévoit des peines pouvant aller jusqu’à la prison à perpétuité en cas de décès. Pourtant, selon l’Unicef, 73 % des Gambiennes âgées de 15 à 49 ans ont subi cette pratique, ce qui fait du pays l’un des dix plus touchés au monde. L’argument de la tradition, souvent brandi par ses défenseurs, continue de freiner l’éradication, même si les autorités réaffirment leur engagement contre ce phénomène.
Un débat politique enflammé
Ce drame intervient dans un contexte politique tendu. En juillet 2024, une proposition visant à dépénaliser la MGF a été rejetée par le Parlement, après de vives discussions. Certains députés défendent la pratique au nom de la culture et des coutumes locales, tandis que d’autres y voient une violation grave des droits humains et un danger pour la santé des femmes et des filles. Le décès de Wellingara pourrait peser lourdement dans ce débat, en apportant un visage concret et tragique aux statistiques.
Une urgence sanitaire et sociale
Au-delà du cadre légal, la MGF reste un problème de santé publique majeur en Afrique. Une étude de l’université de Birmingham indique que, dans 28 pays du continent, elle a causé 44 000 décès supplémentaires en 2023. En Gambie, comme ailleurs, les ONG plaident pour renforcer les campagnes de sensibilisation, l’éducation communautaire et l’accès à la santé reproductive, afin de briser le cycle de transmission culturelle de cette pratique.
Le cas de la petite fille de Wellingara rappelle que la lutte contre l’excision ne se joue pas seulement dans les lois, mais aussi dans les mentalités. Tant que la pratique restera socialement valorisée dans certaines communautés, le risque de drames similaires persistera. En Gambie, la bataille contre la MGF reste donc à la fois juridique, culturelle et profondément humaine.