Diplomatie : que retenir de la visite de Jean-Yves Le Drian au Cameroun ?


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Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian
Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian

Annoncé au Cameroun pour une visite de travail, le chef de la diplomatie française n’a point manqué au rendez-vous. Avec un agenda très chargé, Jean-Yves Le Drian a rencontré le chef de l’Etat, Paul Biya, ainsi que toute la classe politique camerounaise, y compris bien sûr l’opposant numéro 1 au régime, Maurice Kamto. Quel bilan peut-on faire à l’heure actuelle de cette visite ?

Simple coïncidence de date ou préméditation ? L’arrivée et le séjour du patron du Quai d’Orsay au Cameroun tombe pile sur le moment de la tenue du Sommet Russie-Afrique de Sotchi. Entre répondre à l’invitation russe à Sotchi pour prendre part, aux côtés de ses pairs africains, à ce sommet et rester au pays pour recevoir son hôte français, le Président Paul Biya a vite fait le choix d’accueillir chez lui Jean-Yves Le Drian ; ce qui a poussé Fotsing Nzodjou, un militant du MRC (Mouvement pour la Renaissance du Cameroun), le parti de Maurice Kamto, à affirmer que « Paul Biya a fait le choix entre la France et la Russie », selon des propos rapportés par un média camerounais.

À son arrivée en terre camerounaise, l’homme d’Etat français a été reçu par le Président Biya, avec au menu des échanges l’actualité politique avec les questions comme le Grand dialogue national organisé le chef de l’Etat pour tenter de trouver une solution à la crise dans les régions anglophones et qui a déjà abouti à la libération d’opposants politiques dont Maurice Kamto. Le Drian est donc allé « prendre acte et encourager la poursuite de la dynamique enclenchée là », a soufflé son entourage, à la veille de son départ. La coopération bilatérale, notamment les questions économiques, a également été au cœur des échanges.

Outre Paul Biya, le chef de la diplomatie française s’est aussi entretenu avec l’ensemble de la classe politique camerounaise, les partisans de la majorité présidentielle comme les membres de l’opposition, et bien entendu des leaders anglophones. Des questions brûlantes de l’actualité du pays ont donc été abordées. « Nous avons parlé de la manière dont le Dialogue s’est déroulé et avons souhaité que la France nous apporte tout son soutien à la mise en place des recommandations qui ont été faites. La France étant un partenaire important, incontournable du Cameroun. », a confié à la presse Jean Nkuété, secrétaire général du RDPC (Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais), parti au pouvoir, à sa sortie de la rencontre.

Par ailleurs, bien avant le voyage, il se disait aussi dans l’entourage du ministre que pour les Législatives qui sont prévues pour février 2020 au Cameroun, Le Drian allait profiter de sa visite pour faire « une offre d’accompagnement » à l’organisation du scrutin.

Le Cameroun est à un tournant décisif de son histoire politique, la recherche de solution aux problèmes qu’il traverse depuis des années, notamment la question anglophone qui a fait, ces derniers mois, des milliers de victimes. Comme on peut le lire sur le site de l’ambassade de France au Cameroun, cette visite « marquera le soutien de la France à la mise en œuvre des conclusions du Grand dialogue national, notamment en faveur de la décentralisation ». En effet, la France sait bien qu’elle ne doit pas jouer les abonnés absents dans le processus en cours de résolution de la crise. Elle tient coûte que coûte à ne pas perdre pied au Cameroun, un pays stratégique en Afrique Centrale. Simple question de realpolitik.

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Historien, Journaliste, spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne
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