
En élargissant la Coupe du monde féminine à 48 équipes pour l’édition 2031, le Conseil de la FIFA prépare une métamorphose du paysage footballistique mondial. Pour le continent africain, cette décision marque le début d’une ère prometteuse, où le continent sera dignement représenté sur la scène internationale.
Pour la dernière édition sous l’ancien format en 2027 au Brésil, la Confédération africaine de football (CAF) ne dispose que de quatre places directes, complétées par deux billets accessibles via les barrages intercontinentaux. Dès 2031, ce contingent fera un bond historique : sept qualifications automatiques, plus deux tickets de barrage, ouvrant la voie à une possible représentation de neuf nations africaines – plus du double du quota actuel.
Cette expansion brise enfin le plafond de verre qui cantonnait le football féminin africain au quatuor Nigeria–Afrique du Sud–Cameroun–Ghana, avec plus récemment le Maroc, permettant l’émergence de nouvelles forces continentales.
L’héritage de 2023 : la percée qui a tout changé
Cette évolution n’est pas le fruit du hasard. Elle s’enracine dans le tournant historique de la Coupe du Monde 2023, où pour la première fois, trois sélections africaines – Nigeria, Afrique du Sud et Maroc – ont franchi le cap des phases de groupes, chacune s’offrant au moins une victoire retentissante face à des nations établies. Ce n’était pas une anomalie statistique, mais la confirmation d’un potentiel trop longtemps sous-estimé.
La Coupe d’Afrique des Nations féminine, qui sert de voie qualificative pour le Mondial, s’apprête à vivre une métamorphose. Avec sept places directes à pourvoir, la compétition devient un véritable carrefour d’opportunités. Pour les fédérations, l’équation change radicalement : avec un tel élargissement, une élimination précoce deviendra difficile à justifier devant supporters et partenaires, imposant une nouvelle exigence de résultats et d’investissements.
Le défi structurel : transformer l’engouement en héritage durable
L’expansion du Mondial catalyse déjà des transformations profondes dans les infrastructures africaines :
- Au Maroc, l’implication royale a permis l’éclosion de centres d’excellence ultramodernes à Rabat et Salé. Son championnat professionnel attire désormais des talents, devenant un pôle magnétique pour les joueuses cherchant visibilité et compétitivité.
- En Afrique du Sud, la Hollywoodbets Super League capitalise sur le prestige des championnes d’Afrique 2022 pour consolider un modèle semi-professionnel attractif, avec des partenariats médiatiques en pleine expansion.
- Au Nigeria, malgré son statut de puissance historique, la NWFL peine encore à sécuriser la diffusion télévisée et les sponsorings nécessaires à sa pérennité, illustrant le chemin restant à parcourir.
Le véritable enjeu dépasse le cadre sportif : il s’agit de transformer l’enthousiasme généré par les performances de 2023 en écosystèmes économiquement viables, capables d’offrir des carrières professionnelles dignes de ce nom. Sans championnats compétitifs, les nouvelles places obtenues resteront des promesses non tenues.
Les zones d’ombre : la WAFCON 2024 en suspens
En contrepoint de ces perspectives radieuses, l’incertitude qui a longtemps plané sur l’organisation de la Coupe d’Afrique féminine 2024, qui a été déjà reportée et qui doit se dérouler cet été au Maroc, révèle les fragilités persistantes du système. Les rumeurs réccurentes de report, voire d’annulation, soulignent l’urgence pour la CAF de sécuriser un calendrier stable et de garantir un cadre professionnel pour les joueuses et leurs clubs.
Si le règlement FIFA limite actuellement les candidatures 2031 à la CONCACAF et à la CAF, seuls les États-Unis (avec le Mexique et potentiellement le Canada) se positionnent fermement. Une opportunité s’esquisse pour le continent : une candidature marocaine ou sud-africaine, s’appuyant sur l’expérience de la WAFCON 2022 ou du Mondial masculin 2010, offrirait à l’Afrique une plateforme inédite tout en dynamisant les investissements nationaux dans le football féminin.
Par ailleurs, la même session du Conseil a adopté un nouveau Code disciplinaire, avec des amendes pouvant atteindre 5 millions de francs suisses pour lutter contre les discriminations. Pour les joueuses africaines, trop souvent victimes, c’est une avancée importante. La tolérance zéro face aux comportements racistes, sur le terrain comme en dehors.
2031 : l’alignement parfait des astres
L’expansion de 2031 coïncide idéalement avec l’éclosion d’une génération dorée. Les talents qui brillent aujourd’hui dans les catégories U-17 et U-20 – dominées par le Nigeria et le Ghana, mais aussi par de nouvelles forces comme la Tanzanie et le Botswana – atteindront leur apogée précisément à l’horizon 2030-2032. La synchronisation est parfaite : davantage de places qualificatives, une génération talentueuse arrivée à maturité, un cadre réglementaire protecteur et, espérons-le, des ressources à la hauteur des ambitions.
Jamais le continent n’a été aussi proche de transformer son potentiel en puissance durable. Avec jusqu’à neuf représentantes possibles en Coupe du monde, les instances gouvernementales, les sponsors et les diffuseurs ont désormais une motivation concrète pour accélérer la professionnalisation du football féminin africain.