Côte d’Ivoire : le règne de la terreur


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Les affrontements s’intensifient dans l’ouest. Les Forces Nouvelles alliées à Alassane Ouattara ont pris la ville de Toulépleu, après de violents combats dimanche. Une information démentie par les forces fidèles au président sortant Laurent Gbagbo qui affirment que la bataille continue. A Abidjan, dans le quartier d’Abobo où de nouveaux décès ont été signalés la nuit dernière, la situation reste tendue.

Violences armées à l’ouest. La ville de Toulépleu est tombée aux mains, ce dimanche, des Forces Nouvelles (FN) alliées au président reconnu par la communauté internationale, Alassane Ouattara, lors d’affrontements contre les Forces de défense et de sécurité (FDS) du président sortant Laurent Gbagbo.

Située dans la zone sud, après une tentative de coup d’état en 2002, par le camp Gbagbo, « la ville s’est vidée de ses habitants après les violents combats », a témoigné un habitant auprès de l’AFP. « La population a fui la ville pour se réfugier dans la forêt et les villages environnants », a-t-il raconté. Selon lui, « certains fuyards ont pris la direction du Liberia » voisin, où des dizaines de milliers d’Ivoiriens se sont déjà réfugiés. « Nos maisons sont pillées par les rebelles », a affirmé un instituteur. « La ville est entièrement contrôlée par les FN », a déclaré une source au sein de l’état-major de l’ex-rébellion. Un combattant FN dans la zone a affirmé que son camp visait désormais la ville de Bloléquin, située à l’est du pays. « Il y a eu d’âpres combats. Les Forces nouvelles ont pris la ville », ont à leur tour affirmé des élus locaux. « Les rebelles étaient plus nombreux que nos jeunes, qui défendent la ville et ont dû opérer un repli tactique », ont-ils ajouté.

De même, à Abidjan, des tirs à la Kalachnikov ont été entendus dimanche après-midi. Trois personnes ont été tuées dans la nuit de dimanche à lundi, selon le gouvernement de Laurent Gbagbo. Sept femmes avaient été tuées par balles jeudi lors d’une manifestation pro-Ouattara dans le quartier d’Abobo. Le camp Ouattara et la mission des Nations unies (l’ONU) dans le pays, l’Onuci, ont accusé les FDS d’être à l’origine de la tuerie. Le gouvernement Gbagbo a quant à lui rejeté la responsabilité sur les insurgés, qualifiés de « terroristes ». La Cour pénale internationale s’est dite samedi « prête à agir vite contre les auteurs de ces crimes contre la population civile ». Ces combats dans l’ouest et Abidjan durent maintenant depuis deux semaines.

Cette escalade de la violence touche aussi les hommes politiques. Des groupes de jeunes pro-Gbagbo ont pillé et saccagé au moins dix résidences appartenant à des ministres et des alliés politiques d’Alassane Ouattara, a dénoncé dimanche l’un de ses conseillers, Amadou Coulibaly. Il a accusé la police de recruter des jeunes pour participer à ces pillages qui ont débuté jeudi, selon lui. « Ils tentent d`instaurer une atmosphère de terreur », a-t-il affirmé. « Mais ils ne peuvent pas faire plus que ce qu’ils ont déjà fait, comme tirer sur des femmes désarmées », a-t-il ajouté.

L’Union africaine invite Gbagbo et Ouattara à Addis-Abeba

Face à la crise, l’ONU redoute une « résurgence de la guerre civile ». Plus de 370 personnes ont été tuées dans des violences depuis le 28 novembre, dont 50 en une semaine avant la mort des 7 femmes, et 200 000 personnes auraient fui l’insécurité à Abidjan, selon l’organisation. La secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton a réclamé hier « l’arrêt immédiat de la violence », et accusé Laurent Gbagbo de « mépris inhumain pour la vie humaine et l’Etat de droit ».

Le panel des chefs d’Etat africains, dirigé par le Président mauritanien, Mohamed Ould Abdel Aziz, qui a pour mission de trouver une porte de sortie à la crise ivoirienne, a aussi exigé « l’arrêt immédiat des tueries » et des manifestations pouvant « dégénérer en troubles et en violences ». Par l’intermédiaire de Jean Ping, le président de la Commission de l’Union africaine, ce panel a notamment invité samedi Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo, à une réunion avec les chefs d’Etat du Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l’UA, le 10 mars à Addis Abeba, la capitale éthiopienne. Si Alassane Ouattara a accepté d’y participer, ce n’est pas le cas de Laurent Gbagbo et du président du Conseil constitutionnel, Paul Yao, qui n’ont pas encore donné leur réponse.

Par ailleurs, huit quotidiens ivoiriens favorables à Alassane Ouattara ont fait lundi leur retour dans les kiosques après avoir cessé leur parution le 1er mars, invoquant des « menaces » et un « harcèlement » exercé par le camp Gbagbo. L’électricité a aussi fait son retour samedi dans plusieurs villes du nord du pays sous contrôlées par le FN après avoir été coupée depuis lundi, selon des habitants de la région. Le courant est revenu notamment à Bouaké, Ferkessédougou, Korhogo, et Boundiali. La Compagnie ivoirienne d’électricité, qui avait été réquisitionnée à la mi-janvier par le clan Gbagbo, a rejeté toute responsabilité dans les coupures.

Le pays sombre chaque jour un peu plus dans la guerre civile…

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