
Encouragés par l’ombre de l’administration Trump, des Sud-Africains blancs demandent l’asile politique aux États-Unis, invoquant des discriminations raciales et une insécurité croissante. Un phénomène discret mais réel, qui relance le débat sur l’usage du droit d’asile et les tensions identitaires post-apartheid.
Dans une démarche aussi inattendue que controversée, des Sud-Africains blancs, principalement issus de la communauté afrikaner, sont entendus par les autorités américaines pour des demandes d’asile. Ce mouvement, encouragé par l’administration Trump, s’appuie sur une rhétorique de protection contre des « discriminations raciales injustes » subies en Afrique du Sud. Trente personnes auraient déjà franchi les premières étapes. Une situation qui interroge sur la nature même de l’asile politique et les tensions raciales persistantes dans l’Afrique post-apartheid.
Un programme d’asile discret, mais ciblé
Lancé le 7 février sous l’impulsion directe de l’ex-président Donald Trump, ce programme d’asile ne figure officiellement sur aucun décret public détaillé. Il n’existe pour l’heure qu’une adresse mail sur le site de l’ambassade américaine permettant d’initier une demande. Pourtant, malgré son flou administratif, cette initiative semble bel et bien active : plusieurs Afrikaners affirment avoir été reçus à l’ambassade des États-Unis. Trente d’entre eux auraient même déjà été approuvés. Le président Trump justifie ce programme par la nécessité de protéger une minorité blanche prétendument victime de discriminations systémiques en Afrique du Sud.
Mark, agriculteur sud-africain, fait partie de ceux qui ont passé un entretien. Son récit, partagé à l’agence Reuters, décrit un personnel d’ambassade “empathique” et “bienveillant”. De son côté, Katia Beeden, coach au Cap et fervente supportrice de Trump, témoigne avec émotion de l’insécurité croissante : « L’Afrique du Sud est une société très violente, et nous avons l’un des taux de meurtres les plus élevés au monde. » Pour elle, la promesse d’asile américain représente une “bouée de sauvetage”, surtout pour les femmes qu’elle estime particulièrement vulnérables.
Des motivations politiques et identitaires
Derrière ces demandes d’asile se dessine un paysage plus large : celui de la mémoire coloniale, de l’identité afrikaner et du malaise post-apartheid. Les Afrikaners, descendants des colons néerlandais, ont longtemps été les architectes du régime de ségrégation raciale. Aujourd’hui, ils se présentent comme les victimes d’un système inversé. Le site « Amerikaners », créé pour faciliter les démarches de migration vers les États-Unis, symbolise cette quête d’un refuge idéologique, parfois alimentée par un discours conservateur occidental en quête de causes alignées.
Ce programme d’asile pose une série de questions délicates : peut-on être blanc et réfugié en Afrique ? Les discriminations alléguées suffisent-elles à justifier l’exil ? Et surtout, ce cas ne risque-t-il pas de politiser encore davantage le droit d’asile ? Si les autorités américaines poursuivent discrètement leurs entretiens, l’écho médiatique international pourrait bien transformer ce phénomène marginal en sujet de controverse majeure entre perceptions de la justice sociale et réalités géopolitiques.