Quand la « Janviose » prospère au Cameroun


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Thérèse Ngo Yon
Thérèse Ngo Yon

La « Janviose » est un phénomène qui semble élire domicile dans notre pays, le Cameroun. Lors des fêtes de fin d’année, des dépenses sont faites sans contrôle, comme si c’était la fin du monde. Et après ces moments festifs, la vraie galère s’installe avec son lot de problèmes. Pour plus d’éclairage sur cet aspect, Afrik.com est allé à la rencontre de Thèrese Ngo Yon, employée dans une boulangerie de renom à Douala.

Entretien

Qui est Thérèse Ngo Yon ?

Thérèse Ngo Yon., c’est le nom à moi donné par mes parents, les nommés Feu Yon Mathias, de la famille Lôg Bakén et de Suzanne Ngo Massing, de la famille Mangaa. Je suis le 3ème enfant des 5 que comptent mes parents.

Qu’entendez-vous par la « Janviose »?

La « Janviose » vient du 1er mois de l’année. Et il est connu de tous les Camerounais, qu’ils soient jeunes ou âgés, femmes, filles et garçons, que la « Janviose » n’est autre que la sècheresse financière qui  sévit très souvent dans les familles et les espaces commerciaux après les fêtes de fin d’année. J’ai constaté que pendant les fêtes de fin d’année, les dépenses étaient faites à la folie. Puis après, on fait face à des difficultés financières.

A quel moment ressent-on la « Janviose »?

Les fêtes de fin d’année marquent traditionnellement un pic de consommation de toutes sortes de produits (alimentaires, construction, décoration,…). A cette période, les marchés urbains et ruraux sont bondés de monde. On ne distingue ni pauvres, ni riches. Chacun y va selon la lourdeur de sa poche. Mais, chose curieuse, chaque année, ce n’est qu’au mois de janvier, que cette « maladie » apparaît. Et pourtant, il y a au total 7 mois de 31 jours (janvier, mars, mai, juillet, août, octobre et décembre). Mais le mois de janvier semble être le plus long. Et en février, l’étau se desserre. Bref, ce mal disparaît. Ce qui, jusqu’à présent, dépasse notre entendement. Nous ne parvenons toujours pas à expliquer ce phénomène qui est récurrent.

Comment se manifeste-t-il ?

Lorsqu’arrive cette période, je constate toujours que l’argent devient rare comme les « larmes du chat », les crédits se multiplient dans les tontines, les boutiques de quartiers. Chez les bayam sellams des marchés, il y a les produits, mais pas d’acheteurs, les factures d’eau, d’électricité et les frais de scolarité sont difficilement réglées, les enfants deviennent très agressifs et irrespectueux envers leurs parents et aînés. Les buvettes, salons de coiffure et autres sont très peu fréquentés, les commerçants vendent leurs marchandises à vil prix, le nombre de repas journaliers passe de 3 à 1, le taux d’agressions augmente, beaucoup de personnes deviennent des « Johnnie Walker », par manque des frais de taxi. Bref, c’est comme si la vie s’arrêtait, surtout pour les moins nantis. Dans les prières des croyants et non croyants, c’est que ce mois-là finisse vite !

Quelles sont les personnes concernées par ce syndrome ?

Ce syndrome ne distingue pas les chapelles politiques, les tribus, le sexe, l’âge, les secteurs d’activités, régions… En un mot, tout le monde est concerné. Il y a un « mais », qui fait que seuls les gros poissons du pays sont à l’abri, car, ils savent où ils puisent/cueillent leur argent.

Selon vous, comment faire pour être à l’abri de ce syndrome ?

Quand tu as l’argent, tout le monde sourit avec toi et est à tes côtés. Et quand c’est le contraire, tu es seul, je dis bien « tout seul ». Il faut aussi savoir gérer l’argent lorsque c’est en abondance… C’est quand la « Janviose » te menace que tu te rends compte que l’argent peut aussi faire le bonheur. Pour conclure, je dirais que pour ne pas attraper la « Janviose », ne soyons pas dans l’excès, consommons avec modération. Comme dernier conseil, nous devons nous comporter comme mon Feu papa. Quelques mois avant la période des fêtes de fin d’année, il faisait les achats et stockait à la maison, ce qui fait qu’après les fêtes, nous ne manquions de rien. Pendant que les voisins se plaignaient, chez nous, c’était le sourire, la gaieté totale.

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